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Qualité Références n°79

Spécial Marché de la certification en 2018

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ANALYSE<br />

GESTION<br />

Faire évoluer l'approche processus<br />

pour plus de performance<br />

La gestion des processus augmente la performance d'une entreprise. Le concept de processus est une réponse au<br />

trop grand émiettement du travail – « le travail en miettes » – dénoncé dès 1956 par Georges Friedmann. Le concept<br />

suggère une recomposition des activités ultraspécialisées en grands processus ayant un sens économiquement<br />

parlant. Eddie Soulier, enseignant-chercheur au Pôle Hetic de l’université de technologie de Troyes explique pourquoi<br />

l’approche processus s'est imposée.<br />

Eddie Soulier,<br />

Enseignant-chercheur,<br />

Pôle Hetic, Université<br />

de technologie de<br />

Troyes.<br />

Une trop grande division technique du<br />

travail engendre une perte au niveau<br />

économique, car selon un phénomène<br />

bien connu des adeptes de la théorie<br />

des contraintes, la somme des optimums est<br />

toujours différente de l’optimum de la somme.<br />

C’est la raison pour laquelle de nombreuses théories<br />

industrielles actuelles ne font que remonter<br />

aux phénomènes holistiques : l’externe contre l’interne<br />

(avec la figure du client, ou de l’actionnaire<br />

s’agissant de la gouvernance), le futur (l’innovation)<br />

contre l’actuel, le cycle de vie intégral contre<br />

ses segments (conception, maintenance ou exploitation),<br />

le processus contre des activités morcelées.<br />

Dans chaque cas, c’est la compartimentation<br />

de l’entreprise qui est en cause. Rien à redire à cela,<br />

et pourtant l’approche par processus marque le pas.<br />

Trois tendances expliqueraient cela.<br />

UN PARADIGME DE MODÉLISATION ERRONÉ<br />

L’approche processus s’est largement diffusée dans<br />

les organisations à travers la qualité, le management<br />

transversal, l’écoute des besoins des clients<br />

ou encore la documentation des activités ou les<br />

systèmes d’information. Ce qui était à l’origine un<br />

état d’esprit critique envers l’organisation en silo<br />

a fini par être considéré comme une réalité substantielle<br />

: à l’image d’un organigramme qui reflète<br />

rarement l’organisation réelle d’une entreprise, un<br />

processus ne décrit pas une réalité objective. Pourtant<br />

la plupart des démarches de modélisation de<br />

processus tendent à substantifier, ce qui ne devrait<br />

être qu’une manière de considérer un phénomène.<br />

La première tendance nous amène donc à distinguer<br />

deux paradigmes de représentation de ce qu’est un<br />

processus. Nous appellerons le premier, a la modélisation<br />

de processus, marquant la croyance selon<br />

laquelle un processus est une entité substantielle.<br />

Rappelons qu’en philosophie une substance se définie<br />

ainsi « [P. oppos. à accident] Ce qui existe en<br />

soi, de manière permanente par opposition à ce qui<br />

change (...) Qu'il y ait, par derrière l'indéfinie série<br />

des événements, une cause première, une substance<br />

éternelle sous des phénomènes passagers, je l'admets<br />

(Bourget, Actes suivent, 1926, p. 35). [Chez Kant] Ce<br />

qui persiste au milieu du changement (des phénomènes)<br />

et le rend compréhensible. » (http://www.<br />

cnrtl.fr/definition/substance). L’ironie est alors<br />

d’utiliser un concept substantiel de processus pour<br />

représenter des aspects dynamiques, émergents<br />

ou innovants, d’une organisation. Ce qui est alors<br />

uniquement représenté, ce ne sont que les étapes<br />

d'un processus métier planifié. Nous proposons<br />

alors d’appeler modélisation par les processus le<br />

second paradigme. La proposition « de » indique<br />

que l’intérêt est le processus comme substance, alors<br />

que la proposition « par » indique que l’intérêt est<br />

un phénomène dynamique, quel qu’il soit, et que<br />

le processus est alors une façon pertinente de se le<br />

représenter. On retrouve alors le sens premier de<br />

ce qu’est un processus en philosophie : changement<br />

et développement comme réalité ultime. La pensée<br />

du processus cherche donc à décrire la dimension<br />

dynamique et changeante de toute réalité, plutôt<br />

que des activités planifiées. L’état de l’art montre un<br />

recul de l’intérêt pour la représentation de processus,<br />

au profit de l’approche par les processus, à un<br />

moment où les événements et les changements sont<br />

un objet fort d’attention pour les directions d’entreprise<br />

: montée des situations de crises, accroissement<br />

et diversification des risques, innovations<br />

disruptives et créativité, transformation digitale,<br />

nouvelles formes de travail, omnicanalité de la<br />

QUALITÉ RÉFÉRENCES • N°79 • Décembre 2018 I13

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