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Tout en haut des gradins, les trois lutteurs de<br />
sumo qui se mettent en position sur le terrain<br />
de basket-ball ressemblent à de gros ballons de<br />
plage en cuir. C’est une comparaison assez inhabituelle.<br />
Mais après tout, on est en Californie,<br />
et plus précisément dans le stade de l’université<br />
d’État de Californie (California State University)<br />
à Long Beach. La Walter Pyramid compte 4 000<br />
places et accueille les équipes de basket-ball et<br />
d’athlétisme des 49ers de Long Beach State.<br />
L’intérieur de la salle est tapissé de bannières noir et or sur lesquelles<br />
on peut lire : « Go Beach ». Il y a un stand de pop-corn et<br />
des vendeurs proposent des hot-dogs et des sodas XXL.<br />
Dans ce lieu aussi américain que peut l’être l’apple pie, deux<br />
lutteurs japonais et un lutteur mongol ne passent pas inaperçus<br />
lorsqu’ils s’échauffent sur le parquet lustré du terrain de basket.<br />
Les trois athlètes sont Byambajav Ulambayar, un Mongol de<br />
1,84 mètre et ancien lutteur de sumo professionnel ; Hiroki Sumi,<br />
un Japonais de 1,92 mètre ; et, avec son modeste 1,70 mètre,<br />
Takeshi Amitani, quintuple champion japonais universitaire. En<br />
cet après-midi de la mi-mars, ils sont venus pour le 19 e US Sumo<br />
Open annuel, le plus grand tournoi de sumo organisé en dehors<br />
du Japon. Tous les participants réunis ont récolté 18 titres de<br />
champion du monde de sumo et viennent de pays aussi lointains<br />
que le Japon, la Mongolie, l’Inde, l’Égypte, le Tadjikistan, la<br />
Géorgie, l’Ukraine, la Norvège ou l’Allemagne.<br />
Surprenant ? Pas vraiment. Plus que tout autre sport, le sumo<br />
est l’objet d’une tradition en pleine mutation. Au Japon, les meilleurs<br />
lutteurs sont régulièrement battus par de nouveaux concurrents<br />
venus de Russie, de Mongolie et d’Ukraine. En effet, ces<br />
pays ont adopté avec enthousiasme le sport national japonais<br />
et ont entrepris de le dominer.<br />
Cela vaut son pesant d’or<br />
Deux jours avant le début du 19 e US Sumo Open, dans la Walter<br />
Pyramid, nous retrouvons quelques-uns des plus célèbres compétiteurs<br />
à la pesée. Byambajav Ulambayar, l’ancien lutteur de<br />
sumo professionnel de 35 ans, affiche 161 kg sur la balance.<br />
« Je n’ai que la peau sur les os », plaisante-t-il.<br />
Alors que Byambajav Ulambayar revêt son peignoir violet aux<br />
motifs floraux et déambule avec la prestance d’un roi, Hiroki<br />
Sumi, 29 ans, saisit son ventre rebondi à pleines mains et grimpe<br />
sur la balance. Avec ses 220 kg, c’est l’un des lutteurs les plus<br />
lourds de la compétition. Quant à Takeshi Amitani, 26 ans et<br />
100 kg, il entre parfaitement dans la catégorie poids moyens.<br />
Pendant que Byambajav Ulambayar tente de marquer un<br />
panier avec une serviette roulée en boule, Takeshi Amitani et<br />
Hiroki Sumi forment un duo à la Laurel et Hardy, le premier<br />
traduisant nos questions à son collègue bien plus grand que lui.<br />
Affichant un éternel sourire, Hiroki Sumi, qui a combattu en<br />
2018 lors de l’un des plus grands événements de la WWE, le<br />
Greatest Royal Rumble, ressemble à une version japonaise de<br />
Dustin dans Stranger Things, la série Netflix.<br />
« Je m’entraîne très dur », raconte Hiroki Sumi par l’intermédiaire<br />
de Takeshi Amitani, un apollon musclé aux cheveux lissés<br />
vers l’arrière, une oreille gauche en chou-fleur et un œil en partie<br />
fermé à cause d’une blessure. « Je soulève 90 kg sur le banc,<br />
60 kg aux épaules et 140 kg aux jambes. » Sumi reproduit les<br />
mouvements tout en parlant, et ses membres, impressionnants,<br />
se contractent.<br />
Il montre son genou droit lézardé d’une méchante cicatrice<br />
rouge et boursouflée. Le prix à payer pour ses journées passées<br />
à soulever des poids et faire des squats.<br />
La routine de Takeshi Amitani est plus ou moins la même.<br />
Lorsqu’il était à l’université, il a voulu prendre de la masse<br />
74 THE RED BULLETIN