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L’Américain Kelly<br />
Gneiting (à gauche)<br />
aux prises avec son<br />
adversaire lors des<br />
premiers tours de<br />
la compétition dans<br />
la catégorie hommes<br />
poids lourds.<br />
gées : « Certains puristes disent que nous édulcorons et corrompons<br />
leur sport, et que les étrangers ignorent les concepts d’honneur<br />
et de tradition japonaise. » Malgré cela, il existe un<br />
moratoire officiel concernant les étrangers qui rejoignent les<br />
écuries de sumo professionnelles, à savoir un par équipe. « On<br />
compte 700 lutteurs de sumo répartis dans 35 écuries. Autrement<br />
dit, 5 % d’entre eux peuvent être étrangers, tout au plus,<br />
estime Andrew Freund. Et c’est non négociable. »<br />
Les seigneurs du sumo<br />
C’est le jour J. Les 4 000 spectateurs s’installent avec leurs boîtes<br />
à bento et leurs canettes de Sapporo alors que les joueurs de<br />
taiko traditionnel entament leur performance. Folklore japonais<br />
mis à part, cela pourrait être le public de n’importe quel sport<br />
américain habituel : éclectique et pas timide pour deux sous.<br />
Sur le dohyō, un arbitre japonais officie calmement en chemise<br />
blanche, nœud papillon et gants. Les matches sont souvent<br />
très rapides : à peine 10 secondes avant que l’un des lutteurs ne<br />
mette son adversaire à terre ou ne l’entraîne hors du cercle. Il<br />
existe 82 techniques de combat reconnues, et la plupart d’entre<br />
elles impliquent de pousser ou projeter son adversaire. Il est<br />
autorisé de donner des gifles, de faire des balayages de jambe et<br />
de tirer sur la ceinture (mawashi) de son adversaire. Mais il est<br />
interdit d’asséner des coups de poing, de donner des coups de<br />
pied et de tirer les cheveux.<br />
En bas des gradins, les concurrents attendent leur tour. Les<br />
Ukrainiens, un groupe musclé assez atypique, s’échauffent dans<br />
leur coin. Certains athlètes alternent mouvements d’échauffement<br />
et moments de relaxation. L’équipe norvégienne, blonde<br />
comme sa tenue, a dressé le drapeau national dans un coin,<br />
comme sur un camp de base arctique de fortune.<br />
Les matches hommes poids légers sont vite expédiés : Andrew<br />
McKnight et les douze autres Américains sont éjectés du dohyō<br />
et du tournoi. Point fort de la compétition : l’Ukrainien Sviatoslav<br />
Semykras s’élance contre la poitrine de son adversaire et,<br />
dans un demi-salto, envoie valser ce dernier dans la foule avant<br />
de se réceptionner à la perfection sur ses pieds, ce qui lui permet<br />
de remporter la médaille d’or. Voilà pourquoi les Ukrainiens sont<br />
idolâtrés dans ce sport.<br />
Mais la plupart des spectateurs sont là pour assister à la<br />
compétition hommes poids lourds, et c’est au tour de Byambajav<br />
Ulambayar, qui se place face à l’Égyptien Ramy Elgazar, vainqueur<br />
de l’US Sumo Open en 2015. Un match de sumo commence<br />
lorsque les deux adversaires posent leurs poings sur le sol<br />
du dohyō et lorsqu’ils finissent par s’affronter, l’Égyptien met le<br />
Mongol à terre puis le sort du ring. Il ne s’agit là que de la septième<br />
défaite de Byambajav Ulambayar en plus de dix ans de<br />
matches de sumo aux États-Unis.<br />
Le tournoi du nouveau venu Jose Galindo semble promis<br />
à une fin abrupte alors qu’il se positionne face à Kelly Gneiting,<br />
mais contre toute attente, le vétéran se retrouve soudain hors du<br />
ring. Jose Galindo savoure sa victoire. Un résultat exceptionnel<br />
pour celui qui avoue ne s’être entraîné que quelques semaines.<br />
L’adversaire suivant de Jose Galindo est Hiroki Sumi. Ils se<br />
cherchent pendant un moment, puis Sumi s’effondre. L’arbitre,<br />
persuadé que le pied gauche de l’Américain est sorti du ring en<br />
premier, déclare le lutteur japonais vainqueur. Mais la foule<br />
siffle. La vidéo est consultée et le panel de juges officiels se prononce.<br />
Galindo remporte le match : il bat ainsi son deuxième<br />
champion du monde en deux matches. Alors que Hiroki Sumi<br />
s’assied sereinement, le vainqueur soulève la foule d’un geste.<br />
« J’ai été à des Super Bowls et des finales de la NBA, mais c’est<br />
encore plus génial ! », s’écrie un spectateur.<br />
Enfin, après l’élimination de tous les favoris, Jose se retrouve<br />
face à Oleksandr Veresiuk en finale, mais il tombe sous les<br />
assauts de l’Ukrainien. « Gagner contre Hiroki Sumi, c’était fantastique.<br />
Je ne pensais pas en être capable… J’espérais juste le<br />
fatiguer un peu. » Avec une confiance boostée, Jose Galindo<br />
veut continuer la compétition de sumo. Au point de devenir le<br />
meilleur lutteur américain depuis Kelly Gneiting.<br />
Les compétitions de la journée touchent à leur fin. Les Ukrainiens<br />
ont gagné dans chaque catégorie, hommes et femmes<br />
confondus, à l’exception de la catégorie poids moyens, pour<br />
laquelle Takeshi Amitani a représenté haut les couleurs de son<br />
pays, le berceau du sumo. De tels résultats ne sont plus rares,<br />
mais Takeshi Amitani semble n’éprouver aucune rancœur visà-vis<br />
de ces usurpateurs étrangers, car selon lui, le développement<br />
de la popularité du sumo est très positif. « Je pense que<br />
c’est une bonne chose, dit-il. Le sumo est d’une grande simplicité<br />
et beaucoup de gens peuvent le pratiquer pour s’amuser. Pour<br />
les Japonais, peu importe la nationalité du vainqueur. »<br />
usasumo.com<br />
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