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Égalité ou complémentarité ?
Dans la première partie de notre étude, nous avons essayé d’apporter un éclairage sur la notion
de genre, qui permet de déconstruire les croyances d’une complémentarité entre les sexes.
Cet antagonisme entre une vision constructiviste et une vision essentialiste jalonne l’histoire
des mouvements féministes : égalité à tous les niveaux ou égalité dans la différence ?
Tout au long de l’histoire des mouvements des femmes, autour de ces questions, des visions
s’opposent, des mouvements se positionnent clairement en faveur d’une égalité totale, d’autres
pour une mise en valeur de la nature féminine, certains oscillent entre les deux et utilisent
les arguments des uns ou des autres pour arriver à leur fin, l’émancipation des femmes. Si,
selon Ute Gerhard, la question d’un féminisme différencialiste ou égalitaire n’a pu se manifester
qu’après la Seconde Guerre mondiale, « à partir du moment où l’égalité constitutionnelle
mais aussi civile a été permise aux femmes » 31 , dès la fin du 19 e siècle, s’est posée la question
de l’existence ou non d’une essence féminine qui engendrerait des traitements spécifiques au
niveau de leurs droits ou de leurs rôles dans la société. Si, lors de la première vague, toutes les
féministes s’accordaient pour élargir leurs droits civils et légaux, certaines revendiquaient un
traitement particulier alloué aux femmes : congés maternité, protection du travail, enseignement
spécifiques etc., quand les autres craignaient que le fait d’accorder un traitement particulier
aux femmes « ne soit une porte ouverte à la discrimination entre les sexes » 32 . Durant
la seconde vague, des divergences se sont affirmées au sein même des women’s studies avec
l’apparition du concept de genre d’un côté, et une mise en exergue et une réflexion autour de
la féminité, d’une essence féminine de l’autre. Cependant, il est important de noter que, les
débats et les divers courants féministes autour de ces questions se sont imposés de façon moins
dichotomique, tant l’enjeu est complexe.
Quelle militance ?
Eliane Gubin et Catherine Jacques évoquent « des pratiques militantes fortement marquées par
le genre : hommes et femmes ne militent pas de la même manière parce que le contexte social
et culturel autorise moins ces dernières ». 33 Soumises à davantage de préjugés, les femmes ont
développé des formes d’actions qui leur permettent d’être entendues dans l’espace public.
Si les féministes de la première vague s’inscrivaient dans une action plus réformiste, avec des
moyens et des outils empruntés aux partis politiques, les féministes de la seconde vague se sont
largement fait connaitre par des actions « ludiques, joyeuses, voire pétroleuses » 34 , hors de tout
système bureaucratique et hiérarchisé.
Par ailleurs, la question de la mixité s’est toujours posée. Les féministes de la première vague
en ont davantage usé, leurs structures étant le plus souvent liées aux partis politiques. Au
contraire, la seconde vague s’est caractérisée par sa non-mixité, qui reflétait un besoin de partage
des expériences communes, propres aux femmes, une reconnaissance d’une identité de
femme, devenant même fondement de la pensée politique féministe.
Enfin, le militantisme féministe se distingue du militantisme masculin parce qu’une grande partie
(ou la totalité) des tâches familiales incombait aux femmes. L’historienne Andrée Lévesque
évoque la difficulté pour les femmes de se dégager du temps pour le militantisme, puisqu’elles
assurent une double journée de travail, professionnelle et familiale. C’est pourquoi, lors de la
première vague, les militantes les plus actives étaient souvent célibataires, veuves ou mères
31 Le Siècle des féminismes, op.cit., p. 48.
32 Idem, p. 49.
33 Le Siècle des féminismes, op.cit., p. 82.
34 Claudine MARISSAL et Eliane GUBIN, Jeanne VERCHEVAL, Un engagement social et féministe, Bruxelles, Institut pour l’égalité
des femmes et des hommes, 2011, p.55.
étude
Le féminisme et l’enseignement, pour une égalité é filles/garçons
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