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1. La première vague (fin 19 e , première moitié du 20 e siècle) : égalité des droits
Nicole Van Enis, auteure de l’étude Les termes du débat féministe 36 , évoque une première vague
féministe qui porte surtout sur les revendications d’égalité en termes de droits civils, économiques
et politiques. Les idéaux de la Révolution ont porté, et les femmes se reconnaissent
comme groupe juridiquement discriminé. Lors de cette première phase d’émancipation, axée
principalement sur la transformation des lois, elles investissent l’espace public, modifiant profondément
« la démarcation des sphères privées et publiques dévolues aux femmes et aux
hommes » 37 .
Quelle militance ?
Étant exclues de tous les lieux et instances de pouvoir, les femmes auront besoin, pour agir, de
l’appui des hommes. Ainsi, la mixité est à la fois « un enjeu (la mixité est signe de progrès) et une
stratégie, la mixité assurant au mouvement une plus grande crédibilité, ainsi que des relais dans
les lieux exclusivement masculins » 38 . Les premières à se mobiliser sont surtout des femmes
issues de la bourgeoisie, nouvelle classe dominante, qui travaillent en réseaux et emploient
« toutes les formes modernes de communication pour se faire entendre (débats, conférences,
congrès) ». Elles « orientent leur militantisme dans une voie positiviste et rationnelle, (…) dans
le plus pur style réformiste. » 39 Leurs actions ne heurtent pas, « il existe parmi elles, une sorte
de consensus tacite sur les écarts possibles, les limites de la transgression, le seuil de tolérance
de la société » 40 .
Les femmes issues du monde ouvrier et du socialisme empruntent, quant à elles, les méthodes
des partis politiques. On note l’importance de la pétition comme première prise de parole des
femmes, qui permet une certaine discrétion dans la militance. Ainsi, en 1920, 160 000 belges
réclament le droit de vote 41 . Dans tous les cas, ouvrières ou bourgeoises, toutes les femmes
s’adonnant à la lutte pour leurs droits, seront confrontées, à un niveau plus ou moins fort, à la
répression : arrestation, agression, mais aussi perte de réputation.
Une idéologie différencialiste : l’égalité dans la différence
Lors de cette première vague féministe, l’idéologie essentialiste est forte. La majorité des féministes
auront mis en avant l’importance du statut de mère pour les femmes, réclamant une
reconnaissance de la maternité comme fonction sociale, une façon de faire reconnaitre leur
rôle dans la société. Ainsi, la maternité doit être « honorée et rétribuée ». En plus de la maternité,
d’autres droits spécifiques aux femmes sont défendus, tels que « les allocations familiales,
l’assurance maternité, la protection sociale de la femme enceinte, un travail spécifiquement
féminin etc. ». Selon l’historienne Anne Cova 42 , « si cette fonction permet la reconnaissance des
femmes dans la société, c’est à double tranchant puisque cela préserve la hiérarchie traditionnelle
: ‘aux femmes l’action sur le terrain, répondant à leurs qualités dites maternelles (le cœur,
l’intuition etc.) ; aux hommes les postes de commande parce qu’ils possèderaient un esprit de
synthèse ’. 43 On assiste alors à des conflits entre les féministes défendant la différence des sexes
et les féministes égalitaristes, plus avant-gardistes, qui remettent en question la maternité ou le
mariage. Dans les années 1930, les féministes dites différencialistes ont le vent en poupe, leurs
36 Nicole VAN ENIS, op.cit.
37 Le Siècle des féminismes, op.cit., p. 49.
38 Idem, p.427.
39 Idem, p.89.
40 Ibidem
41 Florence MONTREYNAUD, op.cit., p.92.
42 Le Siècle des féminismes, op.cit., p. 197.
43 Ibidem
étude
Le féminisme et l’enseignement, pour une égalité é filles/garçons
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