You also want an ePaper? Increase the reach of your titles
YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.
- en 1934, le Conseil des ministres décide que tous les emplois de l’État sont réservés aux
hommes avec une exception, le personnel domestique. S’ajoute en plus l’autorisation pour
le ministre de l’emploi de limiter le nombre de femmes mariées et célibataires pouvant travailler
dans les entreprises industrielles et commerciales.
En outre, la « protection du travail des femmes » est étendue, sous la pression des politiques
natalistes fascistes et conservatrices, qui tentent de faire « coïncider l’identité féminine avec la
maternité » 97 . En 1930, ce sont, en grande majorité, les féministes différencialistes qui ont la parole
puisque leurs demandes sont compatibles avec les programmes nationaux, conservateurs
et fascistes, qui visent à promouvoir les femmes dans leur rôle de mère uniquement.
1.3.6. La « travailleuse traquée » et l’avant-gardisme de l’Open Door
Council
Nous l’avons vu, il y a conflit entre, d’une part, les féministes prônant une égalité totale, « À
Travail égal, Salaire égal », acceptant ainsi « les valeurs masculines du salariat comme moyen de
promotion sociale et comme marque d’identité individuelle », et, d’autre part, les féministes
maternalistes qui tentent de valoriser « les critères d’autonomisation propres aux femmes en
s’appuyant sur la maternité » 98 .
« Issu d’une rupture avec l’Association internationale pour le Suffrage des femmes qui en majorité
prônait une protection de la travailleuse » 99 , l’Open Door Council est créé en juin 1926.
Selon Eliane Gubin, ce « mouvement élitiste et avant-gardiste (…), composé d’intellectuelles
engagées dans la vie professionnelle et publique (…) rompt totalement avec les idées féministes
dominantes de l’époque. » Il revendique une égalité totale dans le travail, hors de toute idée de
protection. La féministe belge, Louise de Craene-Van Duuren, l’une des premières docteures
en sciences sociales de l’Université de Bruxelles, se pose comme théoricienne du mouvement.
Dans son texte, La Travailleuse traquée, il est dit que « la femme majeure est une adulte libre et
responsable, il est injurieux de la soumettre comme l’enfant ou l’adolescent à des mesures restrictives
limitant son droit au travail (…). De nombreux métiers féminins parmi les plus pénibles
restent sans aucune protection alors que la loi s’acharne à détourner les femmes de professions
lucratives - nullement insalubres - comme la magistrature ». Concrètement, l’Open Door
International (ODI) s’oppose au repos post natal s’il est obligatoire ou pas assez rémunéré, et
réclame crèches, garderies, équipements collectifs. Selon Eliane Gubin, « en réalité l’ODI ne se
limite pas à l’égalité économique, il tente d’opposer au féminisme maternalisme dominant un
autre féminisme, qui annonce certains combats d’après 1970. » Plusieurs réflexions de Louise
de Craene-Van Duuren, reprises par Eliane Gubin, vont dans ce sens :
« Avant d’être épouse ou mère, la femme est d’abord une personne humaine ; la maternité, fonction
naturelle (comme la paternité), devoir moral (comme la paternité) et les travaux ménagers sont une
forme de l’activité sociale et ne relève pas plus d’un sexe que de l’autre. »
« Rien ne permet d’affirmer que la physiologie et la psychologie féminines s’accommodent mieux de
la lessive, de la cuisine, du nettoyage que du travail de bureau. »
« Le mariage est une forme déguisée et respectée de la prostitution où la femme se vend à vie. »
L’ODI produit une image positive de la travailleuse volontaire, « sans nier les servitudes du
salariat, elles lui paraissent préférables à l’aliénation familiale ». Si les réflexions de l’ODI sont
précurseuses pour l’époque, en Europe et aux États-Unis, elles seront pourtant peu suivies.
97 Le Siècle des féminismes, op.cit., p. 169.
98 Idem, p. 168.
99 Idem, p. 165.
étude
Le féminisme et l’enseignement, pour une égalité é filles/garçons
30