La Detention Preventive Prolongee En Haiti - Vera Institute of Justice
La Detention Preventive Prolongee En Haiti - Vera Institute of Justice
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Introduction<br />
Au cours de ces dernières années, les mesures sévères prises par la police pour enrayer<br />
l’augmentation de la criminalité ont entraîné une explosion du nombre des arrestations et<br />
des détentions en Haïti. <strong>En</strong> 2001, il y avait deux fois plus de personnes incarcérées dans<br />
les prisons haïtiennes qu’en 1995. Or, la proportion de personnes en détention préventive<br />
s’est maintenue au cours de cette même période, représentant près de quatre cinquièmes,<br />
soit environ 80 pour cent de la population carcérale. 1 Le déséquilibre le plus flagrant est<br />
constaté dans la zone urbaine de Port-au-Prince, où une juridiction unique dessert un<br />
tiers de la population nationale. Dans certaines juridictions de province, une meilleure<br />
tenue des dossiers et la mise en place de formations sur la chaîne pénale ont permis de<br />
réduire les taux de détention préventive, alors que le circuit judiciaire de la capitale est<br />
plus engorgé que jamais.<br />
<strong>La</strong> détention préventive existe dans tous les appareils judiciaires du monde. Même<br />
dans les mieux rodés, une personne accusée d’homicide pourra, surtout si l’affaire est<br />
complexe, passer plus d’une année en détention préventive. Le droit international n’<strong>of</strong>fre<br />
aucune définition précise de ce qu’est une détention préventive excessive. Le Pacte<br />
International Relatif aux Droits Civils et Politiques, ratifié par Haïti en novembre 1990,<br />
dispose seulement que « Tout individu arrêté ou détenu du chef d’une infraction pénale<br />
sera traduit dans le plus court délai devant un Juge(…) et devra être jugé dans un délai<br />
raisonnable ou libéré ». Elle ajoute également que la détention de personnes en attente de<br />
jugement «ne doit pas être la règle ».<br />
Le système juridique haïtien prévoit des périodes de détention préventive<br />
« raisonnables » à de nombreuses étapes du circuit judiciaire. 2 <strong>La</strong> police dispose de 48<br />
heures pour présenter un suspect devant les tribunaux. Une fois inculpé, le prévenu peut<br />
être gardé en détention préventive pour une durée maximale de quatre mois, au cours<br />
desquels les faits pesant sur lui font l’objet d’une enquête, à l’issue de laquelle la<br />
personne est libérée ou jugée. Cependant, ces délais sont rarement respectés. <strong>En</strong> pratique,<br />
le taux de détention préventive de Haïti est l’un des plus élevé du monde.<br />
Ce rapport a été rédigé par le <strong>Vera</strong> <strong>Institute</strong> <strong>of</strong> <strong>Justice</strong>, pour le Programme des<br />
Nations Unies pour le Développement (PNUD) en Haïti et l'Open Society <strong>Institute</strong> (OSI).<br />
Il se fonde sur les résultats d’une équipe de chercheurs chargés de proposer des plans<br />
détaillés, à court et moyen termes, pour réduire de manière significative le pourcentage<br />
des personnes en détention préventive. Camille Leblanc, Ministre de la <strong>Justice</strong> et de la<br />
Sécurité Publique, ainsi que son successeur Gary Lissade, nous ont apporté leur concours<br />
en nous donnant accès aux évaluations et études précédemment conduites et en nous<br />
1 Voir les tableaux figurant en Annexe 1, qui reprennent toutes les statistiques citées dans ce rapport.<br />
2 L’article 26 de la Constitution haïtienne dispose : « Nul ne peut être maintenu en détention s'il n'a comparu dans les<br />
48 heures qui suivent son arrestation, par-devant un Juge appelé à statuer sur la légalité de l'arrestation et si ce Juge n'a<br />
confirmé la détention par décision motivée. »