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Une histoire racontée à Sophie - La Flute

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Il pourrait vendre n’importe quoi <strong>à</strong> n’importe qui! C’est<br />

le porte <strong>à</strong> porte qui lui permet de vendre ses machines <strong>à</strong> écrire.<br />

Roulant km sur km avec sa petite Fiat qui, <strong>à</strong> l’entendre, est un bolide<br />

imbattable; il en vante les prouesses. «Il se prend pour Caracciola,<br />

répète-t-on». (Caracciola? C’est le Schumacher de l’époque). Les<br />

prouesses automobiles de l’oncle Emile n’en suscitent pas moins des<br />

peurs bleues <strong>à</strong> Martheli le jour où elle prend place dans ledit bolide.<br />

En fait, un tantinet émoustillée, elle en fait la critique sur le mode<br />

exclamatif !<br />

Quant <strong>à</strong> l’appartement d’Emile, il sert <strong>à</strong> la fois de bureau, de<br />

réception et de logement! Tante Marie y trône; c’est une gentille<br />

rougeaude, un peu portée sur la dive bouteille…<br />

Un monumental désordre y règne, papiers et machines <strong>à</strong> écrire<br />

s’entassent! Je suis invité certains dimanches.<br />

Oncle Emile, toujours baragouinant et tonitruant, me présente <strong>à</strong><br />

des voisins. À l’entendre je suis «Eine grosse Kanone», ce qui signifie<br />

dans le langage populaire «un phénomène»; je serais donc le fils d’un<br />

frère richissime qui ne gagne «non pas des Francs mais des Dollars,<br />

oui, des dollars, imaginez-vous!»<br />

Evidente boursouflure! C’est plutôt gênant…<br />

Un certain été, on va <strong>à</strong> la pêche au bord d’un certain étang, l’air<br />

est moite, infesté de moustiques. L’oncle Emile se baigne, chapeau<br />

mou sur la tête et cigare au bec. Un feu destiné <strong>à</strong> faire lâcher prise<br />

aux moustiques nous attire l’ire d’un paysan. Intervention du garde<br />

champêtre, <strong>à</strong> nous de décamper comme des malpropres… amende <strong>à</strong><br />

l’appui.<br />

Un beau jour, bien des années après, alors que, pour un an, nous<br />

habitons Zürich avec Natalie et Anne, (stage chez Hugo Kayenbühl),<br />

Maman et moi découvrons qu’après tout une machine <strong>à</strong> écrire nous<br />

rendrait bien service. Bien entendu, on s’adresse <strong>à</strong> l’oncle Emile. Il<br />

ne demande pas mieux et nous propose «ce qui se fait de mieux au<br />

monde!» Il nous fait un prix… merci Tonton! En fait, cette mirifique<br />

machine se révélera calamiteuse, quasi inutilisable!<br />

Epilogue: l’oncle Emile jouait, la tante Marie buvait. Ils ont fini<br />

bien tristement, je ne l’ai su que beaucoup plus tard.

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