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LES CAHIERS DE LA CINEMATHEQUE n°1.pdf - Institut Jean Vigo

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"Le phonocinéma-Théâtre" fut présenté, par une annonce de presse, comme " un spectacle auquel<br />

les familles ne manqueront pas d'assister parce qu'il fait l'amusement des enfants en même temps que la<br />

joie des parents". Il appartenait à Napoléon RANCY, propriétaire d'un des plus grands cirques français, qui<br />

avait créé, un an auparavant, le 8 Décembre 1906, la première salle de cinéma de Toulouse. Au son d'un<br />

orchestre de plusieurs musiciens, le public put assister à des représentations les plus variées, où se<br />

succédaient des drames, des vaudevilles, des scènes comiques et des féeries, "avec dialogues et bruits<br />

appropriés" (1). La première soirée eut lieu le samedi 16 Février 1907. Le prix des places était de 1,50 Fr<br />

(fauteuils), 1 Fr (Premières) et 0,50 Fr (Pourtour). Les séances débutaient chaque soir, à 20 h 20 et, les<br />

jeudi et dimanche, en matinée, à 14 h 30. Le programme était composé de films fournis, en majorité, par la<br />

maison Pathé : "La Femme du Lutteur", "Idylle sous un tunnel", quelques comiques de la série des "Boireau"<br />

avec André Deed, des "films à truc" de Méliès, et des "scènes de la vie réelle", comme "Au Pays noir",<br />

réalisé par ZECCA en 1905 : "Rien de plus captivant que la vie des mineurs, avec ses terribles<br />

conséquences, la descente dans les puits, le travail, puis enfin une épouvantable explosion. En fin de<br />

programme, "La Grève des bonnes" a obtenu un grand succès de fou-rire".<br />

"Le Phonocinéma-Théâtre" donna sa dernière représentation le 3 Mars, avec "Le Carnaval de<br />

Venise", "en vue en couleurs prise sur le vif", et "la Poule aux œufs d'or", "pièce en douze tableaux".<br />

Le directeur de "l'Eldorado", comme celui de "l'Alcazar", avait rigoureusement banni du répertoire<br />

"toutes les chansons trop lestes qui fleurissaient ordinairement au café-concert, et qui éloignent les familles".<br />

Mais, à l'encontre de son concurrent, et tout au moins à cette époque, il décida de ne jamais mêler, dans<br />

une même soirée, différentes sortes de spectacles. Il s'était aperçu, dès le début, qu'une séance<br />

entièrement consacrée à des films attirait autant de monde dans sa salle, qu'une troupe d'opérettes ou qu'un<br />

programme complet de variétés. Aussi, dans son établissement, le cinématographe ne fut jamais le parent<br />

pauvre du music-hall.<br />

"Le phonocinéma-Théâtre" ayant fait "le plein" tous les soirs, il récidiva peu de jours après la clôture,<br />

en annonçant "les merveilleuses vues comiques, dramatiques, instructives et sensationnelles du "Cinéma-<br />

Musica". Cette "tournée", qu'il conserva quinze jours, du 3 au 22 Mai 1907, renouvelait ses "rouleaux" deux<br />

fois par semaine, et ses projections étaient accompagnées par l'orchestre de "l'Eldorado", placé sous la<br />

direction de H. AZEMA. Le grand succès de son programme fut la bande d'actualité sur la catastrophe du<br />

cuirassé "Iéna", "qui a mis la France en deuil et dont deux de nos perpignanais figurent parmi les<br />

malheureuses victimes" (2). L'engouement était grand, dans le public, pour ces documents réels et pris sur<br />

le vif qui permettaient de voir s'animer sur l'écran, les gravures du "Petit Journal" et de "l'Illustration". Bientôt<br />

d'ailleurs, les actualités reconstituées en studio disparurent définitivement, pour laisser la place à la presse<br />

filmée qui allait se développer avec "le Pathé Journal" hebdomadaire.<br />

Agréablement surpris par l'affluence qui remplissait chaque jour sa salle, le directeur de "l'Eldorado"<br />

essaya par tous les moyens de maintenir le " Cinéma Musica" à l'affiche, mais il ne put y parvenir, les<br />

"tournées" ayant un calendrier très strict qui ne leur permettait pas de stationner plus longtemps que prévu<br />

dans le même endroit.<br />

Comment expliquer le succès de plus en plus vif des projections cinématographiques ? Le<br />

cinématographe était le spectacle populaire par excellence, apte à accueillir toutes les catégories de<br />

spectateurs, les enfants et les jeunes filles pouvant y assister. En outre, il était accessible à presque toutes<br />

les bourses. Au plus bas, les prix des places était généralement de 1,50 Fr au théâtre, de 1 Fr au music-hall,<br />

et seulement de 0,50 Fr ou 0,25 Fr au cinéma. La différence était d'importance à une époque où les fins de<br />

mois devenaient de plus en plus difficiles à boucler, et où les salaires n'avaient jamais été aussi bas.<br />

Cinquante centimes de plus dans le porte-monnaie d'un petit employé de Saint-Mathieu, étaient suffisants<br />

pour que celui-ci, au moins une fois par mois, puisse s'offrir deux heures d'oubli devant quelques projections.<br />

De son côté le directeur de salle subissait lui aussi ces contre-coups économiques.<br />

(1) "Les imitations de chanteurs à la mode sont parfaites et ont été fort applaudies",(in "L'Indépendant"<br />

du 17 Février 1907).<br />

(2) Le cuirassé "Iéna" avait sauté en rade de Toulon, le 12 Mars 1907. Les deux victimes<br />

perpignanaises s'appelaient AMIGAS et RAVEL.<br />

© Cinémathèque euro-régionale <strong>Institut</strong> <strong>Jean</strong> <strong>Vigo</strong> <strong>LES</strong> <strong>CAHIERS</strong> <strong>DE</strong> <strong>LA</strong> <strong>CINEMATHEQUE</strong> N° 1 janvier 1971<br />

Arsenal espace des cultures populaires – 1 rue <strong>Jean</strong> Vielledent, 66000 PERPIGNAN Tél. 04.68.34.09.39 Fax. 04.68.35.41.20<br />

courriel : contact@inst-jeanvigo.com site internet : www.inst-jeanvigo.asso.fr<br />

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