LES CAHIERS DE LA CINEMATHEQUE n°1.pdf - Institut Jean Vigo

3 - UNE PLACE AU SOLEIL
1909 - 1914
Où en étaient les spectacles perpignanais en 1909 ? En vérité, ils n'avaient guère évolué depuis
treize ans. En dehors du Théâtre Municipal qui se débattait toujours dans des difficultés de gestion (1), tout
en présentant une modeste saison lyrique et quelques troupes disséminées au cours des mois d'hiver
(Zeller, Baret, Porte Saint-Martin), le public de notre ville n'avait à sa disposition que les derniers théâtres
forains (Théâtre des Variétés, Théâtre Delouville), qui commençaient d'ailleurs à péricliter (2), les rares
représentations d'un cirque au moment de la foire (Rancy ou Egelton), les concerts militaires, à la
Promenade des Platanes, par le 53 ème d'infanterie puis le 24 ème colonial, et enfin "L'Eldorado" qui
programmait toujours les mêmes numéros de music-hall, où se succédaient équilibristes, chanteurs de
genre, jongleurs de salon, spécialistes de poses de marbre et, parfois, mais fort rarement, une vedette de
passage, comme Darnem ou le spirite Bénévol.
A l'encontre de ces divertissements installés depuis 1900 dans une routine sans imagination, le
cinématographe poursuivait allègrement sa route. Cherchant tous les moyens possibles de se faire mieux
connaître, attirant de jour en jour un public de plus en plus nombreux, de plus en plus séduit par la magie
des images animées, il n'allait pas tarder à conquérir, à la veille de la guerre, la plus belle place au soleil des
spectacles.
§
L'année 1909 vit le passage à Perpignan de "l'American-Cinéma-Barnum", dernière tournée
cinématographique, que "l'Eldorado" présenta du 4 Mai jusqu'à la fin Juin. Une publicité tapageuse en faisait
"le roi des projections" et "L'Indépendant" lui-même, affirmant qu'il avait assisté au réglage des objectifs,
reconnaissait "n'avoir jamais vu des tableaux d'une si parfaite netteté et sans aucune trépidation". Si ces
extraits de presse séduisants ressemblaient à s'y méprendre à tous ceux que les journaux de Perpignan
avaient déjà consacré au spectacle des "ombres mouvantes", en revanche, on peut mettre à l'actif de
"l'American", deux innovations qui firent nettement sensation, à l'époque, dans la salle du music-hall de la
place Bardou-Job : Eclairage de la salle entre chaque film (3), "ce qui délasse l'œil du spectateur", et
projection sur un écran encadré de noir, "ce qui donne un plus beau relief".
(1) En 1912, ces difficultés seront toujours présentes : "La Municipalité obligée de faire face aux
dépenses d'une ville nouvelle, ne peut trouver les fonds disponibles pour faire marcher le théâtre six
mois d'hiver".
(2) Seul "l'Eden-Théâtre" eut un relatif succès jusqu'à la guerre. Cet établissement en planches qui se
dressait sur la Promenade des Platanes et n'avait rien à voir avec l'ancien Théâtre Monso des
années 1900, appartenait à deux négociants en bois perpignanais, CULIE et GATUMEL. Sous la
direction de MAHOUX, puis de SAILLENS, il périclita peu à peu, à partir de 1912. Le 25 juillet 1914,
il fut détruit par un incendie.
(3) Plus exactement entre chaque bobine, les cinémas ne possédant, à cette époque, qu'un seul
projecteur.
© Cinémathèque euro-régionale Institut Jean Vigo LES CAHIERS DE LA CINEMATHEQUE N° 1 janvier 1971
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