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Alfredo Jaar "Paysage" - Académie de Toulouse : Mission TICE

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les plus graves dans notre société. Songeons en cet instant qu’il y a quelques<br />

heures à peine, ce matin encore, une cour d’assise était réunie ici et qu’un<br />

homme en cet endroit a été condamné.<br />

Mais pourquoi donc avoir voulu accueillir l’œuvre d’<strong>Alfredo</strong> <strong>Jaar</strong> en un tel lieu ? Et<br />

pourquoi donc avoir voulu aussi que son accueil coïnci<strong>de</strong> avec la célébration du<br />

cinquantième anniversaire <strong>de</strong> la Déclaration universelle <strong>de</strong>s droits <strong>de</strong> l’homme ?<br />

Une cour d’assises, une œuvre d’art, les droits <strong>de</strong> l’homme : quelles<br />

convergences relient ces trois éléments épars ?<br />

Pour <strong>de</strong>ux d’entre eux, l’art et la justice, on pourrait dire il est vrai qu’ils ont<br />

souvent fait bon ménage, qu’ils se sont même souvent épaulés l’un l’autre au<br />

cours du temps. C’est que, pour s’affirmer et pour se faire reconnaître, la justice<br />

a toujours eu besoin <strong>de</strong> se situer dans un cadre fortement symbolique et qu’elle<br />

n’a pas manqué, pour perfectionner ce cadre nécessaire, d’avoir recours aux<br />

artistes. Ainsi ceux-ci l’ont souvent servi en représentant les vertus qu’elle voulait<br />

exprimer ou les valeurs qu’elle entendait défendre (et nous en avons une<br />

démonstration éclatante avec le plafond <strong>de</strong> cette salle). L’art a aussi aidé la<br />

justice, <strong>de</strong> façon plus indirecte, comme faire-valoir, comme signe <strong>de</strong> puissance<br />

voire <strong>de</strong> munificence qui tient chacun à distance... respectueuse (observons ici<br />

combien la seule décoration du cul-<strong>de</strong>-four en tête <strong>de</strong> salle constitue un élément<br />

<strong>de</strong> distanciation et <strong>de</strong> protection <strong>de</strong> la cour d’assises).<br />

De sorte que, en installant une nouvelle œuvre d’art en ce lieu, nous ne faisons<br />

peut-être que renouer avec une ancienne tradition...<br />

Ne renions pas notre passé. Reconnaissons qu’il est agréable <strong>de</strong> disposer <strong>de</strong><br />

l’œuvre forte d’<strong>Alfredo</strong> <strong>Jaar</strong> ; et ainsi <strong>de</strong> faire <strong>de</strong>s envieux !<br />

J’en profite pour remercier l’artiste, spécialement pour sa présence parmi nous<br />

ce soir, la Caisse <strong>de</strong>s dépôts et consignation pour sa générosité à notre égard<br />

puisque, propriétaire <strong>de</strong> l’œuvre, elle veut bien la mettre à notre disposition et<br />

aussi "les Abattoirs" puisqu’ils ont accepté <strong>de</strong> jouer les intermédiaires dans cette<br />

opération <strong>de</strong> prêt.<br />

Mais permettez-moi <strong>de</strong> revenir sur les rapprochements que j’évoquais entre cette<br />

œuvre, cette salle et les droits <strong>de</strong> l’homme, tant il est évi<strong>de</strong>nt que notre<br />

rencontre ce soir n’a pas pour principal objet <strong>de</strong> célébrer l’orgueilleuse tentation<br />

d’un retour aux sources <strong>de</strong> la décoration judiciaire...<br />

Et dans cette démarche, nous allons, si vous le voulez bien, du plus simple au<br />

plus compliqué.<br />

Le plus simple à mes yeux ce sont ces visages banalement humains, ces visages<br />

fatigués et interrogatifs, ces visages qui semblent comme chargés d’une douleur<br />

retenue, ces visages <strong>de</strong> réfugiés du Rwanda qu’<strong>Alfredo</strong> <strong>Jaar</strong> nous fait entre<br />

apercevoir <strong>de</strong> façon délibérément fragmentée. Regardons-les attentivement : en<br />

définitive ils ne sont pas apeurés, ils ne sont pas non plus plaintifs ou implorants.<br />

Ils ne sont pas davantage révoltés. Les personnages ont au contraire le regard<br />

droit et ils sont pleins <strong>de</strong> dignité. Ils sont même étrangement calmes. On dirait<br />

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