Alfredo Jaar "Paysage" - Académie de Toulouse : Mission TICE

que la justice a décidé pour la première fois de statuer : la dictature et les
dictateurs sont susceptibles de faire l’objet d’un jugement de l’histoire et ne sont
pas assurés de bénéficier d’un oubli lénifiant. Ainsi dans El Día que me quieras,
Alfredo Jaar nous montre au premier plan un dictateur (Franco) qui jouit
précisément d’une amnésie pernicieuse de la population et qui apparaît sous des
traits rassurants. Les photos en noir et blanc sont le symbole de la nostalgie.
Cependant, par un habile jeu de miroir, on découvre derrière ces images
paisibles la face cachée de la dictature, avec des photos beaucoup plus actuelles,
en couleurs, d’un dictateur en exercice, connu pour ses exactions, et dont les
photos officielles et rassurantes se mêlent à des photos beaucoup moins
réjouissantes sur la réalité de la dictature.
Pour permettre aux élèves d’aborder l’œuvre plus facilement, il sera bon de
replacer Franco et Pinochet dans leurs contextes respectifs. Cela pourra être fait
à travers l’étude de quelques textes.
Par ailleurs, l’œuvre d’Alfredo Jaar s’inspire, dans sa composition et dans son
titre, du tango. Le titre El Día que me quieras renvoie, en effet, au film américain
de John Reinhardt, avec Carlos Gardel dans le rôle titre, ainsi qu’au tango qui fut
écrit pour ce film et qui le clôture : Volver. Ce tango évoque le retour, la peur du
passé, du souvenir et de l’oubli, des thèmes présents dans l’œuvre de Jaar. Il
serait donc intéressant de poursuivre l’étude de El Día que me quieras par celle
de ce tango et des spécificités de ce genre de musique. On pourra trouver la
transcription de ce tango et son approche pédagogique dans Gran Vía première
(Didier, pp. 176-177).
Comme on l’a vu, El Día que me quieras repose sur une construction spatiale très
particulière qui mérite d’être étudiée. L’œuvre d’Alfredo Jaar exposée à la Cour
d’Appel de Toulouse, Paysage, bien que traitant d’un thème différent, reprend un
dispositif comparable. On pourrait donc consacrer une première partie de l’étude
à l’analyse de El Día que me quieras, à partir de reproductions photographiques,
et mieux saisir la réalité de sa disposition spatiale par une visite à la Cour
d’Appel. Ce n’est qu’à cette condition que les élèves prendront la pleine mesure
de la créativité de Jaar et de la portée de son œuvre.
En guise d’approfondissement ultérieur, l’étude de El Día que me quieras pourra
s’enrichir de celle de Paysage, abordée sous l’angle problématique de la
dénonciation par la création artistique (un parallèle pourra notamment être établi
avec les tableaux de Francisco Goya, El Tres de Mayo, et de Diego Rivera, El
Ingenio).
(1) El Día que me quieras, 1990, Museo de Arte Moderno, Barcelona.
19