“ NOS CLIENTS SONT TOUS UNIQUES” - Alstom
“ NOS CLIENTS SONT TOUS UNIQUES” - Alstom
“ NOS CLIENTS SONT TOUS UNIQUES” - Alstom
Create successful ePaper yourself
Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.
48<br />
paroles et design<br />
<br />
X. Allard : Le projet défi nitif est-il toujours<br />
celui que vous imaginiez ?<br />
J.-M. Wilmotte : Même si nous y<br />
investissons tout notre bon sens, il arrive que<br />
le chiffrage modifi e le projet. Car la principale<br />
contrainte aujourd’hui est le respect<br />
du budget. De ce fait, ce sont l’innovation<br />
technique, la mise en œuvre et le détail<br />
qui font la différence.<br />
X. Allard : À propos de technique,<br />
quelle est l’infl uence du numérique dans<br />
votre inspiration ?<br />
J.-M. Wilmotte : Pas énorme. C’est une<br />
technique parfois trompeuse. C’est surtout<br />
un artifi ce de présentation car les images<br />
générées par le numérique sont très belles.<br />
L’image numérique permet de mieux<br />
présenter le projet au client. Elle l’explique<br />
de manière plus ludique, plus immédiate.<br />
Cela ne nous empêche pas d’être à l’affût :<br />
nous avons des collaborateurs qui passent<br />
leur temps à chercher de nouveaux logiciels.<br />
Des techniques comme Catia (1) ont bien<br />
marché et ont changé d’ailleurs la façon<br />
de faire des voitures ou des avions.<br />
Catia a notamment permis d’améliorer la<br />
communication entre les différentes équipes<br />
en charge de la conception (design, ingénierie<br />
et industriels) et d’aller au-delà de son<br />
imagination. C’est un incontournable dont<br />
il nous faut suivre les développements.<br />
X. Allard : La technologie numérique,<br />
au niveau du vocabulaire formel, n’a donc<br />
rien apporté à la créativité ?<br />
J.-M. Wilmotte : Je crois peu à la création<br />
assistée par ordinateur. Je crois à la création<br />
intelligente, à l’association mentale.<br />
Il ne faut pas déconnecter le cerveau<br />
du crayon. Avec la technologie qui prolifère,<br />
si l’on continue, on aura les mêmes<br />
formes partout. Simplement parce que<br />
tout le monde sait se servir d’un ordinateur.<br />
La technologie peut donc être facteur<br />
de banalisation, pas de création.<br />
Être un bon designer, ce n’est pas faire<br />
de la 3D sur un écran.<br />
(1) Conception assistée tridimensionnelle interactive appliquée.<br />
X. Allard : Est-ce que vous pensez<br />
avoir une signature ?<br />
J.-M. Wilmotte : Ce n’est pas moi qui<br />
peux le dire. En tout cas, je suis fi dèle à mon<br />
propre langage. J’ai des racines classiques<br />
et un vocabulaire qui évolue, qui s’enrichit<br />
au fi l des rencontres, des technologies,<br />
des voyages, des lectures, des fi lms…<br />
Un alphabet, en somme, que j’ai transmis<br />
à mes équipes. Donc il y a une signature<br />
<strong>“</strong>agence” avec, de temps en temps,<br />
des écarts que je corrige ou que j’accepte.<br />
X. Allard : Pouvez-vous nous dire,<br />
en conclusion, comment vous voyez<br />
le train du futur ?<br />
J.-M. Wilmotte : Le train de demain sera<br />
plus ergonomique avec des lieux de<br />
rencontres mieux pensés tels que l’espace<br />
bar, et d’une grande luminosité. Le train<br />
du futur, je le vois silencieux. En tout cas,<br />
acoustiquement pensé.<br />
X. Allard : Nous considérons justement<br />
le niveau sonore comme une composante<br />
inaliénable du confort. Nos ingénieurs<br />
travaillent donc énormément sur<br />
les performances acoustiques de nos<br />
trains, avec un grand souci du détail,<br />
comme le bruit de la souffl erie du TGV.<br />
J.-M. Wilmotte : Le bruit est aujourd’hui<br />
un des grands problèmes de civilisation.<br />
L’homme est très sensible au bruit. Certains<br />
peuvent rendre fou. La diminution du bruit,<br />
notamment celui des tablettes qui s’ouvrent<br />
ou des portes coulissantes entre les voitures,<br />
constitue donc, il me semble, une voie<br />
de progrès. Entrer dans un train, élément<br />
romanesque par essence, devrait être comme<br />
pénétrer dans le silence et le feutré.<br />
Cela me fait penser à ces sièges à oreilles<br />
exceptionnels qui équipaient les trains<br />
Florence-Rome dans les années 54/56.<br />
Même le bruit des couverts – on entendait<br />
que cela dans le restaurant – était presque<br />
musical. Depuis, rien de plus beau,<br />
rien de plus raffi né en matière de mobilier<br />
ferroviaire n’a été créé.<br />
Propos recueillis par<br />
Carole Galland