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(1992) n°3 - Royal Academy for Overseas Sciences

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— 415 —<br />

Toujours à propos de cette période, M. Stengers <strong>for</strong>mule une autre remarque essentielle<br />

:<br />

Dans certains cas, même lorsque l’on se trouve intellectuellement sur la même longueur<br />

d’ondes que M. Pétillon, on a un peu le sentiment qu’ils (ses regrets) s’appliquent à ce<br />

qui, positivement ou négativement, n’était sans doute pas à l’époque dans l’ordre réel des<br />

possibilités.<br />

N otre confrère ne précise pas ici les regrets de M. Pétillon dont il craint qu’ils<br />

aient été vains. Sans doute vise-t-il notam m ent la définition officielle par la Belgique<br />

d ’une politique d ’association interne et externe, que M. Pétillon avait demandée au<br />

gouvernement dès 1956 et qui n’intervint, à son initiative, qu’au début de 1959. Une<br />

divergence de vues s’est déjà manifestée sur ce point entre les deux auteurs : M. Stengers<br />

a estimé, dans un article du Flambeau, que l’adoption en 1956 du plan de 30 ans<br />

de M. Van Bilsen aurait déchiré l’opinion belge et suscité l’opposition de la majeure<br />

partie des coloniaux, alors qu’en 1959 la nouvelle politique était devenue possible sans<br />

provoquer ces déchirements ; M. Pétillon a estimé de son côté, dans Témoignage et<br />

Réflexions, que l’adoption, en 1956, d ’une politique d ’origine privée proposant la<br />

retraite devant le nationalisme naissant eût été en effet impossible ; mais il ajoutait<br />

qu’il était devenu urgent en 1956, pour les pouvoirs publics, de définir une politique<br />

et que la seule possible, parce que la seule acceptable par tous à ce moment, était<br />

la politique d ’association, interne et externe (v. sur ce point : T.R., p. 238, point 10 ;<br />

pp. 424-425, note 9, ainsi que la référence à l’article de M. Stengers paru dans Le<br />

Flambeau, n° 7-8 de sept.-oct. 1959, p. 475).<br />

Seule une connaissance très précise des mentalités de cette époque perm ettra sans<br />

doute, plus tard, d ’y voir plus clair. Pour ma part, je voudrais présenter ici certains<br />

éléments dont l’ensemble me conduit à avoir sur cette question une opinion partiellement<br />

différente de celle de M. Stengers.<br />

En Belgique, il régnait à l’évidence un robuste conservatisme au sein des milieux<br />

dirigeants, économiques, politiques et administratifs, à l’égard de l’évolution politique<br />

du Congo. M. Pétillon l’a rappelé et décrit dans ses travaux. J ’en fis personnellement<br />

une expérience très éclairante lorsque je m’entendis affirmer, en 1956 précisément, par<br />

l’A dministrateur général des Colonies que le projet de statut des villes restait à l’étude<br />

et que rien ne pressait parce que, me dit-il sur le ton ferme mais amical du conseil<br />

paternel, «ce q u ’il faudra encore pendant longtemps au Congo, ce sont des routes,<br />

des champs, des écoles, des hôpitaux ; le reste n’est que de l’exaltation».<br />

Il n’empêche qu’il y avait aussi, et non pas en dehors, mais au sein même des<br />

milieux dirigeants, de même q u ’au sein des grands mouvements sociaux et dans les<br />

milieux religieux, des esprits qui s’interrogeaient sur l’évolution des colonies d ’Asie<br />

et d ’Afrique et qui étaient ouverts à une politique de mouvement. Écoutant avec<br />

sympathie J. Van Bilsen, ils ne le suivaient cependant pas aveuglément et désiraient<br />

réfléchir aux politiques à élaborer. Plusieurs de ces hommes se sont trouvés au gouvernement<br />

en 1959 et lors de la Table Ronde de 1960 ; d ’autres ont à tout le moins<br />

ébranlé, voire influencé certains ministres, de nature plus traditionnelle, qui participèrent<br />

au même gouvernement. Au Congo, nous connaissions assez mal ces cercles à la fois<br />

progressistes et prudents, mais nous savions qu’ils existaient et qu’ils gagnaient en<br />

influence. À Bruxelles, ceux qui servaient le gouvernement et ceux qui gravitaient<br />

autour de lui devaient les connaître beaucoup mieux que nous. Ces cercles, il est vrai,

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