1 - Institut français de l'éducation
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476 JOURNAL DES INSTITUTEURS<br />
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poser, par mesure administrative ou -par circulaire,<br />
au lieu <strong>de</strong> laisser les maîtres libres<br />
<strong>de</strong> l'adopter ou <strong>de</strong> la délaisser. On a prétexté<br />
la nécessité d'avoir l'uniformité <strong>de</strong> métho<strong>de</strong><br />
dans les mêmes familles, dans les mêmes écoles.<br />
Sans doute. Mais cet acte un peu autoritaire<br />
a été une maladresse.<br />
Comme nous avons déjà eu l'occasion <strong>de</strong> le<br />
dire, les défenseurs <strong>de</strong> l'écriture droite ne veulent<br />
reconnaître, à l'avantage <strong>de</strong> l'écriture penchée,<br />
qu'une faible différence avec l'écriture<br />
droite au point <strong>de</strong> vue vitesse et lisibilité.<br />
Mais ce qui nous importe avant tout, c'est<br />
la santé <strong>de</strong>s enfants qui nous sont confiés, et<br />
les attitu<strong>de</strong>s plus ou moins vicieuses et grosses<br />
<strong>de</strong> conséquences qu'ils peuvent contracter.<br />
Santé présente et santé future <strong>de</strong> milliers et<br />
<strong>de</strong> milliers d'écoliers, donc <strong>de</strong> milliers et <strong>de</strong><br />
milliers <strong>de</strong> citoyens pour <strong>de</strong>main.<br />
La Société libre' pour l'étu<strong>de</strong> psychologique<br />
<strong>de</strong> l'enfant s'est efforcée, <strong>de</strong> son côté, <strong>de</strong> réaliser<br />
quelques expériences pratiques. D'après<br />
le Bulletin <strong>de</strong> juin <strong>de</strong> la Société, on a étudié<br />
la position d'enfants écrivant une fable<br />
apprise par cœur, les uns en écriture droite,<br />
les autres en écriture penchée, et ignorant<br />
absolument le but poursuivi. Les éléments<br />
d'appréciation étaient fournis « par la station<br />
sur les <strong>de</strong>ux ischions, par l'appui <strong>de</strong> la poitrine,<br />
l'inclinaison du tronc à gauche, l'inclinaison<br />
<strong>de</strong> la tête à gauche, le tronc comprimé<br />
par les bras, la distance <strong>de</strong>s yeux au .papier,<br />
l'inclinaison ou courbure dû dos en avant ».<br />
On nous avait fait un tel tableau <strong>de</strong>s méfaits<br />
<strong>de</strong> l'écriture penchée et mis sur son compte<br />
tant d'infirmités, <strong>de</strong> maladies, <strong>de</strong> déformations,<br />
que nous restons perplexes <strong>de</strong>vant les<br />
conclusions <strong>de</strong>s expériences faites par la Société<br />
psychologique :<br />
« Le genre d'écriture n'influe pas :<br />
Sur la position unifessière ou bifessière ;<br />
Sur l'appui contre la table ;<br />
Sur la distance <strong>de</strong>s yeux au papier;<br />
Sur l'inclinaison du dos en avant. »<br />
La Bévue <strong>de</strong> l'enseignement primaire se désintéresse<br />
<strong>de</strong> la question en quelques lignes<br />
évi<strong>de</strong>mment humoristiques :<br />
« <strong>Institut</strong>eurs, mes camara<strong>de</strong>s, efforcezvous<br />
d'obtenir une bonne attitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> vos élèves<br />
et laissez-les écrire, droit ou penché, selon<br />
leur convenance. Faites mieux : apprenezleur<br />
les <strong>de</strong>ux métho<strong>de</strong>s, et faites effectuer certains<br />
exercices en écriture droite (le calcul par<br />
exemple), les autres en écriture penchée. Puis,<br />
laissez les ligueurs se battre, car ils continueront,<br />
n'en doutez pas ! »<br />
Le Volume traite plus sérieusement la question<br />
:<br />
« Ecrivez' comme vous voudrez, mais écrivez<br />
lisiblement. Et c'est le <strong>de</strong>rnier mot <strong>de</strong> la<br />
sagesse 1 » ,<br />
***<br />
Que conclure?<br />
N'imposons rien, ne défendons rien. Tel<br />
maître qui préfère l'écriture droite enseignera<br />
sans attrait, et probablement sans bons résultats,<br />
l'écriture penchée à ses élèves ; et, inversement,<br />
tel autre maître qui préconise l'écriture<br />
penchée enseignera sans doute assez mal<br />
récriture droite.<br />
Mais, avant fout, d'accord avec Rollin, Pestalozzi,<br />
Carré et tous les pédagogues, n'ayons<br />
qu'une métho<strong>de</strong> :<br />
« Toute métho<strong>de</strong> est bonne, pourvu qu'on'en<br />
ait une. » E. COTTET.<br />
LA RÉFORME DE L'ORTHOGRAPHE<br />
Un arrêté <strong>de</strong> tolérance.<br />
L'orthographe nouvelle [<strong>de</strong>mandions-nous]<br />
(Voir n' 39; sera-t-elle obligatoire ou facultative?<br />
L'obligation est le système aujourd'hui en<br />
vigueur. Elle n'a rien <strong>de</strong> répréhensible en soi;<br />
elle est même une nécessité, quand elle s'applique<br />
à <strong>de</strong>s vérités certaines. Quand une<br />
règle, en quelque ordre d'idées ou <strong>de</strong> faits que<br />
ce soit, est fondée, légitime, conforme au bon<br />
sens ou aux lois <strong>de</strong> la science, et peut, être<br />
comprise <strong>de</strong> tout le mon<strong>de</strong>, il n'y a rien<br />
d'abusif à en exiger l'application, à la rendre<br />
obligatoire. On ne violente pas la liberté d'un<br />
enfant quand on lui enseigne que <strong>de</strong>ux et<br />
<strong>de</strong>ux font quatre, et qu'on le force à se conformer<br />
à cette règle : on fait une chose raisonnable<br />
et nécessaire. Il en est <strong>de</strong> même<br />
quand on exige qu'il écrive papa avec <strong>de</strong>ux a :<br />
permettre <strong>de</strong> l'écrire autrement serait une<br />
méconnaissance du sens commun. Là où l'orthographe<br />
est rationnelle, il est juste qu'elle<br />
soit obligatoire.<br />
Si donc les nouvelles règles sont en accord<br />
avec la logique, avec le bon sens, avec la<br />
science, quel abus y aurait-il à en imposer<br />
l'application, à exiger, par exemple, l'emploi<br />
uniforme <strong>de</strong> s comme marque du pluriel ? Aucun,<br />
assurément; du moins en principe. S'il<br />
n'entre pas cependant, nous le savons, dans<br />
la pensée du ministre d'étendre dès maintenant<br />
à ces règles la loi <strong>de</strong> l'obligation, c'est<br />
qu'elle rencontre <strong>de</strong>ux obstacles, <strong>de</strong> nature<br />
différente : le danger qu'il y aurait à. vouloir<br />
transformer tout d'un coup, sans transition,<br />
une habitu<strong>de</strong> déjà séculaire, et la nécessité <strong>de</strong><br />
ménager <strong>de</strong> légitimes intérêts.<br />
Le public d'aujourd'hui a appris une orthographe,<br />
pleine, il est vrai, <strong>de</strong> caprices et <strong>de</strong><br />
contradictions ; mais cette orthographe, laborieusement,<br />
trop laborieusement acquise, il la<br />
pratique couramment, automatiquement : il<br />
écrit sans effort, comme sans réflexion (sauf<br />
les défaillances <strong>de</strong> la mémoire), courtisane<br />
avec une seule n et paysanne avec <strong>de</strong>ux, différentiel<br />
avec un c et essentiel avec un t.<br />
Cette pratique, si absur<strong>de</strong> qu'elle soit, lui est<br />
<strong>de</strong>venue familière. Même la génération qui<br />
peuple aujourd'hui les écoles a déjà été formée<br />
à cette discipline. Prétendre modifier instantanément<br />
un usage ainsi universellement<br />
adopté, ce serait d'une part provoquer dans le<br />
public, qui tient à ses habitu<strong>de</strong>s, et qui ne<br />
peut être gagné à la réforme que par la persuasion,<br />
un mouvement instinctif <strong>de</strong> révolte,<br />
une résistance fatale ; ce serait, d'autre part,<br />
jeter le trouble dans les jeunes esprits- peu<br />
aptes à comprendre que la vérité puisse tout<br />
à coup <strong>de</strong>venir le mensonge.<br />
La réforme ne saurait être imposée qu'aux<br />
écoliers <strong>de</strong> <strong>de</strong>main.<br />
D'un autre côté, qui ne voit que l'application<br />
d'une réforme rendue immédiatement<br />
obligatoire entraînerait pour l'industrie <strong>de</strong>s<br />
conséquences désastreuses? Frapper <strong>de</strong> caducité,<br />
mettre hors d'usage, du jour au len<strong>de</strong>main,<br />
tous les ouvrages répandus dans le<br />
commerce, ne serait-ce pas léser les éditeurs<br />
dans leurs intérêts, en acculer plus d'un à la<br />
ruine ?<br />
Que la réforme, donc, exige <strong>de</strong>s tempéraments,<br />
nul ne saurait le contester.<br />
a?<br />
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