De la représentation et de l'usage de la musique - Association des ...

PALABRES
CULTURE & ARTS
30 - I. Okpewho, Op. Cit.
31 - L. Kesteloot, A.
Hampâté Bâ, Kaïdara, Paris,
Julliard, 1969.
32 - D.T. NIiane, Soundiata
ou l’épopée mandingue, Paris,
Présence africaine, 1960.
33 - C. LAYE, Op. Cit.
34 - I. Okpewho, Op. Cit.
35 - Ibid.
pas suffisante et induisait de fréquentes
scories dans les analyses
ainsi effectuées. De plus il s’agissait
d’analyses sociologiques ou anthropologiques
et l’intérêt qu’elles
suscitaient n’était pas proprement
littéraire.
Au début de la période des
Indépendances, dès la fin des années
50, on assiste à une prise de
conscience de la part des intellectuels
africains qui décident de se
prendre en main et de tenter la
conservation de leur patrimoine
culturel eux-mêmes ; tout d’abord
en le redéfinissant et en transposant
les récits oraux à l’écrit. Leur
avantage sur les chercheurs occidentaux
est indéniable : non seulement
les récits et épopées traditionnellement
narrés sont le fruit
de leur culture mais de plus ils
maîtrisent la langue dans laquelle
ils sont racontés. Les lettrés africains
s’y attèlent sans négliger cependant
le savoir inculqué par
l’Occident. Ils allient à la connaissance
de leur culture orale la méthode
de l’analyse littéraire qui
leur permet d’obtenir des résultats
d’autant plus perspicaces. Ce qui
est un atout considérable.
Parmi ces nombreuses entreprises,
celles qui nous intéressent relèvent
de la traduction, de la transcription
de ces contes ou récits, et
sont des œuvres littéraires à part entière
car, comme le dit Okpewho,
elle[s] révèl[ent] la structure imaginative
des traditions 30 . De nombreux
auteurs francophones ont
tâché de transposer ces récits ancestraux,
pour les plus connus,
nous avons : Amadou Hampâté
Bâ, grand défenseur de la tradition
orale, et Liliane Kesteloot qui ont
entrepris la traduction d’un chant
initiatique peul, dans Kaïdara 31 ou
encore D. T Niane, dans
Soundiata ou l’épopée mandingue 32
et C. Laye, dans Le maître de la
parole 33 . Mais le défaut de ces
contes est d’être décontextualisés.
Les auteurs ne prenant pas en
considération le contexte de récitation
et ses nombreuses composantes,
la transposition est imparfaite.
Okpewho insiste sur le caractère
fondamental de ce qu’il appelle
les facteurs contextuels 34 de la tradition
orale dont la musique est
l’un des principaux, et prétend
qu’ils peuvent devenir des auxiliaires
paratextuels [qui] permettent
au texte [oral] de s’accomplir, de
transmettre pleinement son message. 35
La mission du transpositeur est
donc de parvenir par le biais de
l’écriture à recréer cet univers, à
mettre en scène ce contexte de récitation
de la façon la plus vraisemblable
et fidèle qu’il soit.
Comment ne pas penser à
Amos Tutuola, auteur nigérian
(de langue anglaise) qui parvint
par le biais de stratagèmes subtils
58 L’Arbre à Palabres N° 18 Janvier 2006