Made in Bern F

INTERVIEW
Made in Berne:
les produits
iconiques
RAGUSA Toujours la même
recette depuis 1942! Le produit
le plus fameux de l’entreprise
familiale Camille Bloch SA
est fabriqué à Courtelary,
dans le Jura bernois.
TOBLERONE Qui ne le connaît
pas? Son nom se compose
du patronyme Tobler et du mot
italien torrone signifiant nougat.
Quant à sa forme, non, elle
n’a rien à voir avec le Cervin.
Theodor Tobler, son créateur,
s’est inspiré d’une pyramide
montrée par des danseuses
de revue à Paris... Aujourd’hui,
Toblerone appartient au géant
américain Mondelēz
International.
OVOMALTINE
Cette boisson
fortifiante,
Albert Wander
l’a inventée en
1904 pour lutter
contre la
malnutrition.
La poudre à
diluer dans le lait contient en
effet non seulement du malt
mais encore des vitamines et
de nombreux sels minéraux.
KAMBLY ou la réussite d’une
recette de grand-mère. Oscar R.
Kambly s’est inspiré, en 1906,
des biscuits de sa grand-mère
pour créer son Bretzeli. Puis, à
Trubschachen dans l’Emmental,
il a fondé sa marque, en 1910.
Vous êtes l’un des rois du chocolat suisse.
En mangez-vous beaucoup?
Je ne me représente pas comme un roi du chocolat,
car c’est un produit très démocratique:
chacun peut trouver celui qui lui plaît. Pour
ma part, je mange plus ou moins un Ragusa de
50 g par jour, ce qui me place un peu au-dessus
de la moyenne.
Votre grand-père, Camille Bloch, a fondé
l’entreprise familiale en 1926. Il a reconverti
une ancienne usine de papier de Courtelary
pour la production. Pourquoi avoir choisi
le Jura bernois?
Au départ, mon grand-père était un petit producteur
qui fabriquait son chocolat en différents
lieux de la ville de Berne. Quand il a voulu
agrandir son entreprise,
il s’est mis en quête d’un site
pas cher et disponible rapidement.
Un politicien lui a
parlé de l’usine à papier de
Courtelary et il a été aussitôt
convaincu par le potentiel des
locaux. Mais il en a d’abord
discuté avec le maire, car, pour
lui, c’était important d’être accepté
par la communauté.
Et comment a-t-il été reçu?
A bras ouverts, même s’il s’est
contenté d’y installer son entreprise,
sans y vivre. Il préférait
habiter à Berne et se
faisait conduire tous les jours
à la fabrique.
La société Camille Bloch
est restée fidèle à ce site.
Qu’a-t- il de si particulier?
L’endroit est bien desservi,
nous avons de la place et le
paysage est incroyable. Mais
sa plus grande force, ce sont
les gens. Beaucoup parlent
plusieurs langues, ce qui est
un atout pour une entreprise
active au niveau national
et international. Surtout, ils
sont d’une grande loyauté.
S’il n’est pas toujours facile de
convaincre les gens de venir
ici, une fois engagé, le personnel
n’a plus envie de partir.
Et vous, qu’appréciez-vous
dans le canton de Berne?
Sa diversité! On trouve tout, ici: des villes,
de la campagnes, une nature époustouflante.
Et s’il est vrai que la lenteur légendaire des Bernois
est parfois agaçante, j’apprécie que les gens
y soient moins stressés qu’ailleurs.
Outre Camille Bloch, Berne compte beaucoup
de marques de renommée mondiale:
Toblerone, Ovomaltine, Emmentaler, Swatch
ou USM. Ce n’est sans doute pas un hasard.
Les traditions jouent un rôle important à Berne,
du coup, la région est un terrain propice
aux marques de tradition. En même temps,
l’esprit d’ouverture qui caractérise le canton
IN A NUTSHELL
Bernese products
conquer the world
It has been produced for
over 800 years and surely
is the most famous
product from the Canton of
Bern – the Emmental
cheese. Although this hard
cheese is now being
produced globally, the real
Emmental is only available
in 132 controlled dairies of
the region. Worldwide
sales and recognition are
typical of another Bernese
product: the Swatch. The
inexpensive but highquality
watch was invented
in Biel in 1983. Other
Bernese products are the
chocolate bar Ragusa, the
legendary Toblerone with
its triangular shape, the
breakfast beverage
Ovomaltine, and the
furniture line USM Haller.
laisse la voie libre aux esprits créatifs. On trouve
beaucoup d’exemples dans la littérature
ou la culture, comme Friedrich Dürrenmatt.
Vous avez succédé à votre père en 1997.
Quelles valeurs avez-vous développées?
La marque, les produits, les gens, la culture,
tout cela me correspondait. Mais je me suis
rendu compte à quel point mon père imposait
le respect, ce qui peut être un frein pour l’innovation.
Pour moi, il était important que le personnel
puisse s’impliquer davantage.
Vous écoulez les trois quarts de votre
production en Suisse. Comment voyez-vous
le développement du marché?
La «part par tête» demeure élevée, même s’il y
a de plus en plus d’importations, ce qui réduit
la taille du marché pour les
producteurs suisses. Dans
ce contexte, notre stratégie est
de nous concentrer sur nos
points forts, nos trois grandes
gammes, Ragusa, Torino et
les chocolats à la liqueur. Ainsi,
durant ces dix dernières
années, nous avons doublé
les ventes de Ragusa.
Votre succès dépend de
peu de produits différents.
Etes-vous à la merci
de Ragusa?
C’est certain: le plus grand
atout est aussi le plus gros
risque. Mais proposer une
marque faible n’est pas une
option.
Ne craignez-vous pas que
Ragusa soit copié?
Beaucoup ont essayé de mettre
sur le marché un produit
comparable, mais il est difficile
de copier Ragusa, car son
secret réside dans les détails.
Et puis le rayonnement d’un
produit compte beaucoup
pour le consommateur. Sur
ce point, nous faisons totalement
confiance à nos
marques. Elles sont indépendantes
et authentiques: pour
beaucoup, c’est un peu le goût
de chez nous.
Vous avez prévu d’investir
35 millions de francs ces prochaines années
pour doubler vos capacités de production,
avec un objectif de 8000 tonnes par an.
N’est-ce pas un peu optimiste?
On dit que du courage à la bêtise, il n’y a qu’un
pas. En l’occurrence, je ne crois pas que nous
soyons très téméraires. Nous agissons aussi
pour consolider notre position à l’étranger.
Avec un chiffre d’affaires annuel de près
de 60 millions de francs, avez-vous vraiment
une chance de percer sur les nouveaux
marchés étrangers?
Nous n’allons pas partir immédiatement à
l’assaut de la Chine, des Etats-Unis, du «Dark
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MADE IN BERN 1/2016