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Désolé j'ai ciné #8

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(surtout connu pour l’animé « Ghost in the<br />

Shell »), avait réalisé deux films en prise de<br />

vue réelle, « The Red Spectacles » (1987)<br />

et « Stray dog : Kerberos Panzer Cops »<br />

se situant dans le même univers que « La<br />

brigade des loups ». Pour le troisième volet,<br />

Oshii ne signera que le scénario et c’est<br />

Hiroyuki Okiura qui passera à la réalisation.<br />

L’homme aux commandes de ce remake<br />

n’est pas n’importe qui. Kim Jee-Woon fait<br />

partie de la vague de réalisateurs coréens<br />

s’étant démarqué dans le début des années<br />

2000. C’est une figure emblématique du<br />

<strong>ciné</strong>ma mondial qui a signé des films aussi<br />

poétique (« 2 soeurs ») que radicalement<br />

violent (« J’ai rencontré le diable »). Au vu de<br />

sa filmographie, c’était le réalisateur parfait<br />

pour raconter cette histoire d’espionnage<br />

au milieu d’un pays en proie aux flammes.<br />

Dans « Illang », Jee-Woon déplace le récit<br />

se déroulant initialement au Japon pour le<br />

placer en Corée dans un futur pas si lointain.<br />

Depuis 1953 et l’armistice du conflit, les<br />

deux Corées n’ont jamais abouti à un traité<br />

de paix et sont juridiquement toujours en<br />

guerre. Infiniment touché dans leur chair par<br />

la séparation entre les deux états, il est rare<br />

de voir un film sud-coréen ne pas évoquer<br />

de près ou de loin cet aspect de la situation<br />

politique du pays. Le long métrage n’y va<br />

pas par quatre chemins et opte pour une<br />

anticipation qui parle clairement des peurs<br />

des sud coréens. Le script du film original<br />

montrait des personnages broyés par les<br />

institutions, où les initiatives individuelles<br />

étaient rendues quasi impossibles par les<br />

appareils d’état. Il planait sur le long métrage<br />

une aura de fatalisme funèbre. « Illang »<br />

prend à contre pied cet aspect si particulier<br />

de « Jin-Roh » pour en faire un film d’action<br />

où le fatalisme est remplacé par une volonté<br />

désespérée de liberté. Les héros vont se<br />

débattre continuellement pour tenter de<br />

s’extraire d’un système qui les utilise comme<br />

des pions. Thématiquement, le film est assez<br />

proche de son film précédent « The Age of<br />

Shadows » qui parlait de résistants sudcoréens<br />

pendant l’occupation japonaise.<br />

Le récit de « Illang » est bardé de violence,<br />

montre un pays en fin de règne, replié sur<br />

lui même. Ce changement de point de vue<br />

par rapport à l’oeuvre originale est louable<br />

mais l’exécution n’est pas sans défaut. Dans<br />

les séquences d’action dans la tour ou sur le<br />

parking, on a du mal à retrouver la maestria<br />

de la scène d’évasion de « A Bittersweet Life<br />

» réalisé par Kim Jee-Woon en 2005 et la<br />

patte si singulière du réalisateur. Le scénario<br />

de « Illang » ajoute des sous intrigues<br />

intéressantes mais qui se perdent dans le flot<br />

d’informations qu’on nous envoie pendant<br />

ces 2h30. Ainsi, le financement occulte de<br />

La Secte par une faction de la police fait<br />

écho aux scandales de corruptions qui a<br />

valu à l’ex-présidente sud-coréenne d’être<br />

condamnée à 25 ans de prison.<br />

Si le film original avait su marquer les<br />

esprits par son côté intemporel et sa poésie<br />

existentialiste, Kim Jee-Woon décide<br />

d’ancrer son remake dans un univers plus<br />

marqué, au contexte politique qui fait écho<br />

aux événements qui bousculent la Corée<br />

d’aujourd’hui. Mais dans cette volonté, il<br />

perd un peu la viscéralité qui faisait son<br />

<strong>ciné</strong>ma. En reste une œuvre intéressante,<br />

engagée et résolument moderne.<br />

Mehdi Tessier

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