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LES CEUX DE - Archives et musée de la littérature

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Le futur critique, adolescent, couvait d'un amour maternel un<br />

trombone dont il barytonnait en chambre, aux fenêtres, sur les<br />

toits, sous <strong>de</strong>s accoutrements comiques <strong>et</strong> clownesques !<br />

Fantasque, lunatique, il fut toute sa vie un étrange sire. Avant<br />

qu'un fol désir <strong>de</strong> conquête <strong>et</strong> d'aventure l'emportât du pays, il<br />

avait fondé dans sa ville, <strong>de</strong>s orchestres funambulesques qui<br />

firent, vers 1883, <strong>la</strong> joie d'une ban<strong>de</strong> <strong>de</strong> lurons. L'un <strong>de</strong> ces clubs<br />

est resté fameux. Il tenait ses assises rue Saint-Jean, dans un<br />

grenier servant d'atelier <strong>de</strong> peintre au poète wallon Henri Simon.<br />

L'espèce <strong>de</strong> trappe qui donnait l'accès du céleste local valut au<br />

cercle sa p<strong>la</strong>isante enseigne : « Le Tap'cou Club ».<br />

Ils étaient une dizaine, <strong>de</strong>s amateurs pour <strong>la</strong> plupart, à suivre<br />

les séances qu'abritaient ces combles. Chaque samedi, on grimpait<br />

marche à marche vers c<strong>et</strong>te salle à lucarnes, porteur <strong>de</strong> son faux<br />

Amati ou <strong>de</strong> sa c<strong>la</strong>rin<strong>et</strong>te <strong>de</strong> rencontre.<br />

Il y avait là, voisinant au pupitre <strong>de</strong>s premiers violons, un<br />

certain Nicol<strong>et</strong> du Conservatoire, perdu <strong>de</strong> vue, <strong>et</strong> un étudiant en<br />

philosophie, H. Schoofs, aujourd'hui professeur <strong>de</strong> rhétorique<br />

à l'Athénée <strong>de</strong> Tongres ; Théo Strivay, un peintre doublé d'un<br />

baryton, y jouait <strong>de</strong> <strong>la</strong> c<strong>la</strong>rin<strong>et</strong>te ; Devosse, un autre bohème, tenait<br />

<strong>la</strong> partie <strong>de</strong> hautbois; Simon <strong>et</strong> Henri Clochereux avaient les<br />

rôles <strong>de</strong> seconds violons ; un grand diable <strong>de</strong> F<strong>la</strong>mand y rac<strong>la</strong>it<br />

du violoncelle, <strong>et</strong> d'autres Liégeois, dont Hubert Goossens, étaient<br />

préposés aux batteries: bref, pha<strong>la</strong>nge unique que celle-là où<br />

peintres tromp<strong>et</strong>taient, étudiants violonnaient, où tout le mon<strong>de</strong><br />

musiquait.<br />

Remy en était le maestro, <strong>et</strong> quel maestro ! Juché sur un vieil<br />

escabeau, suivant ses feuilles pêle-mêle sur un porte-musique, le<br />

bâton à <strong>la</strong> main, il gesticxdait <strong>de</strong>vant <strong>la</strong> troupe d'histrions qui<br />

tonitruaient vers le ciel « Typhus-polka » ou quelque « Cochonnerie<br />

pour c<strong>la</strong>rin<strong>et</strong>te » <strong>de</strong> son cru. Ce boute-en-train n'avait pas son<br />

pareil. Mime, imitateur, jongleur plein d'esprit, improvisateur<br />

<strong>de</strong> talent, il accouchait d'hi<strong>la</strong>rantes fantaisies où il présentait<br />

Mireille à <strong>la</strong> façon <strong>de</strong> Berlioz <strong>et</strong> Guil<strong>la</strong>ume Tell réorchestré par<br />

Wagner ! Parfois, s'attachant violon, c<strong>la</strong>rin<strong>et</strong>te, flûte <strong>et</strong> trombone<br />

autour du cou' comme un oiseleur son collier d'appeaux, c<strong>et</strong><br />

original commençait sur un instrument tel air qu'il achevait sur

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