LES CEUX DE - Archives et musée de la littérature
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Vive <strong>la</strong> fête. 183<br />
— Pinsîve qui c'estent on hoqu<strong>et</strong> d'hacong ! Po z'aller avou<br />
l'hachisse di torate!<br />
— Qwand c'est qu'vo leyîz on p'tit hoqu<strong>et</strong> è voss boque, dit<br />
tout d'un coup parrain, <strong>et</strong> qu'vos rattin<strong>de</strong>z qu'il seuye fondou,<br />
adon -c'est crâs, vos dirîz <strong>de</strong> sayin.<br />
— C'est crâs, c'est bong, que nous répétons tous ensemble<br />
en riant. Il ne rie pas, lui.<br />
— Et po fini, dit ma tante, vochal on banstai di nos pu<br />
bais crottés reng<strong>la</strong>u<strong>de</strong>s. C'est po d'crâhi noss boque.<br />
— C'est portant ine saqw<strong>et</strong> d'bong, ine bonne crasse boque,<br />
dit parrain sérieusement <strong>et</strong> un peu fâché.<br />
Moi j'ai assez, <strong>et</strong> je voudrais aller à <strong>la</strong> fête. Alors, pendant<br />
que tante est allée à <strong>la</strong> cuisine, je viens <strong>la</strong> trouver <strong>et</strong> je dis :<br />
— Tante, donnez-moi un peu <strong>de</strong>s cennes hors <strong>de</strong> mes pièces<br />
que j'ai eues à mes Pâques <strong>et</strong> qui sont dans votre tiroir pour<br />
me les gar<strong>de</strong>r.<br />
— Aw<strong>et</strong>, po z'aller les k'taper amon les djoweus d'tours,<br />
èdon. Allez ennocint, war<strong>de</strong>z vos aidants po qwand vos serez<br />
pu grand, ils v vinront bin à pon.<br />
— Mais tante, il me faut bien m'amuser un peu : c'est <strong>la</strong><br />
fête, tout le mon<strong>de</strong> y va.<br />
— Allez, vârin, vos n'songîz qu'à <strong>de</strong>s biestreyes. Tinez, vo<strong>la</strong><br />
tôt plein <strong>de</strong>s censes ; mins riallouwez nin tôt, savez, ou bin<br />
gare à voss sogne. Et riv'nez à timps po heure li café avou<br />
les doreyes.<br />
— Oui, tante, merci.<br />
Et en partant je compte <strong>la</strong> p<strong>et</strong>ite poignée <strong>de</strong> cennes. Il y a<br />
<strong>de</strong>s cennes, <strong>de</strong>s <strong>de</strong>mis, <strong>de</strong>s cinq centimes, <strong>et</strong> <strong>de</strong>ux à dix ; ça<br />
fait quarante sept centimes, presque un <strong>de</strong>mi-franc.<br />
Je vais vite sur <strong>la</strong> fête en tenant dans ma poche mon argent<br />
bien serré, pour les voleurs. La rue est toute pleine <strong>de</strong> gens<br />
qui vont lentement en par<strong>la</strong>nt haut. Des filles qui se tiennent<br />
par le bras, cinq ou six ensemble, <strong>et</strong> rient tout c<strong>la</strong>ir en écoutant<br />
<strong>de</strong>s hommes qui marchent <strong>de</strong>rrière elles en se tenant par<br />
le bras aussi, pour pouvoir faire le hardi avec les filles. Et ça<br />
sent si bon dans l'air parce que tout le mon<strong>de</strong> écrase les herbes<br />
•<strong>et</strong> les fleurs qu'on avait j<strong>et</strong>ées pour <strong>la</strong> procession. Ça fait une