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LES CEUX DE - Archives et musée de la littérature

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Pour les voleurs. 61<br />

J'ai peur. Ma tante monte lentement l'escalier, <strong>et</strong> j'entends<br />

d'ici que chaque gré crie autrement. C'est <strong>de</strong>s vieilles p<strong>la</strong>nches,<br />

mais, du jour, je crois qu'on n'entend rien. Alors, <strong>la</strong> nuit, les<br />

grés crient comme s'ils avaient mal. Qu'il est long, l'escalier ;<br />

je ne sais plus si ma tante monte ou <strong>de</strong>scend parce que les<br />

grés, il me semble, wignent toujours plus fort. J'ai si peur !<br />

Mon oncle ferme les vol<strong>et</strong>s <strong>et</strong> il m<strong>et</strong> <strong>la</strong> barre en travers.<br />

Puis nous allons à toutes les portes <strong>et</strong> il pousse les verrous en<br />

m<strong>et</strong>tant <strong>la</strong> <strong>la</strong>nterne tout près pour voir. Avec leurs verrous<br />

poussés dans le mur, les portes ont l'air soli<strong>de</strong> <strong>et</strong> méchant,<br />

<strong>et</strong> je ne les reconnais presque plus parce qu'elles me semblent<br />

autrement que du jour. Par en <strong>de</strong>ssous il vient du vent ; ça<br />

houle si fort, comme une bête qui souffle avec sa gueule en<br />

poussant, pour entrer.<br />

Et les p<strong>et</strong>its barreaux font <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>s ombres partout, à<br />

terre <strong>et</strong> sur les murs, <strong>et</strong> elles vont si vite, comme si quelqu'un<br />

était caché <strong>et</strong> faisait <strong>de</strong>s signes avec <strong>de</strong>s longs bois noirs.<br />

J'ai peur.<br />

Dans l'écuiie <strong>de</strong>s vaches, il y en a une qu'on appelle Braibant<br />

qui n'est pas couchée, mais les autres c'est comme <strong>de</strong>s<br />

gros paqu<strong>et</strong>s qu'on dirait qu'elles ne pourront jamais se<br />

relever.<br />

Braibant, elle, se r<strong>et</strong>ourne lentement pour voir ce qu'on<br />

veut avec <strong>la</strong> <strong>la</strong>nterne. Elle mangeait justement, <strong>et</strong> elle continue<br />

à faire tout doucement niam, niam, comme pour compter<br />

ses bouchées. Avec son ventre qui barloque entre ses quatre<br />

maigres pattes, c'est comme <strong>de</strong>ux hommes qui portent une<br />

barre sul- leurs épaules avec un lustre qui pend enveloppé<br />

dans une toile.<br />

Près <strong>de</strong>s ch'vaux, maintenant. On arrange un peu leur<br />

paille <strong>et</strong> on rem<strong>et</strong> du foin dans leur russli pour qu'ils mangent<br />

quand ils ne savent pas quoi faire.<br />

Mon oncle a mis <strong>la</strong> <strong>la</strong>nterne sur <strong>la</strong> huche à l'avoine pour<br />

faire ça. Et pendant ce temps-là il y a Bayard, le grand cheval<br />

moray, qui a mis sa tête sur le dos <strong>de</strong> B<strong>la</strong>nc-pîd pour me<br />

regar<strong>de</strong>r avec <strong>de</strong>s grands yeux tout tristes. Il a <strong>de</strong>s si beaux<br />

yeux, tout luisants, avec <strong>de</strong>s grands cils autour comme <strong>de</strong>s

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