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LES CEUX DE - Archives et musée de la littérature

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Pailter. 151<br />

dans l'armoire où il sent si drolle, le beurre salé, <strong>la</strong> sékoreye,<br />

<strong>la</strong> vieille makaye toute sure, le pain noir, <strong>la</strong> némosca<strong>de</strong>, <strong>la</strong><br />

cannelle, les clous d'c<strong>la</strong>wson <strong>et</strong> <strong>la</strong> sari<strong>et</strong>te, tout ça mêlé. Quand<br />

elle a fini, je vois qu'elle va, sans faire semb<strong>la</strong>nt <strong>de</strong> rien, par<br />

<strong>la</strong> p<strong>et</strong>ite porte du fournil, où on fait <strong>la</strong> bouweye <strong>et</strong> où il y a le<br />

four <strong>et</strong> une gran<strong>de</strong> marmite sur <strong>de</strong>s murs <strong>de</strong> briques pour cuire<br />

les pétrates <strong>et</strong> le <strong>la</strong>ton pour <strong>la</strong> payeie <strong>de</strong>s vaches <strong>et</strong> <strong>de</strong>s cochons.<br />

Et dans <strong>la</strong> porte, elle me fait signe <strong>de</strong> venir avec, sans<br />

rien dire ; j'y vais en faisant le tour <strong>de</strong> <strong>la</strong> p<strong>la</strong>ce, tout doucement,<br />

pendant que ma tante lit fort haut :<br />

« Par <strong>la</strong> foi du Saint-Sépulchre, s'écria le vicomte en portugais<br />

<strong>et</strong> en portant vivement <strong>la</strong> main à <strong>la</strong> gar<strong>de</strong> <strong>de</strong> son épée,<br />

je saurai venger ce nouvel outrage ! »<br />

— Oho ! dit mon oncle.<br />

Dans le fournil, après qu'elle a refermé <strong>la</strong> porte sans <strong>la</strong><br />

-c<strong>la</strong>per, comme elle fait toujours, Trîn<strong>et</strong>te dit :<br />

— Li vicôte è V vîle sèchedame pol<strong>et</strong> bin s' kihagni V narenne,<br />

nos n'avans d'keure, nos al<strong>la</strong>ns aller pailter.<br />

— Ah ! oui. Comme j'ai bon !<br />

Et elle prend <strong>de</strong>ux grands couvercles <strong>de</strong> marmite bien<br />

pareils, elle les enfonce à moitié dans le cordon <strong>de</strong> son tabilier<br />

sur son ventre. Elle m<strong>et</strong> un grand vieux châle sur sa tête <strong>et</strong><br />

qui cache tout en pendant jusqu'à terre. Et à moi elle fait<br />

m<strong>et</strong>tre une vieille gran<strong>de</strong> camisole toute poyowe que le Vieux-<br />

Jean m<strong>et</strong> pour charrier aux cendrisses quand il pleut.<br />

— Po nin esse riknohou, si les gendâres abrokiz, dit-elle ;<br />

puis elle prend notre grand arrosoir qu'elle ôte le tûturon à<br />

p<strong>et</strong>its trous.<br />

—- Prin<strong>de</strong>z çou<strong>la</strong> ; vos tutelrez d'vins qwand je Vkimandr<strong>et</strong>.<br />

Nous allons en rasant les haies ; l'arrosoir, qui est haut pour<br />

mon p<strong>et</strong>it bras, roubineye quelquefois comme un tambour<br />

en touchant terre.<br />

Il fait si noir qu'on ne peut rien voir, excepté quand on<br />

regar<strong>de</strong> les affaires vers le haut, parce que le ciel est seulement<br />

gris avec quelques étoiles. Je vois <strong>la</strong> tête <strong>de</strong>s arbres, <strong>et</strong> le<br />

bord <strong>de</strong>s haies <strong>et</strong> Trîn<strong>et</strong>te comme un fantôme, près <strong>de</strong> moi.

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