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Nicolas Crespel<br />
Minorités religieuses invisib<strong>le</strong>s<br />
éga<strong>le</strong>ment l’ire du gouvernement pakistanais, et l’accusation de blasphème<br />
est là encore utilisée de manière massive. Riaz Ahmed Gohar<br />
Shahi, <strong>le</strong> chef d’une secte soufie, a été condamné par contumace à un<br />
total de 59 ans de prison en vertu de ces lois. Abdul Hasnain Muhammad<br />
Yusuf Ali, condamné à mort en 1999, est un autre exemp<strong>le</strong> de ce<br />
type de condamnation.<br />
Mais qu’on se rassure : <strong>le</strong> Pakistan protège tel<strong>le</strong>ment bien contre <strong>le</strong><br />
blasphème qu’il n’oublie personne. Le docteur (mais surtout humaniste)<br />
Younus Shaikh 1 a ainsi été condamné pour propos blasphématoire<br />
en 2000 pour avoir dit, notamment, que <strong>le</strong>s parents du prophète ne<br />
pouvait être musulmans puisqu’ils étaient morts avant la naissance de<br />
l’islam. Maintenu en iso<strong>le</strong>ment, il a fallu 3 ans pour qu’une cour finisse<br />
par l’acquitter, après une campagne internationa<strong>le</strong> intense organisée<br />
notamment par Amnesty International. Rebelote en 2005 après la parution<br />
d’un livre. Même <strong>le</strong>s chiites (15% de la population environ) ne<br />
sont pas à l’abri du blasphème : Ghulam Akbar a été condamné à mort<br />
en 1998 pour blasphème.<br />
Même sans condamnation, ceux qui sont accusés dans ces véritab<strong>le</strong>s<br />
procès en sorcel<strong>le</strong>rie sont toujours en danger : en juil<strong>le</strong>t 2002, Mohamed<br />
Yousaf s’est fait tuer dans la prison centra<strong>le</strong> de Lahore avant son<br />
procès en appel. Le 7 février 2003, Mushtaq Zafar a été descendu dans<br />
la rue à son retour du tribunal. En juin 2003, Naseem Bibi, accusée de<br />
blasphème, violée en réunion par la police, a trouvé la mort dans sa<br />
cellu<strong>le</strong> avant même que son procès puisse commencer 2 .<br />
Bien sûr, ces condamnations, ces vio<strong>le</strong>nces, ne sont que la traduction<br />
des tensions et lynchages qui émail<strong>le</strong>nt la société pakistanaise : mais<br />
en reconnaissant au plus haut niveau de la loi un caractère de justice à<br />
ces règ<strong>le</strong>ments de comptes, l’Etat pakistanais encourage la persécution<br />
à tous <strong>le</strong>s niveaux contre toutes <strong>le</strong>s minorités religieuses en son sein,<br />
au nom du refus du blasphème. Un bel exemp<strong>le</strong> de l’efficacité et de la<br />
nature intrinsèquement antiraciste de ce genre de lois.<br />
De l’autre coté de la partition du Raj, pour être comp<strong>le</strong>t, l’Inde n’est<br />
pas exempte de mauvais traitements envers <strong>le</strong>s musulmans ou ce qui<br />
pour certains attaque l’hindouisme. L’Etat de l’Andra Pradesh a ainsi<br />
été condamné pour la torture de 21 musulmans accusés à tort pour <strong>le</strong>s<br />
1« Pakistani sentenced to death for blasphemy », New York Times, 20 août 2001<br />
(http://query.nytimes.com/gst/fullpage.html?res=9506E2DA1E3EF933A1575BC0A96<br />
79C8B63)<br />
2 http://www.iheu.org/node/271<br />
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