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Guy Nagel<br />
Se surveil<strong>le</strong>r ou punir<br />
100 % sur la personne vivant avec <strong>le</strong> VIH <strong>le</strong> soin d’imposer une relation<br />
sexuel<strong>le</strong> protégée est pernicieuse : de part son statut de protection<br />
imaginaire, de part la négation de la difficulté qu’il peut y avoir à révé<strong>le</strong>r<br />
une sérologie positive, de part son effet délétère sur toute politique<br />
de prévention efficace…<br />
Prévenir ou punir, la société doit choisir<br />
A partir du moment où il est nécessaire d’instaurer une limite au-delà<br />
de laquel<strong>le</strong> la responsabilité péna<strong>le</strong> de la personne vivant avec <strong>le</strong> VIH<br />
est engagée dans <strong>le</strong> cadre d’un rapport sexuel non protégé, la prévention<br />
ne peut plus fonctionner p<strong>le</strong>inement. En effet, nous l’avons vu, une<br />
infraction péna<strong>le</strong> suppose <strong>le</strong> plus souvent l’existence d’un dol, d’une<br />
intention ou d’une conscience infractionnel<strong>le</strong>. Or, cette dernière suppose<br />
que la personne se sache séropositive au VIH : nous voyons donc<br />
<strong>le</strong> problème lié au dépistage. S’agissant d’un délit (voir d’un crime<br />
en cas de circonstance aggravante tel<strong>le</strong> la relation conjuga<strong>le</strong> liant la<br />
victime à l’accusé), <strong>le</strong> secret médical pourra être éventuel<strong>le</strong>ment <strong>le</strong>vé :<br />
nous passons donc d’une logique de dépistage anonyme à cel<strong>le</strong> d’un<br />
dépistage pouvant éventuel<strong>le</strong>ment servir à abonder à charge dans un<br />
dossier d’instruction. Ce risque est d’autant plus fort que contrairement<br />
à d’autres infractions, « l’administration de substances nuisib<strong>le</strong>s ayant<br />
entraîné un infirmité permanente » peut concerner un grand nombre de<br />
personnes. Techniquement, toute personne vivant avec <strong>le</strong> VIH, n’ayant<br />
pu ni négocier <strong>le</strong> port d’un préservatif ni révé<strong>le</strong>r sa sérologie. Le médecin,<br />
tout comme l’avocat, pour obtenir la confiance nécessaire à l’accomplissement<br />
de sa mission ne doit jamais pouvoir se retrouver en<br />
position d‘auxiliaire de police. Par ail<strong>le</strong>urs, <strong>le</strong>s tests VIH n’ont pas été<br />
mis en place pour <strong>le</strong>s besoins des instructions péna<strong>le</strong>s mais bel et bien<br />
pour permettre aux hommes et aux femmes de prendre en main <strong>le</strong>ur<br />
santé et de protéger <strong>le</strong>s autres. Cette logique de répression est incompatib<strong>le</strong><br />
avec toute politique raisonnab<strong>le</strong> de prévention. Si <strong>le</strong>s condamnations<br />
se poursuivent ou si un texte nouveau est édicté, il est à prévoir<br />
un effet néfaste sur <strong>le</strong> nombre de dépistages en France, faisant perdre,<br />
par là même, à de nombreux malades toute possibilité de recourir à des<br />
traitements en temps uti<strong>le</strong>s… Il n’est pas exclu, à l’instar de certaines<br />
législations étrangères, que puissent être poursuivies tant <strong>le</strong>s personnes<br />
qui se savaient séropositives au VIH que cel<strong>le</strong>s qui, légitimement, pou-<br />
selon <strong>le</strong>quel si on pénalise une pratique, cel<strong>le</strong>-ci n’aura plus cours » (D. G<strong>le</strong>jser, Le<br />
Journal du SIDA, n°178, août 2007)<br />
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