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ProChoix<br />
n° 47 - mars 2009<br />
d’apostat et de comportement anti-musulman, et <strong>le</strong>s menaçant de représail<strong>le</strong>s<br />
– est tout autant invasif, et guère limité à un seul secteur de<br />
la société.<br />
La charia et la constitution nigériane<br />
La constitutionnalité des différentes lois coraniques est discutab<strong>le</strong>. Le<br />
Nigeria a toujours eu des lois « écrites », des coutumes et des lois coraniques<br />
–trois systèmes juridiques administrés sous <strong>le</strong> contrô<strong>le</strong> de l’Etat<br />
et appliqués par <strong>le</strong>s tribunaux et la police. Dès lors il est diffici<strong>le</strong> de<br />
prétendre que <strong>le</strong>s lois coraniques per se sont soudainement devenues<br />
inconstitutionnel<strong>le</strong>s.<br />
La droite islamiste indique que <strong>le</strong>s lois coraniques n’instituent pas une<br />
religion d’Etat (ce qui serait en contradiction avec la section 10 de la<br />
constitution) dans la mesure où <strong>le</strong>s non-musulmans peuvent se prévaloir<br />
du Droit écrit ou des coutumes, selon ce qu’ils choisissent. On notera<br />
toutefois qu’au sein de la droite islamiste, certaines factions ont déclaré<br />
qu’ils avaient l’intention de voir la charia s’appliquer à tous à l’intérieur<br />
des limites de <strong>le</strong>ur Etat, nonobstant l’appartenance religieuse.<br />
El<strong>le</strong> poursuit en argumentant que, puisque la constitution garantit <strong>le</strong><br />
droit de pratiquer une religion, el<strong>le</strong> autorise <strong>le</strong>s lois péna<strong>le</strong>s coraniques<br />
à s’appliquer dans <strong>le</strong>s affaires tant péna<strong>le</strong>s que de statut personnel. Les<br />
détracteurs répondent que <strong>le</strong>s lois coraniques sur <strong>le</strong> statut personnel<br />
sont suffisantes à garantir la pratique d’une religion sans qu’il y ait besoin<br />
d’en étendre son champ d’application aux matières péna<strong>le</strong>s ou aux<br />
affaires de statut personnel.<br />
La constitution admet l’existence de systèmes parallè<strong>le</strong>s de courts d’appel<br />
de droit écrit, de droit coutumier et de droit coranique (se terminant<br />
toutes par la cour suprême). Cependant la juridiction des tribunaux coraniques<br />
n’est compétente qu’en tant que juge du statut des personnes.<br />
On en a donc déduit que la constitution ne permettait pas à la charia au<br />
Nigeria d’inclure <strong>le</strong>s infractions.<br />
Néanmoins <strong>le</strong> droit pénal ne relève pas de la liste des matières à compétence<br />
fédéra<strong>le</strong> exclusive. En termes de partage de compétence entre<br />
l’Etat et la fédération, cela signifie que <strong>le</strong>s Etats conservent des pouvoirs<br />
résiduels pour légiférer sur <strong>le</strong>s infractions – et parmi eux celui d’inclure<br />
éventuel<strong>le</strong>ment des dispositions de droit pénal coranique. Il est clair<br />
toutefois que <strong>le</strong> droit de la preuve relève de la compétence exclusive<br />
de la fédération et que plusieurs des codes pénaux coraniques font référence<br />
à une obligation de preuve. Questionner la constitutionnalité<br />
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