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Guy Nagel<br />
Se surveil<strong>le</strong>r ou punir<br />
gement contestab<strong>le</strong>. En effet, la solution de bon sens adoptée pour la<br />
qualification d’empoisonnement par <strong>le</strong>s juridictions répressives pourrait<br />
être aisément transposée à ce délit. L’élément moral ne peut que<br />
faire défaut : la conscience du risque de contaminer son partenaire<br />
n’équivaut pas à la volonté de <strong>le</strong> faire effectivement. L’infraction ne<br />
peut se contenter d’un dol éventuel : il ne s’agit pas de sanctionner<br />
une prise de risque mais bel et bien un comportement intentionnel.<br />
Les juridictions ne devraient pouvoir se contenter de retenir que <strong>le</strong> rapport<br />
sexuel non protégé ayant été voulu (ou accepté) par <strong>le</strong> prévenu,<br />
celui-ci a souhaité l’administration de la substance nuisib<strong>le</strong>. D’ail<strong>le</strong>urs<br />
la conception doctrina<strong>le</strong> classique est assez floue dans sa formulation,<br />
exigeant que « l’agent ait la volonté et la conscience de commettre<br />
l’infraction tel<strong>le</strong> que définie par la loi 1 ». Doit on entendre par volonté<br />
et conscience, la conscience du risque de contamination et la volonté<br />
toujours intacte de réaliser cet acte sexuel ou faut-il, en plus, exiger<br />
pour entrer en voie de condamnation que l’agent ait voulu contaminer<br />
son partenaire ? Nous pencherions en faveur de cette seconde branche<br />
de l’alternative : <strong>le</strong> rapport sexuel dans <strong>le</strong>s espèces jugées a été voulu<br />
pour ce qu’il est, à savoir un rapport sexuel 2 . Contaminer quelqu’un au<br />
VIH lors d’un tel rapport n’équivaudra jamais à empoisonner quelqu’un<br />
avec de l’arsenic 3 .<br />
Ne jouons pas avec <strong>le</strong> Code Pénal<br />
La mode est à l’inflation législative. Il semb<strong>le</strong>rait que chaque législature<br />
édicte sa fou<strong>le</strong> de textes spéciaux rég<strong>le</strong>mentant sur à peu près tout ce<br />
qui est possib<strong>le</strong> et imaginab<strong>le</strong>. Si la loi a besoin d’être précise, s’il est<br />
nécessaire de tenir compte des évolutions des directives et circulaires<br />
européennes ou de trancher par la voie législative certaines divergences<br />
d’opinions existant entre <strong>le</strong>s chambres de la Cour de Cassation, il semb<strong>le</strong><br />
éga<strong>le</strong>ment, et on peut <strong>le</strong> regretter, que la représentation nationa<strong>le</strong><br />
à une propension lourde à légiférer en fonction de l’opinion publique.<br />
A ce titre, nul ne s’étonnera dès lors que la suppression du juge d’ins-<br />
1 E. Garçon, Code Pénal annoté, 2 ème édition, art. 1 er , n°77 ; R. Mer<strong>le</strong> et A. Vitu, Traité<br />
de droit criminel, t. 1, 7 ème édition, n°579<br />
2 « Il fallait qu’il y ait, de la part de celui qui contamine, intention de tuer, ce qui<br />
paraît impossib<strong>le</strong> à prouver et même à imaginer dans des rapports sexuels entre adultes<br />
consentants » (M. Iacub, « La mora<strong>le</strong> du sida », in Le crime était presque sexuel,<br />
Champs Flammarion, 2003, p. 131-132)<br />
3 <strong>Pour</strong> reprendre <strong>le</strong> parallè<strong>le</strong> douteux d’Alain Prothais<br />
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