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ProChoix<br />
n° 47 - mars 2009<br />
la réhabilitation de celui-ci et sa réinsertion. Or, quel<strong>le</strong> possibilité de<br />
réinsertion si en premier lieu la peine est incompréhensib<strong>le</strong> pour celui<br />
qui la subit ? Dans <strong>le</strong> cas tranché par la Cour d’Assises du Loiret, l’accusée<br />
affirmait avoir informé son époux de sa sérologie. Il existait par<br />
ail<strong>le</strong>urs des doutes 1 quant à la scientificité de la preuve qu’el<strong>le</strong> aurait<br />
infectée la partie civi<strong>le</strong>. Quoiqu’il en soit, punir celui qui n’a pas su<br />
révé<strong>le</strong>r son statut sérologique, punir celui qui n’a pas pu <strong>le</strong> révé<strong>le</strong>r ou<br />
celui qui aurait du seu<strong>le</strong>ment <strong>le</strong> savoir, revient à incarcérer des personnes<br />
qui n’auront, pas nécessairement, la conscience infractionnel<strong>le</strong>. La<br />
vertu de la sanction péna<strong>le</strong> était déjà évoquée chez Platon. Le philosophe<br />
considérant qu’un coupab<strong>le</strong> emprisonné est toujours plus heureux<br />
qu’un coupab<strong>le</strong> en liberté et ce, au nom, de la nécessaire rédemption 2 .<br />
Mais que pourrait on dire des personnes privées de liberté et qui n’ont<br />
pas la conscience de <strong>le</strong>ur culpabilité ? Cela signifierait-il que toutes <strong>le</strong>s<br />
personnes s’engageant dans des relations sexuel<strong>le</strong>s non protégées sont<br />
autant de criminels en puissance ? La peine d’emprisonnement n’est pas<br />
une solution : seul <strong>le</strong> respect d’une certaine « mora<strong>le</strong> » et une meil<strong>le</strong>ure<br />
éducation à la prévention peuvent permettre une prise de conscience<br />
optima<strong>le</strong> de la nécessité de se protéger.<br />
Le sida ne se dit pas<br />
Même près de 30 ans après <strong>le</strong> début de l’épidémie, <strong>le</strong> sida n’est toujours<br />
pas considéré comme une maladie comme <strong>le</strong>s autres. Parce que cel<strong>le</strong>-ci<br />
touche à divers tabous (<strong>le</strong> sang, <strong>le</strong> sexe, la mort), en par<strong>le</strong>r à ses partenaires<br />
sexuels reste diffici<strong>le</strong>. Cela peut conduire ceux-ci à rejeter la relation<br />
sexuel<strong>le</strong>, même protégée. Cela peut éga<strong>le</strong>ment impliquer de révé<strong>le</strong>r<br />
un autre secret : relation extraconjuga<strong>le</strong> non protégée pour <strong>le</strong> conjoint,<br />
homosexualité ou bisexualité, conduite toxicologique… On comprendra<br />
aisément que révé<strong>le</strong>r ou non sa séropositivité est une chose lourde<br />
de conséquences 3 qui ne peut se faire aisément. Il n’en demeure pas<br />
moins que taire sa séropositivité au VIH est une chose, s’engager dans<br />
une relation non protégée alors que l’on se sait contaminé ou que l’on<br />
1 Doutes revendiqués par l’avocate généra<strong>le</strong> el<strong>le</strong> même qui a pourtant requis une peine<br />
de 6 à 8 ans d’emprisonnement ferme !<br />
2 cf. Gorgias<br />
3 « Dans un tel contexte, c’est plutôt la théorie des conséquences qui s’avère plus pertinente<br />
pour appréhender <strong>le</strong> dévoi<strong>le</strong>ment du VIH/sida. Cel<strong>le</strong>-ci est axée sur l’anticipation<br />
des coûts et des bénéfices que <strong>le</strong> dévoi<strong>le</strong>ment est censé entraîner pour la personne vivant<br />
avec <strong>le</strong> VIH » (L. Mellini, A. Godenzi, J. de Puy, « Le sida ne se dit pas : analyse des<br />
formes de secret autour du VIH/sida », L’Harmattan, 2006, p. 155-156)<br />
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