44 | <strong>Guide</strong> <strong>climatique</strong> de la <strong>Croix</strong>-<strong>Rouge</strong> et du <strong>Croissant</strong>-<strong>Rouge</strong> | Dialogues Dialogues | <strong>Guide</strong> <strong>climatique</strong> de la <strong>Croix</strong>-<strong>Rouge</strong> et du <strong>Croissant</strong>-<strong>Rouge</strong> | 45DialoguesTataua Pese se trouve sans nul doute à la lignede front du changement <strong>climatique</strong>. Il avance surla plage de sa maison située sur l’île du PacifiqueSud, le niveau de la mer augmente deux fois plusque le taux global moyen que les scientifiquesavaient prévu. Elle est en train d’éroder la coté.Comme dans de nombreux endroits dans le monde,les populations locales qui ont constaté deschangements rapides et dangereux se demandentpourquoi cela se produit, ce qu’il faut y faire etqui peut les aider.Si cela continue ainsi, il est à craindre que les neufatolls coralliens et les îles au nord de Fidji qui composentl’état polynésien de Tuvalu vont disparaîtred’ici un siècle. La population risque de disparaîtred’ici quelques décennies.Pese, le responsable chargé du changement <strong>climatique</strong>et de la gestion des catastrophes de la <strong>Croix</strong>-<strong>Rouge</strong> de Tuvalu, a déclaré à ses collègues lorsd’une conférence de la <strong>Croix</strong>-<strong>Rouge</strong> / <strong>Croissant</strong><strong>Rouge</strong> à La Haye, « Notre point culminant s’élèveseulement à quatre mètres au-dessus du niveaude la mer. La plupart des gens vivent entre un et troismètres. Mon pays est à 100 % vulnérable ».Avec une surface de seulement 26 kilomètres carrés,les 10000 habitants de Tuvalu résident tous sur lacôte. A quelques minutes de marche de tout coté,vous rejoignez la côte opposée. A l’arrivée desgrandes vagues, des raz-de-marée, il n’y a nullepart où aller. Sauf si vous tenez compte de laNouvelle-Zélande où résident déjà 4.000 Tuvaluanset une admission accrue de 75 par année contribueà augmenter leur nombre.Tataua Pese ne va nulle part. Il sera le dernier àrester s’il a le choix, le dernier à embarquer dansdernier des navires, même si avant que ce journ’arrive beaucoup peut être fait pour aider les insulairesà s’adapter à l’évolution de la situation. Tout n’estpas perdu. Il y a encore de la vie dans les atolls.Leur niveau dépend des partenariats, estime leTuvaluan. Parce que les défis sont si immenses,parce que le temps passe plus vite dans le PacifiqueSud, parce que les ressources sont limitées, lespersonnes qui font face aux changements doivents’unir. Selon Pese les connaissances doivent êtrerassemblées, les stratégies doivent être partagéeset les moyens disponibles alignés.« Ce n’est pas quelque chose que vous faîtes seul.Avec des îlots comme ceux-ci, il est très importantpour les parties prenantes de travailler main dansla main et de savoir qu’il chacun fait et ce que réussit», a-t-il soutenu. « Ensemble nous pouvons fairebeaucoup plus ».Le dialogue recherchéà travers le mondeLe Mouvement de la <strong>Croix</strong>-<strong>Rouge</strong> et du <strong>Croissant</strong><strong>Rouge</strong> ne travaille jamais en isolement, que ce soitsur les îlots ou ailleurs. Mais les partenariats, l’unede ses orientations stratégiques, n’ont jamais étéplus importants que dans le contexte du réchauffementde la planète. Comme les Sociétés nationales« Mon Paysest vulnérableà 100 % »TATAUA PESE, TUVALUse sont lancé sur les programmes sur les changements<strong>climatique</strong>s de par le monde, elles ont recherchéle dialogue avec les gouvernements et les autoritéslocales, les bureaux météorologiques, lesuniversités et d’autres centres du savoir, ainsi queles ONG et la société civile. En tendant la main auxautres, ils ont commencé à créer un réseau.Peut-être que la coopération est plus facile dansun très petit pays. Tout le monde se connait.Cependant, lorsque la <strong>Croix</strong>-<strong>Rouge</strong> a manifestéses inquiétudes par rapport aux changements <strong>climatique</strong>s,elle a surpris le gouvernement de Tuvalu.La <strong>Croix</strong>-<strong>Rouge</strong> était-elle devenue préoccupée parl’environnement ?La Société nationale a expliqué les conséquences humanitairessur lesquelles elle souhaite mettre l’accent.A travers sa présence communautaire, elle était trèsbien placée, en particulier pour sensibiliser les insulaireset pour élaborer une réduction des risques.Aujourd’hui Tataua Pese est proche du gouvernement,proche du bureau météorologique, et trèsproche de l’agence nationale de gestion des catastrophesoù le coordinateur dépend de l’appui dela <strong>Croix</strong>-<strong>Rouge</strong>. « Il ne dispose pas de personnel »,a déploré Pèse, « mais nous avons la capacité denos bénévoles. Le coordinateur l’apprécie ».En particulier en période d’inondations. Parallèlementà des mesures de sensibilisation et de réductiondes risques, la <strong>Croix</strong>-<strong>Rouge</strong> a aussi renforcésa riposte aux catastrophes. Autrefois les insulairespouvaient prédire de fortes marées exceptionnelles.Elles se produisaient au début de chaque annéedans les îles. Maintenant, elles surviennent à toutmoment, dont les plus envahissantes de janvierà avril. La <strong>Croix</strong>-<strong>Rouge</strong> aide à l’évacuation et àconstruire les abris, et se concerte avec les autoritéset les ONG sur les mesures de protection des lieuxparticulièrement menacés.Ce que Pese craint le plus, c’est un raz de maréecausé par l’un des cyclones toujours plus fréquents.« cela n’est pas encore arrivé, mais je suis sûr queça va venir », dit-il, prédisant une catastrophemajeure.L’appui à la coopération dans tous les domainesprovient du Réseau action climat de Tuvalu (Tucan),dont Pèse est un membre fondateur. En tant quegroupe de travail, il réunit le gouvernement, l’église,les ONG et la <strong>Croix</strong>-<strong>Rouge</strong>. A travers le Tucan, leWWF a appuyé l’élaboration d’outils pour évaluerles dangers qui se posent à la communauté etcomment y faire face.Tel est le travail d’équipe, la <strong>Croix</strong>-<strong>Rouge</strong> a retardéle lancement de ses propres évaluations de lacommunauté (voir Réduction des risques sur lacommunauté) jusqu’à l’achèvement des outils etune approche commune pourrait être mise enœuvre. « La <strong>Croix</strong>-<strong>Rouge</strong> a un rôle bien défini icidans les îles. Nous disposons de nos propres activitéset programmes mais avec Tucan nous faisonsles choses en groupe », dit Pèse. La sensibilisationen fait partie, ce qui est tellement plus influente lorsqueles organisations s’entendent sur le messagequ’elles veulent faire passer.
46 | <strong>Guide</strong> <strong>climatique</strong> de la <strong>Croix</strong>-<strong>Rouge</strong> et du <strong>Croissant</strong>-<strong>Rouge</strong> | DialoguesDes femmes puisent l’eau potable de la rivière Jamuna débordante à Aricha en Bangladeh. Photo : Reuters/Rafiquar RahmanAider les populations vulnérablesà s’aider elles-mêmesLa coopération fonctionne mieux quand tout le mondeconnaît ses propres priorités. Les réseaux commeTucan ne peuvent que renforcer cela car la définitionde ce que l’on fait, et de ce que l’on ne fait pas,est une condition préalable à son fonctionnement.A l’occasion de la Journée mondiale de l’environnement,le 5 juin, la <strong>Croix</strong>-<strong>Rouge</strong> de Tuvalu a mené unecampagne avec les autres pour permettre aux habitantsde l’île d’entretenir leur propre environnement.« C’est l’une de nos plus grandes journées de nettoyage.Nous nettoyons le long de la côte pour protégerle corail. Le déversement d’ordures là-bas estune habitude nationale, mais il détériore le corail dulagon, et de cet fait, nous avons lancé une campagnede prévention ».Il n’y a rien de mal à cela. Il n’y a rien contre à promouvoirl’énergie propre pour les îles, même si lesémissions de gaz à effet de serre à Tuvalu sontmoins importantes que la flatulence d’un troupeaude vaches dans un champ en Allemagne. Cela pourraitmême gêner les plus grands producteurs dumonde, dont la pollution réchauffe l’océan et quisont à l’origine des plus gros dommages aux coraux,à aller plus vite.Pour la <strong>Croix</strong>-<strong>Rouge</strong> l’événement du 5 juin n’est passimplement un effort environnemental. Des corauxsains soutiennent les moyens de subsistance locale,réduisant au final la vulnérabilité des habitantsde l’île aux changements <strong>climatique</strong>s. De même,la plantation d’arbres le long de la côte pour réduirela force des vagues, et donc l’érosion côtière, est laplus importante leçon. « Notre tâche principale »,dit Pèse, « est de travailler avec les communautéspour comprendre ce qui se passe et comment ellespeuvent réduire l’impact ».Ceci est au cœur du travail de la <strong>Croix</strong>-<strong>Rouge</strong> /<strong>Croissant</strong>-<strong>Rouge</strong> : aider les vulnérables à s’aidereux-mêmes. C’est d’autant plus facile pour lesSociétés nationales car leur rôle d’auxiliaires indépendantsdes autorités publiques dans les actionshumanitaires est clairement décrit dans les accordsexistants avec les gouvernements.Certaines Sociétés nationales ont pu influencer la politiquenationale. Comme la <strong>Croix</strong>-<strong>Rouge</strong> du Nicaragua.Elle joue un rôle clé dans le Plan national de gestiondes risques du pays, en travaillant avec les décideursau niveau national et régional afin de renforcer leurréponse collective aux catastrophes, de la formationà la coordination des procédures de réponse.L’un des enseignements tirés de l’expérience a étél’importance de la <strong>Croix</strong>-<strong>Rouge</strong> et du <strong>Croissant</strong><strong>Rouge</strong> comme lien entre le changement <strong>climatique</strong>et la gestion des risques de catastrophe. Dans laplupart des pays les changements <strong>climatique</strong>s sontpris en charge par les ministères de l’Environnementqui mettent l’accent sur les problèmes de pollution,avec peu d’implication des catastrophes connexes.La <strong>Croix</strong>-<strong>Rouge</strong> et le <strong>Croissant</strong>-<strong>Rouge</strong> peut faciliterle dialogue et renforcer le volet gestion des catastrophes(GC) dans la politique nationale sur les changements<strong>climatique</strong>s.La <strong>Croix</strong>-<strong>Rouge</strong> vietnamienne est une autre Sociétéqui assure le lien entre un système national de GCet les acteurs des changements <strong>climatique</strong>s et lesinstituts de l’environnement. Lorsque le bureau degestion des catastrophes du pays n’a pas été invitéà une conférence sur les changements <strong>climatique</strong>sorganisée par un organisme gouvernemental,la Société a pris contact avec l’agence concernée,a manifesté son intérêt et a été depuis lors incluedans ce réseau. En Afrique australe, la <strong>Croix</strong>-<strong>Rouge</strong>mozambicaine a réuni les organismes gouvernementauxet les dirigeants communautaires au niveaunational, du district et au niveau local pour partagerdes informations sur les conditions <strong>climatique</strong>s extrêmeset la nécessité de développer plus de résistanceaux tempêtes, aux inondations et aux sécheresses.La <strong>Croix</strong>-<strong>Rouge</strong> du Malawi travaille en collaborationavec le service météorologique et les chefsdes communautés rurales pour veiller à ce que lesagriculteurs de subsistance reçoivent, comprennent,aient confiance et agissent sur la base des informationssur le climat produites par les scientifiques.