72 | <strong>Guide</strong> <strong>climatique</strong> de la <strong>Croix</strong>-<strong>Rouge</strong> et du <strong>Croissant</strong>-<strong>Rouge</strong> | Etude de cas : L’Afrique Etude de cas : L’Afrique | <strong>Guide</strong> <strong>climatique</strong> de la <strong>Croix</strong>-<strong>Rouge</strong> et du <strong>Croissant</strong>-<strong>Rouge</strong> | 73ment dans la fréquence des pluies pourrait entraînerune mauvaise récolte et, par conséquence, de gravespénuries alimentaires ou même de la famine.cent des terres agricoles est irrigué et la sécheressepeut jeter tout le pays dans une situation de crise etde pénurie alimentaire.Etude de cas : L’AfriqueDes paysages desséchés, des cultures flétries,des fleuves et des lacs asséchés, oule contraire – des inondations dévastatrices;du bétail agonisant, des personnes affamées.Cela pourrait être l’image que nousallons voir en Afrique dans une dizaine d’années,à moins que nous ne gérions mieuxles risques <strong>climatique</strong>s.Les nouvelles recherches indiquent que la vulnérabilitéaux menaces de changements <strong>climatique</strong>s estplus grande en Afrique que dans d’autres régionsdu monde. Ces changements ne se limiteront pasà une augmentation moyenne des températureset à une évolution des modèles de précipitations.Les sécheresses et les inondations se produisentavec de plus en plus de fréquence et de sévéritéet sont accompagnées par des maladies commela diarrhée. Le paludisme fait également sonapparition dans des altitudes qui, auparavant, neconnaissaient pas de moustiques, comme dansles hautes terres d’Ethiopie. La fièvre de la valléedu Rift a refait surface.L’évolution des conditions atmosphériques des dernièresannées a un impact négatif sur la sécurité alimentaire,les agriculteurs ne sont plus en mesure deplanter ou de récolter comme ils le faisaient depuisdes siècles vu que les précipitations sont en retardou irrégulières.Les communautés sont vulnérables aux dangersinconnus et ne peuvent même pas faire face auxchocs mineurs – provoquant une augmentationconstante du nombre de personnes qui ont besoind’une assistance humanitaire. Le nombre moyend’urgences alimentaires en Afrique par an a presquetriplé depuis le milieu des années 1980, et au coursde la dernière année, déjà 25 millions de personnesont été confrontées à une crise alimentaire.L’Afrique, avec ses ressources déjà épuisées, a unefaible capacité pour faire face à de nouvelles catastrophesprovoquées par les changements <strong>climatique</strong>s.Environ 90% de la population dépend del’agriculture pour leurs moyens de survie – nombreuxsont les agriculteurs avec le minimum vital qui neproduisent pas assez de nourriture que pour leursfamilles et eux-mêmes. Toute diminution ou change-La production agricole sera gravement touchée parles changements <strong>climatique</strong>s – les zones propicesà l’agriculture, les saisons de croissance et les rendementsdevraient tous diminuer. Cette situation vanuire davantage à la sécurité alimentaire et aggraverla malnutrition dans certains pays.Le rendement de l’agriculture qui dépend de la pluiepourrait être réduit de moitié d’ici à 2020, selon lesscientifiques du Groupe d’experts intergouvernementalsur l’évolution du climat (GIEC). De nombreusesrégions d’Afrique sont déjà considérées en manqued’eau – ce qui sera renforcé par les changements<strong>climatique</strong>s.Toute augmentation significative de la températurepourrait également gravement affecter les culturesde rente comme le thé ou le café. Les zones arideset semi-arides de toute l’Afrique sont en train de devenirencore plus sèches. En moyenne, l’augmentationde la température sur le continent est de 0,5 °Cplus élevée qu’il ne l’était il y a 100 ans, dans certainesrégions même plus.La migration est une autre conséquence deschangements <strong>climatique</strong>s puisque les gens s’éloignentdes zones exposées à la sécheresse et travaillentcomme ouvriers sur d’autres fermes pourgagner de l’argent afin d’acheter de la nourriture,ce qui augmente la pression sur certaines partiesdu continent.L’EthiopieDivisée par la Vallée du Rift de l’Afrique de l’Est enhautes et basses terres, l’Ethiopie a un climat trèsvarié, allant des hautes terres fraîches et pluvieusesde Dega à la dépression de Danakil – l’un des endroitsles plus chauds et les plus secs de la planète.L’économie est fondée sur l’agriculture, qui représentela moitié du PIB, 60 pour cent des exportationset 80 pour cent de l’emploi total. Mais seul 1 pourSelon Tadege Abebe, le directeur de la rechercheà l’Office météorologique national d’Addis-Abeba :« Il y a des signes des changements <strong>climatique</strong>s enEthiopie depuis 2000 et même antérieur. L’Afriquetropicale est un foyer des changements de précipitations.Je suis très inquiet. Quel est l’impact sur lescultures, le tef [la nourriture de base traditionnelle],le thé, le café, le bétail ? »Avec cinq grandes sécheresses en deux décennies,de nombreuses familles n’ont pas eu le temps derécupérer et des centaines de milliers de personnesvivent chaque année à la limite de la survie.En 2000-2003, 46% de la population souffraient demalnutrition, selon l’Organisation pour l’alimentationet l’agriculture.Au même moment, 2006 a enregistré certaines despires inondations de l’histoire de l’Ethiopie, déplaçantdes personnes dans tout le pays. Des inondationsrapides à Dire Dawa, la deuxième plus grande villeaprès Addis-Abeba, ont tué près de 250 personneset déplacé des milliers d’autres.Plus de 400 personnes sont mortes au cours desépidémies de diarrhée aqueuse aiguë de 2006.Fadis, dans l’est du pays, a été durement touchéepar la sécheresse. De nombreux agriculteurs ontconnu de mauvaises récoltes pendant des annéessuccessives en raison de pluies irrégulières. Cesdernières années, les pluies ont complètementmanqué au rendez-vous.Yusuf Idris, un ancien du village, vit dans la régiondepuis 40 ans et sa famille et sa communauté dépendentrégulièrement des secours alimentaires. Lespluies ont fait cruellement défaut au cours des dernièresannées et il ne peut pas planter ses cultures.Le fleuve Boco voisin, qui était l’une des principalessources d’irrigation de la zone, s’est asséché il y aplusieurs années Il déclare que de nombreuses personnesau sein de sa communauté migrent chaque
74 | <strong>Guide</strong> <strong>climatique</strong> de la <strong>Croix</strong>-<strong>Rouge</strong> et du <strong>Croissant</strong>-<strong>Rouge</strong> | Etude de cas : L’Afrique Etude de cas : L’Afrique | <strong>Guide</strong> <strong>climatique</strong> de la <strong>Croix</strong>-<strong>Rouge</strong> et du <strong>Croissant</strong>-<strong>Rouge</strong> | 75année à cause de la sécheresse et de la pénurie denourriture et d’eau.Le paludismeA quelques kilomètres de là, près de la ville de Harar,le lac Halamaya s’est également asséché il y a plusieursannées, en partie en raison de la rareté desprécipitations dans la région. Le Lac Halamaya longde près de cinq kilomètres, a été la principale sourced’eau d’Harar et des communautés environnantes eta fournit des revenus aux pêcheurs. Les villageoisdoivent maintenant marcher pour avoir de l’eau et iln’y plus de maraîchers ou de pêcheurs.Au contraire dans la zone d’Harar au sud de violentesinondations se sont abattues en 2006 dans l’ouestdu Shoa, où 3000 personnes ont été déplacées.« De telles inondations ne se sont pas produites depuis40 ans », confie Tiringo Engdawork, secrétairede la section de la <strong>Croix</strong>-<strong>Rouge</strong> éthiopienne (CRE).La préparation aux catastrophes de la CRE met l’accentsur l’eau potable et la plantation d’arbres pourobtenir du bois, des fruits et de la culture en terrasseset souhaite sensibiliser, recueillir des donnéeset former les bénévoles.Selon le secouriste Geude Beyenne : « Nous avonsdes bénévoles partout en Ethiopie. Nous avons commencéil y a deux ans parce que nous nous sommesrendus compte que nous étions plus fréquemmenttouchés par des catastrophes naturelles. Nous préparonsdu matériel de secours. La politique actuelleconsiste à dépenser 10% des revenus de l’organisationen provisions pour les activités de préparation ».La CRE a également donné beaucoup d’importanceà la nécessité de conserver l’eau. Le « prélèvement »de l’eau de pluie est un moyen efficace de collecterde l’eau potable pendant la période de pluie et celapeut durer plusieurs semaines ou plusieurs mois.« La collecte de l’eau est importante et est essentielle,en particulier dans la préparation aux catastrophes.Certaines personnes dans le sud du pays ne peuventutiliser qu’un litre par semaine. », explique GeudeBeyenne. Plus de 50 citernes de collecte d’eau pluvialeplacées sur les toits et sous terre, ont été construitesau cours des deux ou trois dernières années.La CRE dispose par ailleurs d’un programme de priseen charge sanitaire communautaire destiné à lasensibilisation et à l’éducation, mais il devra être renforcéà la lumière des changements <strong>climatique</strong>s. Lesmaladies se propagent plus rapidement pendant lespériodes difficiles.Les maladies qui étaient considérées comme étantéradiquées ont également fait leur réapparition.En 2006, des cas de diarrhée aqueux aigu ont étéenregistrés pour la première fois en dix ans. Il y aclairement une interaction entre la malnutrition,le paludisme et le VIH/SIDA.Le RwandaMalgré une décennie de croissance économique rapide,la pauvreté reste très répandue au Rwanda.Connu sous le nom de « Pays des mille collines »,le Rwanda est un petit pays enclavé, entouré parle Burundi, la Tanzanie, l’Ouganda et la Républiquedémocratique du Congo. Mais en dépit de sa superficie,il a des écosystèmes très divers.Le Rwanda fait partie du Grand Plateau de l’Afriquede l’est, qui s’étend de la plaine à l’ouest, qui se caractérisepar des marais et des lacs et des hautes terresde l’est. Cela divise le pays entre le bassin du Nilet le bassin du Congo. Le climat est modéré et tropical,avec une courte saison sèche de janvier à févrieret une longue saison sèche de juin à septembre.Certaines parties du Rwanda ont été frappées parune sécheresse persistante pendant ces dernièresannées, les pluies ont été irrégulières de sorte que,une fois encore, les agriculteurs ne savent plusquand planter ou récolter. Les changements <strong>climatique</strong>ssont clairement visibles et les températures minimalesont augmenté de deux degrés en 30 ans.En effet, 2005 a été l’année la plus chaude depuisde nombreuses années au Rwanda. Les températuresont atteint 35°C dans la capitale, Kigali. Des températuresplus élevées signifient également la propa-gation de maladies telles que le paludisme, principalecause de mortalité dans toutes les provinces.L’interaction entre les maladies est aussi un sujet depréoccupation. La malnutrition implique aussi uneplus rapide propagation des maladies. C’est un cerclevicieux. Et les maladies qu’on pensait avoir disparucomme le choléra, réapparaissent. De nouveaux casde choléra ont été enregistrés pour la première foisà Kigali en 2006 et dans le nord-est en 2007.Le secteur agricole est essentiel à l’environnementrwandais. Il domine l’économie en termes de contributionau PIB et il représente également plus de90 % de l’emploi. Les exportations agricoles représententplus de 70% du total, le café et le thé sontles deux principales cultures d’exportation. Leschangements <strong>climatique</strong>s pourraient avoir de gravesconséquences pour la production agricole.En 2006, il y avait un certain nombre de décès à lasuite de fortes pluies et d’inondations, et les cultureset le bétail ont été détruits. Patricia Hajabakiga, laministre de l’Environnement, a déclaré que cettesituation avait affecté le budget national puisquel’argent destiné au développement économiquea été utilisé pour les mesures d’urgence telles quel’alimentation d’urgence.Dans la même foulée, les niveaux d’eau ont baisséet les centrales hydroélectriquesont été touchées.La production d’électricité a diminué et il y a eu unecrise énergétique au cours des dernières années.Pour produire de l’électricité, le gouvernement a duacheter des groupes électrogènes d’un coût de plusieursmillions de dollars. Cela a eu un impact surla population – avec le prix de l’électricité qui a triplé.La migrationBugusera, dans le sud du Rwanda, est une zone quia constamment été frappée par la sécheresse et iciprès de 40 % de la population n’a pas des sourcesassurées de nourriture. Beaucoup d’agriculteursdans cette zone ont souffert de mauvaises récoltesdues aux retards ou à l’irrégularité des précipitations.Mary Jane Nzamwita est une agricultrice de Gashoraqui a cinq enfants à nourrir. Depuis 1998, la pluie estdevenue imprévisible. « Nous pensons qu’il va pleuvoiret il ne pleut pas et alors nous perdons notre récolte», explique-t-elle. La récolte de Mary Jane abaissé de moitié.Elle a juste réussi à économiser assez d’argent pourenvoyer ses enfants à l’école (les enfants reçoiventde la nourriture offerte par le Programme alimentairemondial à l’école), mais elle n’a pas les moyens depayer les frais d’assurance santé pour toute la famille.La famille doit maintenant boire de l’eau desmarais environnants et souffre continuellement dela diarrhée et du paludisme.« Je me sens comme si j’avançais à reculons », dit-elle.« Les enfants ne vont pas bien. Lorsque vous voyezl’enfant de dix ans, vous pensez qu’il en a cinq ».Un volontaire de la Société de la <strong>Croix</strong>-<strong>Rouge</strong> rwandaise(CRR) de Bugusera explique qu’on assiste désormaisà plus de pluies irrégulières et de la sécheressequi poussent les gens à migrer vers d’autresrégions ou dans des villes voisines du Rwanda oùils peuvent travailler.Beaucoup de familles sont séparées. Mimi et Joséphines’occupent de leurs enfants et de leurs champspendant que leurs maris sont partis ailleurs gagnerde l’argent. Cette année, le manque de précipitationsa causé la perte des récoltes de maïs et elles continuentà espérer de la pluie pour leur récolte de haricots.Sans la pluie, elles n’ont plus de nourriture.La migration est devenue un problème tellementgrave car près de 80% de la population de la régiona quitté sa ferme pour chercher du travail dansd’autres régions entre 2003 et 2005. Toutefois, legouvernement local a essayé de stocker du maïs,du sorgho et des haricots et la migration a diminué,selon Viateur Ndavisabye, secrétaire exécutif dugouvernement de la région de Gashora.« Les changements <strong>climatique</strong>s constituent un grosproblème », dit Apollinaire Karamaga, secrétaire généralde la CRR. « Nous devons former des bénévoles surles compétences de base, comme être en mesure de