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N o 6 Déce<strong>mb</strong>re 2008<br />
Le Tribunal fédéral, l’instance juridique<br />
suprême en Suisse, statue chaque année<br />
sur des cas dans <strong>le</strong>squels un patient demande<br />
de l’argent à son médecin ou à un<br />
hôpital parce qu’il n’a soi-disant pas été<br />
traité du tout ou pas été traité correctement.<br />
Les cas traités devant <strong>le</strong>s tribunaux<br />
concernent quasiment exclusivement la<br />
question de la responsabilité. Etant<br />
donné que <strong>le</strong>s arrêts du Tribunal fédéral<br />
sont définitifs et ont ainsi un caractère<br />
normatif sur <strong>le</strong> plan juridique, il vaut la<br />
peine de s’y intéresser de plus près.<br />
Le droit pénal à l’honneur<br />
Dans <strong>le</strong>s artic<strong>le</strong>s parus jusqu’ici dans <strong>le</strong><br />
cadre de cette série «Comment <strong>le</strong> médecin<br />
peut-il devenir l’accusé», il n’était question<br />
que de la responsabilité civi<strong>le</strong> qui<br />
peut entraîner la responsabilité du médecin<br />
pour des dommages-intérêts. Cet<br />
artic<strong>le</strong> est consacré à la responsabilité<br />
péna<strong>le</strong> du médecin contrevenant qui peut<br />
PERSPECTIVES<br />
SÉRIE «TOUT CE QUI RELÈVE DU DROIT», PARTIE 6:<br />
DROIT PÉNAL ET CHECK-LIST POUR MÉDECINS<br />
Comment <strong>le</strong> médecin<br />
peut-il devenir l’accusé?<br />
Celui qui traite et agit s’expose au risque de commettre des erreurs.<br />
Un no<strong>mb</strong>re croissant de médecins se retrouve devant <strong>le</strong>s tribunaux,<br />
suite à des plaintes de patients ou de proches qui demandent des<br />
dommages-intérêts. Notre série en six vo<strong>le</strong>ts a pour objectif d’éclairer<br />
<strong>le</strong> rapport entre médecin et patient du point de vue du Tribunal fédéral.<br />
Frédéric Krauskopf, docteur en droit, avocat, LL.M. Harvard,<br />
chargé de cours à l’Université de Bâ<strong>le</strong><br />
conduire à des sanctions péna<strong>le</strong>s. Car <strong>le</strong><br />
médecin qui vio<strong>le</strong> son devoir de diligence<br />
ne s’expose pas seu<strong>le</strong>ment à la responsabilité<br />
civi<strong>le</strong> pour des dommagesintérêts,<br />
mais peut aussi, suivant <strong>le</strong>s circonstances,<br />
être passib<strong>le</strong> d’une sanction<br />
péna<strong>le</strong>. Il y a certes des conditions léga<strong>le</strong>s<br />
spécifiques qui sont applicab<strong>le</strong>s en ce qui<br />
concerne la responsabilité péna<strong>le</strong>; cel<strong>le</strong>sci<br />
resse<strong>mb</strong><strong>le</strong>nt toutefois beaucoup aux<br />
conditions de la responsabilité civi<strong>le</strong>.<br />
En voici <strong>le</strong>s détails:<br />
Le médecin<br />
est-il un criminel?<br />
Comme pour <strong>le</strong> droit civil, <strong>le</strong> principe de<br />
l’intégrité physique s’applique éga<strong>le</strong>ment<br />
au droit pénal. Le droit pénal protège<br />
l’intégrité corporel<strong>le</strong> (art. 122 s. CP) et<br />
la vie (art. 111 ss. CP) et sanctionne tout<br />
acte entravant ces droits comme illicite<br />
pour autant qu’il n’existe pas de justification<br />
pour de tels actes. En d’autres termes,<br />
<strong>le</strong>s médecins qui pratiquent une intervention<br />
sur un patient, c’est-à-dire qui<br />
portent atteinte à l’intégrité physique de<br />
celui-ci, agissent en principe de manière<br />
illicite et commettent une lésion corporel<strong>le</strong>,<br />
même si l’intervention est effectuée<br />
à but curatif. Cela vaut éga<strong>le</strong>ment<br />
pour l’intervention médica<strong>le</strong> effectuée<br />
selon <strong>le</strong>s règ<strong>le</strong>s de l’art médical. Ce n’est<br />
que l’existence d’une justification qui<br />
rend l’intervention licite. Le consentement<br />
du patient constitue la principa<strong>le</strong><br />
justification pour une intervention. Et ce<br />
n’est que <strong>le</strong> patient capab<strong>le</strong> de discernement<br />
et informé (ou pour <strong>le</strong>s patients qui<br />
ne sont pas capab<strong>le</strong>s de discernement,<br />
<strong>le</strong>ur représentant légal) qui peut donner<br />
son consentement pour une intervention<br />
médica<strong>le</strong>. Le consentement doit être donné<br />
avant l’intervention. Si <strong>le</strong> médecin vio<strong>le</strong><br />
son devoir d’information, il n’est certes<br />
pas responsab<strong>le</strong> sur <strong>le</strong> plan pénal. Mais il<br />
est coupab<strong>le</strong> de lésion corporel<strong>le</strong> s’il effectue<br />
une intervention sur <strong>le</strong> patient non informé,<br />
étant donné que celui-ci ne pouvait<br />
pas donner son consentement faute<br />
d’information suffisante. Dans ce cas, <strong>le</strong><br />
médecin ne peut qu’argumenter que <strong>le</strong><br />
patient aurait éga<strong>le</strong>ment donné son consentement<br />
pour l’intervention s’il avait<br />
été informé correctement et à temps et<br />
que l’intervention aurait donc éga<strong>le</strong>ment<br />
été pratiquée dans ce cas de figure (comportement<br />
alternatif licite du médecin).<br />
Pour préciser mon propos: ce n’est pas<br />
<strong>le</strong> but curatif visé, mais uniquement <strong>le</strong><br />
consentement du patient qui justifie<br />
l’intervention médica<strong>le</strong>. C’est pourquoi<br />
<strong>le</strong>s interventions médica<strong>le</strong>s qui ne sont<br />
pas à but curatif – par exemp<strong>le</strong> la stérilisation,<br />
<strong>le</strong>s opérations cosmétiques ou <strong>le</strong>s<br />
césariennes effectuées sans indication<br />
médica<strong>le</strong> – sont licites lorsque <strong>le</strong> patient y<br />
a consenti valab<strong>le</strong>ment. Inversement, on<br />
notera que <strong>le</strong> consentement ne justifie pas<br />
n’importe quel type d’intervention portant<br />
atteinte à l’intégrité physique. Les<br />
lois posent des limites: bien que <strong>le</strong> suicide,<br />
respectivement la tentative de suicide,<br />
reste impuni, <strong>le</strong> consentement du patient<br />
pour <strong>le</strong> meurtre par <strong>le</strong> médecin n’est pas<br />
valide (art. 114 CP), indépendamment<br />
des raisons pour <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s <strong>le</strong> patient a<br />
consenti à sa propre mort. Les artic<strong>le</strong>s 3 et<br />
4 de la loi sur la stérilisation du 17 déce<strong>mb</strong>re<br />
2004 interdisent la stérilisation de<br />
<strong>VSAO</strong> JOURNAL ASMAC 33