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<strong>LG</strong><br />
JUIN 2018<br />
9<br />
L’avènement du Digital<br />
Semblablement au siècle des Lumières, l’avènement du monde digital se cherche, expérimente,<br />
essaie, se trompe et se réinvente au travers de formidables accélérations. À la différence<br />
près qu’«une évolution est préférable à une révolution». Brice Lecoustey, associé à la tête<br />
du département Conseil pour le secteur commercial et public chez EY Luxembourg, nous<br />
explique la transformation digitale du service public.<br />
Quelle est l’importance de la<br />
digitalisation pour le secteur public?<br />
La digitalisation se compose de trois<br />
grands domaines technologiques que<br />
sont la connectivité, la robotisation et<br />
l’intelligence artificielle. Ces technologies<br />
sont aujourd’hui matures, accessibles à des<br />
prix abordables et tendent crescendo à une<br />
convergence. L’expérience client s’en trouve<br />
transformée, chaque citoyen souhaitant<br />
également voir son administration utiliser<br />
les nouvelles technologies.<br />
De la convergence technologique est<br />
née une certaine exigence: celle d’une<br />
réduction des temps de traitements des<br />
démarches administratives relatives à la<br />
justice, à la police, à la caisse de santé et<br />
bien évidemment, aux communes. À l’instar<br />
de ce qui se fait déjà dans de nombreuses<br />
entreprises, la robotisation est un moyen d’y<br />
parvenir.<br />
Nous connaissons depuis deux ans une<br />
formidable accélération, se matérialisant par<br />
des initiatives qui se multiplient par réaction<br />
mécanique, presque physique. Toutes les<br />
conditions sont aujourd’hui réunies pour<br />
que le probable devienne enfin réalité.<br />
Quelles réponses apportez-vous aux<br />
craintes de voir la robotisation remplacer<br />
des emplois et par la même, les interactions<br />
humaines?<br />
Les interrogations sont en effet nombreuses,<br />
mais légitimes. Il faut pouvoir les aborder<br />
avec raison gardée en toute réflexion.<br />
La robotisation est certes un moyen de<br />
parvenir à des économies mais elle ne<br />
diminue pas pour autant la demande<br />
de services publics, c’est même tout le<br />
contraire. La connectivité couplée à la<br />
robotique fluidifie les traitements, créant<br />
un niveau certain de qualité, une attente<br />
plus exigeante, mais aussi une nécessité<br />
de relations humaines. La robotisation<br />
automatise les opérations répétitives et<br />
les tâches dévalorisantes, réalisées pour<br />
l’heure par la main de l’homme. Le<br />
fonctionnaire d’Etat ou l’agent communal<br />
peut alors consacrer plus de temps au cœur<br />
de sa mission et au citoyen, constituant de<br />
facto, une amélioration de la qualité de ses<br />
conditions de travail.<br />
“Une évolution<br />
est préférable<br />
à une révolution”<br />
Lorsqu’un processus est compressé à<br />
80% par la digitalisation, il doit être<br />
régulièrement programmé. Celui qui le<br />
réalise actuellement pourra alors gérer les<br />
exceptions du mécanisme et réaliser un<br />
travail de contrôle des traitements. Les<br />
nouvelles technologies sont régulièrement<br />
confrontées aux angoisses d’adaptabilité<br />
des collaborateurs; certains pensant que des<br />
compétences d’ingénierie sont nécessaires<br />
à l’utilisation de la robotique. À l’image<br />
du passage de la machine à écrire à Word,<br />
quelques semaines d’entrainement suffisent<br />
bien souvent, sans compter que les interfaces<br />
sont toujours plus intuitives et que les<br />
nouvelles générations s’adaptent bien plus<br />
rapidement aux nouvelles technologies.<br />
Quelle est la maturité actuelle de la<br />
digitalisation des services publics au<br />
Luxembourg?<br />
Il faut reconnaître les avancées en<br />
termes de connectivité. Les institutions<br />
et les administrations ont en effet<br />
grandement amélioré leurs processus<br />
communicationnels, Guichet.lu ou encore<br />
les fichiers des résidents et les dossiers<br />
de soins partagés en sont quelques bons<br />
exemples. Il n’y a pas si longtemps, les<br />
démarches administratives d’un simple<br />
changement d’adresse étaient encore<br />
relativement lourdes mais aujourd’hui, le<br />
citoyen n’a plus besoin de se rendre dans<br />
son ancienne commune qui communique<br />
directement avec la nouvelle. Il en va<br />
de même avec le DSP qui accompagne<br />
désormais le patient tout au long de<br />
ses traitements médicaux. Dans ces<br />
deux exemples, on remarque le soin<br />
méthodologique à placer le citoyen et le<br />
patient au centre des préoccupations, ce<br />
qui, entre autres, implique la protection de<br />
leurs données personnelles.<br />
Si les progrès de connectivité sont<br />
indéniables, il suffit néanmoins de se rendre<br />
à la cité judiciaire pour constater que la<br />
digitalisation n’est pas encore généralisée.<br />
Force est de constater que les magistrats et<br />
les avocats préfèrent leurs lourds dossiers<br />
de papiers aux tablettes et autres supports<br />
numériques. La digitalisation des données<br />
et la dématérialisation des documents<br />
pourraient pourtant simplifier bon nombre<br />
de procédures judiciaires.<br />
La prochaine étape devrait être<br />
l’identification des zones publiques où la<br />
robotisation peut apporter une amélioration<br />
dans le traitement de l’information, et ce,<br />
dans l’objectif d’augmenter la rapidité des<br />
processus de traitement. Le secteur public<br />
peut tirer ses pistes de réflexion du secteur<br />
privé, comme avec l’automatisation des flux<br />
de paiements dans la trésorerie qui pourrait<br />
facilement être appliquée à la CNS.<br />
Enfin, l’intelligence artificielle pourra<br />
dans un autre temps, réaliser un premier<br />
aiguillage du citoyen vers le bon service<br />
qu’il requiert. Les agents conversationnels<br />
ou «chatbot» sont des logiciels programmés<br />
pour simuler une conversation en langage<br />
naturel qui commence déjà à pointer leurs<br />
algorithmes dans certaines sociétés.