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« Nijinski était un vrai<br />

virtuose, il donnait<br />

l’impression de pouvoir<br />

rester suspendu en l’air »<br />

Léon Bakst, s’intéressaient au ballet et il vit qu’à travers eux la<br />

danse était prête à changer, comme l’opéra avec Wagner, dit<br />

Pritchard. Il a vu qu’il pouvait imprimer sa marque ».<br />

Pour ça, il lui fallait une star. Il la trouva avec Nijinski.<br />

« C’était un vrai virtuose, ses sauts étaient d’une légèreté qui<br />

donnait l’impression qu’il pouvait rester suspendu en l’air,<br />

dit Pritchard. Les danseurs-hommes étaient passés de mode<br />

et cela faisait longtemps qu’on n’avait pas vu ça [ils furent au<br />

centre du succès des Ballets russes]. Il avait aussi beaucoup de<br />

présence sur scène et pouvait changer d’un rôle à l’autre. »<br />

Or, Nijinski était sous contrat avec les Ballets impériaux<br />

russes. On n’a jamais su le rôle de Diaghilev, qui avait une<br />

liaison avec le danseur, dans le scandale suivant. Nijinski<br />

apparut sur scène en Russie sans l’habituel « caleçon<br />

de modestie ». Il fut renvoyé et Diaghilev en profi ta. Un<br />

télégramme à ses bailleurs de fonds français indique son<br />

modus operandi : « Terrible scandale. Utiliser publicité. »<br />

Ce schéma s’est répété tout au long des débuts des Ballets<br />

russes. L’Oiseau de feu de Stravinsky, chorégraphie de Michel<br />

Fokine et magnifi ques costumes de Bakst, avait été un succès<br />

en 1910, mais Diaghilev, Stravinsky et Nijinski en voulaient<br />

toujours plus. Pendant que Stravinsky, découvert par<br />

Diaghilev, travaillait sur son ballet suivant, Nijinski préparait<br />

ses débuts de chorégraphe dans L’après-midi d’un faune de<br />

Debussy au Châtelet. C’était quelque chose de différent, de<br />

court, avec huit danseurs – Nijinski et sept nymphes – qui<br />

se fi nissait avec Nijinski se déhanchant impudiquement audessus<br />

d’un tissu abandonné par une nymphe. Le public fut<br />

atterré.<br />

« À l’époque, on ne s’attendait pas à voir une simulation<br />

de l’acte sexuel sur scène, dit Pritchard. Par la suite, il a mis de<br />

l’eau dans son vin, mais cela lui valut beaucoup de publicité. »<br />

La polémique de l’année suivante fut encore pire avec une<br />

véritable émeute au Théâtre des Champs-Élysées. Cette fois,<br />

c’est la musique de Stravinsky pour Le sacre du printemps qui<br />

provoqua l’indignation, ses rythmes complexes et dissonants<br />

déclenchant des cris de colère et des disputes violentes.<br />

« Personne n’avait jamais rien vu de tel, dit Pritchard. Les<br />

couleurs éclatantes, les martèlements de la musique et de la<br />

chorégraphie – tous ces éléments ont horrifi é le public. »<br />

Mais l’avant-garde fut charmée, ce qui permit à Diaghilev<br />

de commanditer des artistes et couturiers comme Prokofi ev<br />

et Strauss, Picasso, Miro, Matisse et Chanel. Mais le talent<br />

de Diaghilev pour la publicité était subtil : il savait aussi se<br />

montrer discret. Les scandales avaient lieu à Paris mais tout<br />

était plus calme quand les Ballets russes allaient à Londres.<br />

« Diaghilev était très sensible au fait que Londres était plus<br />

conservatrice, donc pour le battage publicitaire, vous alliez à<br />

METROPOLITAN 103

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