Untitled - Opéra de Lyon
Untitled - Opéra de Lyon
Untitled - Opéra de Lyon
Create successful ePaper yourself
Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.
UN INNOVATEUR DE GÉNIE<br />
cette solennité et permet à chacun <strong>de</strong> se rendre compte <strong>de</strong><br />
l’extrême importance <strong>de</strong> Montever<strong>de</strong>, par un texte qu’elle<br />
renouvelle et met au point, me permet <strong>de</strong> ne pas passer sous<br />
silence cette véritable résurrection. [...]<br />
Quand on pénètre dans l’œuvre <strong>de</strong> Montever<strong>de</strong> et qu’on<br />
étudie sa vie, on comprend sans effort l’enthousiasme que<br />
cette gran<strong>de</strong> figure est susceptible d’inspirer à un artiste professant<br />
un culte éclairé du passé. Car ce n’est pas avec les<br />
yeux <strong>de</strong> l’archéologue qu’il considère ces monuments primitifs<br />
<strong>de</strong> la musique religieuse ou dramatique. A travers le<br />
dédale <strong>de</strong>s siècles, la flamme qui le gui<strong>de</strong> est celle-là même<br />
qui s’est transmise à lui, vivante, par d’innombrables rayons<br />
tissés par la même lumière. Et, c’est <strong>de</strong> la sentir tressaillir<br />
pareille à celle qu’il porte en lui qu’il se réjouit, non d’une<br />
vaine curiosité satisfaite, ni d’une trouvaille <strong>de</strong> conservateur<br />
d’antiquités. M. d’Indy, dans sa courte préface à son édition<br />
d’Orfeo, n’avait guère besoin d’avertir le public qu’il n’a pas<br />
eu l’intention <strong>de</strong> faire œuvre d’archéologue mais d’artiste. On<br />
le croit sans peine. [...]<br />
L ’ O r f e o est une <strong>de</strong> ces œuvres qui résument le génie d’un<br />
auteur et d’une race et la tendance la plus noble d’une<br />
époque. Au début du X V I I e siècle, la langue musicale était en<br />
pleine formation. Le style du contrepoint avait achevé le cycle<br />
<strong>de</strong> son évolution et produit ses chefs-d’œuvre définitifs.<br />
L’expression <strong>de</strong>s passions humaines, que les fondateurs <strong>de</strong><br />
l’opéra, les Caccini, les Peri, les Montever<strong>de</strong> étudiaient et<br />
prétendaient rendre d’après les doctrines <strong>de</strong>s Grecs, semblait<br />
un terrain aussi neuf que la musique même. Montever<strong>de</strong> et ses<br />
contemporains avaient tout à créer : leur art et la langue <strong>de</strong><br />
leur art. On <strong>de</strong>meure émerveillé, après trois siècles, <strong>de</strong> l’énergie<br />
<strong>de</strong> leurs efforts et <strong>de</strong> la hauteur où ils les avaient portés.<br />
Les innovations <strong>de</strong> Montever<strong>de</strong> dans le fond et dans la<br />
forme sont en rapport direct avec celles <strong>de</strong> Lulli, <strong>de</strong> Rameau,<br />
<strong>de</strong> Gluck et <strong>de</strong> Wagner. Le musicien <strong>de</strong> Crémone fut le premier<br />
d’une gran<strong>de</strong> lignée et l’égal <strong>de</strong> ses frères en génie. Sa<br />
conception du drame est grandiose, presque austère. Le<br />
chœur final <strong>de</strong> l’Orfeo résume le sens élevé que le poète et le<br />
musicien donnent au mythe antique : Orphée vainquit l’enfer<br />
mais fut dompté par l’amour. Seul l’homme qui triomphe <strong>de</strong><br />
lui-même remporte l’éternelle victoire. Et, malgré quelques<br />
intermè<strong>de</strong>s, <strong>de</strong> caractère pastoral, l’œuvre entière gar<strong>de</strong> un<br />
89