Ce fleuve qui nous sépare - Eux et nous
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Pour r<strong>et</strong>rouver la grande audience de naguère <strong>et</strong> casser l'étau de Nezzar, le FIS aurait dû<br />
toutes affaires cessantes répondre aux préoccupations des gens, <strong>et</strong> revenir à ces<br />
moutons. Mais vous étiez ailleurs, entre la dépouille de l'âne <strong>et</strong> la chamelle du<br />
Prophète 17.<br />
Et vous vous êtes r<strong>et</strong>rouvés vous-mêmes sinon dans le fisq, du moins dans le divorce<br />
d'avec votre peuple. Regardez ce signe. Vous avez gagné les municipales quelques jours<br />
après des opérations de n<strong>et</strong>toyage de rues <strong>et</strong> de vidages de poubelles où vous avez<br />
pallié aux insuffisances étatiques, à la satisfaction des citoyens. Un an plus tard, jours<br />
pour jours, les éboueurs algérois de l'APC FIS sont en grève, <strong>et</strong> votre action amène la<br />
prolifération des ordures. Comprenez-vous ? 18<br />
Le troisième round<br />
« Je me déclare hors-la-loi » dites-vous... Les jeux sont faits.<br />
Au lendemain de l'Aïd el-Adha (22 juin) l'armée exige que soient ôtée des frontons des<br />
mairies FIS la devise « Commune islamique », <strong>et</strong> réaffichée celle de la République :<br />
« Par le Peuple <strong>et</strong> pour le Peuple ». La première devise répond au vœu de l'électorat<br />
majoritaire, la seconde est un p<strong>et</strong>it bijou de cynisme, mais quelle importance ? L'armée<br />
frappe son dernier coup, au jarr<strong>et</strong>. Les mercenaires de la prébende vont à l'arrachage<br />
des panneaux avec le souci de la provocation maximale. Et ça marche. Les jeunes des<br />
ruelles réagissent comme si on leur croch<strong>et</strong>ait le cœur. L'intifadha reprend, farouche,<br />
désespérée. Belcourt, fief des durs, des Afghans, devient le foyer de l'incendie.<br />
Quelques maires FIS prennent les journalistes à témoin : pourquoi des inscriptions<br />
françaises sont-elles autorisées illégalement aux entrées de mairies RCD ? Pourquoi la<br />
justice ne trancherait-elle pas le litige ? Comme si en c<strong>et</strong>te heure il était question de<br />
droit ! Comme si les lois, l'armée algérienne ne les avait pas toujours foulées aux pieds<br />
chaque fois que son intérêt lui semblait menacé ! Comme si le pauvre Ghozali allait<br />
s'autoriser à contrarier Nezzar !<br />
17. Le FIS a réclamé avec constance, en compagnie de toutes les forces politiques à l'exception du FLN,<br />
des élections présidentielles anticipées. Le FIS illustra sa demande en brandissant lors de marches une<br />
paire de tenailles géantes, pour arracher "le clou de J'ha". J'ha (Jeha, Djouha,...) est le héros d'une<br />
foultitude d'histoires comiques dont l'aire d'extension dépasse le Maghreb ; beaucoup sont de riches<br />
aphorismes philosophiques. Dans une histoire, J'ha vend sa maison à un voisin, à l'exception d'un clou<br />
fiché dans une cloison. Le voisin accepte sans peine que ce pauvre clou demeure propriété de J'ha,<br />
jusqu'au jour où J'ha vient y suspendre la dépouille d'un âne mort <strong>qui</strong> empoisonne l'atmosphère. Lié par<br />
contrat, le voisin se voit bientôt contraint de revendre à perte sa maison à J'ha. On n'a pas la maison<br />
(l'Algérie) tant qu'on n'a pas le clou (Chadli)<br />
Au temps de l'Hégire, le Prophète arrivant à Yathrib se laissa mener par sa chamelle ; l'endroit où elle<br />
s'arrêta fut choisi pour construire la première mosquée de l'Islam, Yathrib devint Medinat an-Nabi, la Ville<br />
du Prophète, <strong>et</strong> en ce jour na<strong>qui</strong>t le premier Etat d'Islam.<br />
18 . En tout cas le Dr Sadi semble avoir bien compris, si l'on en croit ses paroles du 3 juin à Souk el-Tenine<br />
: "l'environnement est sale", il faut l'épurer de ses "sal<strong>et</strong>és", la participation du RCD aux élections est<br />
dictée non seulement par des motivations politiques mais par des "considérations écologiques" (H, 5-06-<br />
1991). Tout un programme.<br />
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