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Ce fleuve qui nous sépare - Eux et nous

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Contrepoint<br />

Pourquoi ne pas dire, en contrepoint de mon discours, que les communistes, <strong>qui</strong> ne<br />

sont aujourd'hui que bien p<strong>et</strong>ite escouade, s'élancèrent avec foi dans la Révolution<br />

agraire, pour écrire une page de belle sincérité <strong>et</strong> d'un gros amour vrai de la nouvelle<br />

Algérie ?<br />

Le Premier ministre Sid-Ahmed Ghozali, dans les moments où il avouait, hélas toujours<br />

devant de p<strong>et</strong>ites assemblées, jamais à la télévision, qu'il était dans l'impasse <strong>et</strong><br />

l'impossibilité de la réforme, s'ouvrait, <strong>et</strong> à voix basse montrait avec éclat la concision de<br />

sa compréhension, aidé de la séduction calme du vrai pédagogue.<br />

Gardons-<strong>nous</strong> également de considérer les généraux comme des tyranneaux assoiffés<br />

d'or. Ils ont vu les démocrates crier « démocratie ! », les islamistes « daoula<br />

islamiya ! », tout cela ne semblait pas faire bon ménage, ils ont mis tout le monde<br />

d'accord par K.O. Il est une règle non écrite du monde arabe : quand on a le pouvoir, on<br />

ne le lâche pas. On est en droit d'espérer que ça change, pour que l'Algérie, en s'autoorganisant,<br />

affronte ses problèmes. Les généraux, dont la puissance est l'argument<br />

maître, exigent donc de la démocratie qu'elle soit plus forte qu'eux. Pourquoi pas ?<br />

Dans toute société humaine, l'ensemble des paramètres, culturels, politiques,<br />

économiques, sociaux, sont solidaires les uns des autres pour figurer l'é<strong>qui</strong>libre global.<br />

L'acte des généraux ne peut être considéré négativement en rationalité qu'à la condition<br />

de penser les islamistes <strong>et</strong> les démocrates capables de proposer une autre donne de<br />

l'ensemble des cartes.<br />

Le 11 janvier est l'histoire d'un débat <strong>qui</strong> n'a pas eu lieu. Islamistes <strong>et</strong> anti-islamistes se<br />

sont diabolisés mutuellement. Diabolisation veut dire ignorance. Chacun a désiré ignorer<br />

le poids de l'autre. Les islamistes n'ont vu dans les « mécréants » qu'un infime groupe<br />

prédateur : l'Islam ne s'imposait-il pas tout naturellement ? Les anti-islamistes<br />

occupent leur existence à se faire croire que l'islamisme est éphémère, conjoncturel, <strong>et</strong><br />

déjà mort. Les résultats du 26 décembre, <strong>qui</strong> auraient dû constituer un rappel solennel<br />

du réel, ont été immédiatement niés par les modernistes. Le débat n'avait pas eu lieu,<br />

<strong>et</strong> tout à coup, il était trop tard.<br />

Et pourtant, que les chances étaient grandes !<br />

A l'heure de la répression de masse, des plumitifs du modernisme écriront : « Après le<br />

26 décembre, on n'entendait que le mot djihad dans les mosquées ! » Faux, archi-faux.<br />

On n'entendait que le mot sabr, c'est-à-dire patience, constance. Pendant que les<br />

islamistes guidés par Abdelkader Hachani arpentaient à vives enjambées les voies du<br />

légalisme, un extrémisme imprévu, la passion moderniste, effondra toutes les chances<br />

du salutaire débat 21. <strong>Ce</strong>ux <strong>qui</strong> ont suivi jour après jour les trois années de la démocratie<br />

21. Avant ces événements, <strong>nous</strong> parlant du monde arabe, Burhan Ghalioun notait : "L'intégrisme islamique<br />

trouve son répondant dans un intégrisme anti-islamique de plus en plus virulent que le Monde arabe<br />

découvre pour la première fois à son grand étonnement. <strong>Ce</strong>t intégrisme sert en eff<strong>et</strong> comme base de<br />

ralliement, ou plutôt de dépassement des oppositions, contradictions <strong>et</strong> conflits divisant traditionnellement<br />

c<strong>et</strong>te élite moderniste." Op 40.<br />

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