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anaLyse de la vioLence armée au burundi

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ANALYSE DE LA VIOLENCE ARMÉE AU BURUNDI<br />

Au nive<strong>au</strong> individuel, <strong>la</strong> violence <strong>armée</strong> génère d’importants coûts médic<strong>au</strong>x,<br />

juridiques et soci<strong>au</strong>x. Les frais médic<strong>au</strong>x consécutifs à une p<strong>la</strong>ie par balle<br />

avoisinent les 400 USD, et un avocat <strong>de</strong>man<strong>de</strong> en moyenne entre 200 et 500<br />

USD pour assurer <strong>la</strong> défense d’un client—<strong>de</strong>s prix exorbitants dans un pays<br />

où entre 41 et 90 % <strong>de</strong> <strong>la</strong> popu<strong>la</strong>tion vit en-<strong>de</strong>ssous du seuil <strong>de</strong> p<strong>au</strong>vreté 11 . A<br />

ce<strong>la</strong> s’ajoutent les conséquences psychologiques <strong>de</strong>s actes <strong>de</strong> violence, dans<br />

un pays qui ne dispose pratiquement d’<strong>au</strong>cune structure d’accueil ni <strong>de</strong><br />

mé<strong>de</strong>cins psychiatres, et où les victimes sont souvent stigmatisées par <strong>la</strong><br />

société—c’est le cas, notamment, <strong>de</strong>s femmes victimes <strong>de</strong> violences sexuelles.<br />

b) evolution <strong>de</strong>s perceptions liées à <strong>la</strong> sécurité (2005–2008)<br />

Depuis l’étu<strong>de</strong> sur les armes légères <strong>au</strong> Burundi entreprise en 2005 (Pézard<br />

et Florquin, 2007), un certain nombre <strong>de</strong> changements positifs sont à noter :<br />

Les perceptions à l’égard <strong>de</strong>s armes ont évolué <strong>de</strong>puis 2005, avec un plus<br />

grand nombre <strong>de</strong> personnes interrogées qui considèrent en 2008 que les<br />

armes représentent davantage un danger qu’une source <strong>de</strong> protection.<br />

Les résultats <strong>de</strong> l’enquête montrent une opinion re<strong>la</strong>tivement stable en<br />

matière <strong>de</strong> désarmement, et <strong>au</strong>ssi désireuse en 2008 qu’en 2005 <strong>de</strong><br />

participer à un programme <strong>de</strong> désarmement.<br />

Ces <strong>de</strong>ux éléments suggèrent qu’il est plus opportun que jamais d’investir<br />

dans un programme <strong>de</strong> désarmement <strong>de</strong> <strong>la</strong> popu<strong>la</strong>tion civile.<br />

Ce rapport fait néanmoins <strong>la</strong> lumière sur <strong>de</strong>s difficultés majeures qui<br />

persistent, et sur <strong>de</strong> nouve<strong>au</strong>x problèmes qui sont apparus <strong>au</strong> cours <strong>de</strong>s trois<br />

<strong>de</strong>rnières années :<br />

Le dilemme entre sécurité et désarmement est toujours présent. Si<br />

l’enquête <strong>de</strong> 2008, comme celle <strong>de</strong> 2005, suggère que <strong>la</strong> popu<strong>la</strong>tion<br />

soutient très <strong>la</strong>rgement le désarmement <strong>de</strong>s civils et déc<strong>la</strong>re qu’elle<br />

adhérerait sans réserve à un tel programme, d’<strong>au</strong>tres éléments suggèrent<br />

qu’en réalité, un retour re<strong>la</strong>tif <strong>de</strong> <strong>la</strong> sécurité est une condition<br />

préa<strong>la</strong>ble indispensable à cette participation.<br />

Malgré <strong>de</strong>s avancées très positives vers un règlement définitif du conflit<br />

opposant le Palipehutu-FNL et le gouvernement du Burundi, <strong>la</strong> situation<br />

reste encore vo<strong>la</strong>tile et crée un climat d’incertitu<strong>de</strong> favorable à l’insécurité<br />

; <strong>de</strong>s actes <strong>de</strong> banditisme sont commis par <strong>de</strong>s hommes en uniforme<br />

qui peuvent être <strong>de</strong>s membres <strong>de</strong> l’<strong>armée</strong> (<strong>la</strong> Force <strong>de</strong> défense nationale,<br />

FDN), <strong>de</strong>s rebelles, ou simplement <strong>de</strong>s civils se faisant passer pour l’une<br />

ou l’<strong>au</strong>tre <strong>de</strong> ces catégories. Il est urgent d’arriver à un accord <strong>de</strong> paix qui<br />

fasse du Burundi un pays réellement en situation post-conflit.<br />

Les anciens combattants (<strong>au</strong>ssi appelés démobilisés) sont be<strong>au</strong>coup<br />

plus stigmatisés en 2008 qu’ils ne l’étaient en 2005. Cités <strong>au</strong> cours <strong>de</strong><br />

l’enquête comme <strong>la</strong> première catégorie <strong>de</strong> personne possédant <strong>de</strong>s<br />

armes à feu, avant même les militaires ou les policiers, ces anciens<br />

combattants qui connaissent une réintégration socio-économique<br />

difficile sont accusés <strong>de</strong> pratiquer le banditisme, <strong>de</strong> louer leurs services<br />

et leurs armes <strong>au</strong>x criminels, <strong>de</strong> servir <strong>de</strong> tueurs à gages, et <strong>de</strong> représenter<br />

en général une source majeure d’insécurité. Ces allégations difficilement<br />

vérifiables entraînent une marginalisation <strong>de</strong>s démobilisés, qui ne<br />

sont plus considérés comme <strong>de</strong> simples « civils » mais forment un groupe<br />

à part. Dans un contexte <strong>de</strong> réduction <strong>de</strong>s effectifs <strong>de</strong> <strong>la</strong> police et <strong>de</strong><br />

l’<strong>armée</strong> et <strong>de</strong> négociations visant à démobiliser les combattants du<br />

Palipehutu-FNL (<strong>de</strong>ux mesures qui ne peuvent qu’accroître le nombre <strong>de</strong><br />

démobilisés), il est urgent <strong>de</strong> développer <strong>de</strong>s programmes qui ciblent<br />

particulièrement ce groupe à risque.<br />

c) comment lutter contre <strong>la</strong> violence <strong>armée</strong> ?<br />

Pour contrecarrer cette situation, une lutte peut être engagée sur plusieurs<br />

fronts : il s’agit <strong>de</strong> renforcer les institutions <strong>de</strong> sécurité et <strong>de</strong> justice, <strong>de</strong><br />

réduire <strong>la</strong> vulnérabilité <strong>de</strong>s popu<strong>la</strong>tions à risque, et <strong>de</strong> prendre <strong>de</strong>s mesures<br />

visant à réduire le nombre d’armes en circu<strong>la</strong>tion parmi les civils.<br />

Renforcer les capacités <strong>de</strong> sécurité et <strong>de</strong> justice :<br />

La police nationale burundaise (PNB) a besoin d’effectifs plus réduits,<br />

mieux payés et mieux formés. De plus faibles effectifs sont plus faciles à<br />

encadrer, ce qui permettrait <strong>de</strong> mieux appliquer les sanctions disciplinaires<br />

lorsque celles-ci s’imposent. Mieux payés, certains policiers seraient<br />

moins tentés <strong>de</strong> prendre le risque d’arrondir leurs fins <strong>de</strong> mois en faisant<br />

un usage illicite <strong>de</strong> leur arme. Une meilleure formation <strong>au</strong>rait pour<br />

conséquence une plus gran<strong>de</strong> confiance <strong>de</strong> <strong>la</strong> popu<strong>la</strong>tion dans <strong>la</strong> police,<br />

et davantage <strong>de</strong> chances d’arriver <strong>au</strong>x objectifs du p<strong>la</strong>n stratégique <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

PNB 2007-2017 qui vise à faire <strong>de</strong> <strong>la</strong> police une institution « républicaine,<br />

mo<strong>de</strong>rne, professionnelle et <strong>de</strong> proximité » (Nzosaba, 2008b).<br />

La lutte contre l’impunité dont bénéficient certains <strong>au</strong>teurs <strong>de</strong> violences<br />

doit <strong>de</strong>venir une priorité. Les victimes hésitent à porter p<strong>la</strong>inte en raison<br />

<strong>de</strong>s coûts qu’une telle démarche implique et par peur <strong>de</strong>s représailles.<br />

31<br />

SYNThèSE<br />

i<br />

ii<br />

iii<br />

iv

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