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Education pour un monde nouveau - Maria Montessori

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aussi doucement parce que votre poitrine est plus large. » À ce moment je<br />

pensai qu’ils allaient rire, mais pas du tout. Ils tinrent leurs pieds parfaitement<br />

immobiles et même ils contrôlèrent leur respiration de façon à ne faire auc<strong>un</strong><br />

bruit et tous me regardaient avec le plus grand sérieux. Je dis alors : « Je vais<br />

m’en aller très tranquillement, mais le bébé sera plus tranquille que moi ; il<br />

ne fera auc<strong>un</strong> mouvement, ni auc<strong>un</strong> bruit. » Je ramenai le petit à sa mère puis<br />

retournai auprès des enfants, <strong>pour</strong> les trouver toujours immobiles avec <strong>un</strong>e<br />

expression sur leur figure qui disait : « Vous voyez, vous avez fait <strong>un</strong> peu de<br />

bruit, mais nous pouvons être tout aussi tranquilles que ce bébé. » Ainsi tous<br />

les enfants avaient la même volonté ; ils furent tous poussés à faire la même<br />

chose et le résultat fut <strong>un</strong>e classe de quarante-cinq, parfaitement immobile et<br />

silencieuse. On aurait pu se demander comment cette admirable discipline<br />

avait été réalisée quand mon intention avait seulement été de faire rire les<br />

enfants. Le silence était si étonnant que je dis : « Quel silence ! » ; il semblait<br />

que les enfants ressentaient aussi sa qualité et ils restaient immobiles,<br />

contrôlant leur respiration ; et alors je commençai à entendre des sons que je<br />

n’avais pas remarqués auparavant, comme le tic-tac de la pendule, l’eau qui<br />

coulait goutte à goutte d’<strong>un</strong> robinet extérieur et le bourdonnement des<br />

mouches. Ce silence causa <strong>un</strong>e grande joie aux enfants et devint le point de<br />

départ d’<strong>un</strong>e caractéristique de nos écoles. C’est par là qu’on put mesurer la<br />

force de volonté des enfants et c’est en s’exerçant à le faire que la volonté<br />

devint plus forte et la période de silence s’allongea. Bientôt l’on ajouta<br />

quelque chose : nous murmurions le nom de chac<strong>un</strong> des enfants et, à cet<br />

appel, chac<strong>un</strong> venait sans bruit tandis que les autres restaient tranquilles ;<br />

étant donné que chac<strong>un</strong> venait avec précaution et lenteur en s’efforçant de ne<br />

faire auc<strong>un</strong> bruit, le dernier enfant appelé devait attendre longtemps. Ces<br />

enfants se montrèrent capables d’<strong>un</strong>e puissance d’inhibition bien plus grande<br />

que celle de la plupart des adultes ; or c’est la volonté et l’inhibition qui<br />

permettent l’obéissance.<br />

J’avais involontairement encouragé ce premier silence en apportant le<br />

bébé mais je ne pouvais pas toujours compter sur <strong>un</strong> tel visiteur et je voulais<br />

renouveler l’intérêt. Je trouvai que le meilleur moyen était de demander :<br />

« Aimeriez-vous faire le silence ? » Immédiatement, c’était le grand<br />

enthousiasme et je m’aperçus que je pouvais commander le silence et être<br />

obéie. L’expérience d’<strong>un</strong>e maîtresse qui avait déjà enseigné quelque dix ans<br />

est intéressante sous ce rapport. Elle s’aperçut qu’elle devait faire attention à<br />

ne pas donner d’ordres par avance comme : « Rangez tout avant de partir ce

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