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(1) Michel Onfray - Théorie de la dictature-Robert Laffont (2019)

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que les victimes de cette fausse information la répandent dès leur retour. Le

régime marxiste-léniniste faisait de même avec des hôtes de marque,

notamment des intellectuels qui ont été nombreux à se goberger aux frais du

bolchevisme pendant des décennies avant de s’en faire les ardents

propagandistes de retour dans le monde dit libre.

X : Le sang versé par les cochons pour faire régner la terreur parmi les

animaux rappelle que le régime soviétique a abondamment pratiqué les

purges et la terreur en inquiétant, persécutant, tabassant, torturant,

déportant, exécutant, jusque parmi ses partisans. Pour que la terreur soit

efficace, il ne faut pas qu’elle s’attaque aux seuls coupables, il faut qu’elle

n’épargne surtout pas les innocents. Quand Malabar, qui est le prototype de

l’ouvrier abruti zélé, borné et productiviste, obéissant et bas du front,

propagandiste du pouvoir et dévot de son tyran, se fait attaquer par la police

politique de Napoléon, il n’est évidemment coupable de rien ! Du fait de

son innocence, il apparaît comme une victime idéale, car, puisque chacun

sait qu’il n’a rien à se reprocher mais que le pouvoir le décrète peccamineux

et reprochable, n’importe qui a du souci à se faire et pas seulement les

fautifs. Le spectacle de la punition de l’innocent terrorise le spectateur.

C’est alors que le gouvernement terroriste atteint son but qui est de

soumettre la totalité des sujets à sa férule afin d’obtenir une servitude

volontaire. Le pouvoir veut qu’on ait peur de lui et, pour ce faire, rien de

mieux que le châtiment de l’immaculé. La mise en cause de Malabar

rappelle celle de Kamenev, Zinoviev, Kirov et de tant d’autres lors de la

Grande Terreur stalinienne des années 30 – qui fit pas loin de un million de

morts…

Y : L’autocritique des sujets du pouvoir fait partie du dispositif de la

terreur : devant une brochette de juges révolutionnaires, le supposé

coupable, la plupart du temps considéré comme un coupable avéré, y

confesse publiquement des fautes, véritables ou imaginaires, afin d’obtenir

une rémission du pouvoir qui montre ainsi sa grandeur, sa magnanimité,

mais aussi sa rigueur, sa force, sa résolution, donc sa puissance, c’est-à-dire

sa toute-puissance. La confession débouche sur une absolution ou sur une

damnation, mais l’absolution ne présume pas qu’il n’y aura pas damnation

quelque temps plus tard ! Il s’agit d’humilier, d’abaisser, de rabaisser,

d’avilir, afin de montrer publiquement qui a le pouvoir de vie et de mort sur

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