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Aerosmith – Night in the Ruts (1979)<br />
Ah cette fin des années 70 ! Quelle rigolade tout<br />
de même… La drogue a usé tout le monde, le<br />
fric a pourri le système et les groupies ont pompé<br />
toutes les rock stars mâles (vous pouvez mélanger<br />
ces trois propositions, ça fonctionne aussi bien !),<br />
parano maxi et inspiration dans les chaussettes<br />
deviennent le dénominateur commun de musiciens<br />
en errance. Les dinosaures ne vont pas tarder à<br />
s’éteindre, mais tentent le tout pour le tout. Avant<br />
de crever la gueule ouverte, quelques bandes de<br />
voyous mal attifés et mal coiffés tirent leurs dernières<br />
cartouches avant le grand n’importe quoi des<br />
années 80. Aerosmith n’échappe pas à la règle. Le<br />
groupe de sales mioches de Boston, mené tambour<br />
battant par le chanteur Steven Tyler et le guitariste<br />
Joe Perry, a déjà cinq albums studio et un live dans<br />
sa besace. Les plus très fringants rockers sont fatigués,<br />
la came leur fait perdre la tête. Du reste, Joe<br />
et Steven sont, à juste titre, surnommés les « Toxic<br />
Twins » (les jumeaux toxiques) et l’explosion en plein<br />
vol est proche. Le guitariste Joe Perry quitte officiel-<br />
lement ses potes de fiesta pour monter le Joe Perry<br />
Project durant les sessions, alors que la bande de<br />
manouches est également en tournée. Il est remplacé<br />
par Richard Supa et Jimmy Crespo. Du coup,<br />
on ne sait pas trop qui fait quoi sur ce Night in the<br />
Ruts (facile contrepèterie de Right in the Nuts, doisje<br />
traduire ?). Même du côté de la production c’est la<br />
valse, Jack Douglas aux manettes depuis Get your<br />
Wings est remplacé manu-militari par Gary Lyons<br />
sur ordre de ces messieurs de Columbia Records.<br />
La sortie a lieu en novembre 1979, pratiquement<br />
dans l’indifférence générale et le single Remember<br />
(Walking in the Sand) peine à se faire entendre. Malgré<br />
tout, fort de leur réputation scénique, le 5 majeur<br />
de Boston s’embarque pour une tournée marathon<br />
(sans son guitariste mythique évidemment, Crespo<br />
officiant à sa place), où il ne manquera pas de réussir<br />
à toucher le fond à plusieurs reprises, notamment<br />
grâce à l’inénarrable Steven Tyler, toujours partant<br />
quand il s’agit de se casser la figure ou de faire un<br />
malaise sur scène. Le reste ne sera qu’une vaste<br />
pantalonnade, Brad Whitford quitte le navire (plus<br />
très étanche à vrai dire), Tyler a son accident de<br />
moto… Mais coûte que coûte, Aerosmith aura traversé<br />
les ans et attaque on ne sait trop comment sa<br />
cinquième décennie d’activités, certes un peu moins<br />
toxiques et créatives, mais toujours avec la même<br />
rage. Et puis restent les albums, inégaux, sales, bancals,<br />
mais qui recèlent toujours leurs lots de pépites<br />
inestimables qu’il est bon de sortir du coffre-fort<br />
de temps à autre. Aujourd’hui, je vous propose de<br />
revisiter Night in the Ruts, critiqué de toutes parts,<br />
descendu en flèche, mais droit dans ses bottes. Oui,<br />
c’est la fin d’une époque, les vaillantes années 70 ne<br />
vont pas tarder à rendre l’âme aussi je vous invite à<br />
ne pas jeter ce LP aux orties, car, pour paraphraser<br />
Hubert-Félix Thiéfaine, c’est exactement comme si<br />
le groupe avait lancé ses « dernières balises avant<br />
mutation. »<br />
<strong>Vapeur</strong> <strong>Mauve</strong><br />
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