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<strong>Vapeur</strong> <strong>Mauve</strong><br />
88<br />
Qu’on soit punk, métalleux, grunge ou pop, on a tous besoin de s’échapper d’une<br />
prison-société. Les ingrédients sont différents mais l’élixir reste foncièrement le<br />
même.<br />
Béatrice : Comment les as-tu contactés et par quel biais avez-vous<br />
communiqué ?<br />
Pascal : Je suis allé là où il y a, à mon avis, le maximum de chances que je<br />
puisse trouver les personnes qui correspondaient à ce que je cherchais : les<br />
forums. Les forums Internet regroupent en effet des communautés de fans,<br />
qui, si elles ne sont parfois pas elles-mêmes concernées, ont su tisser un vaste<br />
réseau sur la toile. Le bouche à oreille peut ainsi fonctionner. Parfois, c’était des<br />
connaissances (je pense aux journalistes qui nous dévoilent quelque peu de<br />
leur intimité), d’autres, le hasard. Le hasard qui fait qu’en discutant avec des<br />
gens, on se rend soudainement compte qu’ils ont une histoire savoureusement<br />
rock à raconter… Par exemple, je me souviens que mon propre médecin m’a<br />
avoué avoir vu plusieurs fois Led Zeppelin en concert dans sa jeunesse. Même<br />
si je n’ai pu intégrer cette info arrivée trop tard, c’est l’exemple même du hasard<br />
le plus total qui peut amener les histoires les plus impensables.<br />
Béatrice : Comment t’est venue l’idée d’écrire ce livre ?<br />
Pascal : Après avoir écrit Rock Stories, recueil de nouvelles biographiques sur<br />
les groupes de rock français (dont je suis d’ailleurs en train de finir le tome 3), j’ai<br />
voulu approcher un autre angle du rock : celui qui est hélas si souvent moqué et<br />
tourné en dérision : les fans. Comme je le disais au-dessus, on nous abreuve de<br />
clichés plus absurdes les uns que les autres dans le seul but de vendre toujours<br />
plus. Bien sûr il n’y a pas de fumée sans feu, mais tout cela est d’une part<br />
grandement exagéré et d’autre part ne représente qu’une infime partie d’une<br />
énorme majorité de fans qui ne se reconnaissent pas dans ceux qui sont parmi<br />
les plus extravagants. Donc j’ai voulu, j’ai essayé de prendre le contre-pied de<br />
cela en démontrant que l’on peut être fan d’un artiste ou d’un groupe en vivant<br />
sa passion le plus intensément possible, tout en gardant, bien entendu, la tête<br />
sur les épaules.<br />
Béatrice : Quelle est ta propre définition d’un fan ?<br />
Pascal : On a tous besoin d’une échappatoire. La société est quelque chose<br />
de tellement complexe… Elle peut parfois être si rigide. On tend vers toujours<br />
plus de moralité alors que bien même ceux qui nous dirigent eux le sont de<br />
moins en moins (ou du moins, on le découvre de plus en plus)… Mais la moralité<br />
dans notre quotidien s’est érigée en un principe duquel il est parfois mal vu de<br />
diverger. Ainsi, ces idoles sont pour nous des gens qui ont fait ce que l’on aurait<br />
tant aimé faire : être quelqu’un qui a su briser certains codes. Le rockeur est<br />
une personne parfois faite dans l’excès et d’excès. Que ce soit dans le look<br />
ou le style de vie, sa façon d’être sorti des normes établies, et ne respecte pas<br />
toujours ces fameuses règles de bienséance dont je parlais au-dessus. Un fan<br />
est quelqu’un qui a besoin de rêver, de sortir de la routine du quotidien. Un fan<br />
est quelqu’un qui regarde cette Lumière avec envie et passion, qui, parfois, lie<br />
son sort de trop près à son Icare et suit par là même sa chute du soleil. Bref,<br />
être fan, c’est vouloir respirer plus vite, plus fort, sentir son pouls s’accélérer,<br />
s’échapper, ne serait-ce qu’un court instant du devoir social imposé…<br />
Béatrice