Rapport BIT sur Haiti - International Labour Organization
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contraintes de la fiscalité nationale. Toutefois la masse de travailleurs impliquée est trop<br />
importante pour que l’État, dans son rôle d’acteur de cohésion nationale, ne puisse pas les<br />
insérer dans un système de protection sociale. La croissance fulgurante de l'économie<br />
informelle dans le pays éloigne la perspective d'une incorporation d'un nombre significatif<br />
de ces travailleurs dans le régime formel de sécurité sociale. Il est indéniable que le secteur<br />
informel est une source de travail et de revenus pour la grande majorité des personnes sous<br />
qualifiées. Cependant il faut aussi admettre que cela implique peu de création de richesses.<br />
Cette réalité est liée à la faiblesse des capitaux et des qualifications. Malgré tout, le secteur<br />
informel a pour atout une capacité indéniable d’adaptation aux mutations économiques et<br />
aux crises. Une extension de la protection sociale vers ces travailleurs ne peut être que<br />
bénéfique pour le pays.<br />
Une couverture sociale qui n’intègre pas la paysannerie. Le secteur agricole est en grande<br />
partie constitué de petites propriétés familiales. Il est un vivier essentiel de l’auto-emploi.<br />
Mais malheureusement le paysan haïtien qui a travaillé toute sa vie pour as<strong>sur</strong>er la<br />
production et <strong>sur</strong>tout pour satisfaire les besoins alimentaires des centres urbains, n’a droit à<br />
aucune compensation sociale. Il ne bénéficie pas de la retraite et n’est couvert par aucune<br />
as<strong>sur</strong>ance. La paysannerie qui est une partie prenante majeure de l’économie nationale<br />
d’Haïti se retrouve en dehors de la solidarité nationale qui passe par l’accès à la protection<br />
sociale. Les formes de protection sociale moderne contre ce qu'il est convenu d'appeler les<br />
risques sociaux (maladie, accident, maternité, enfance, invalidité, vieillesse, chômage) ne<br />
furent pris en compte en Haïti qu’à partir de la fin des années 60, essentiellement pour<br />
répondre aux besoins nouveaux des travailleurs salariés de l'industrie naissante implantée<br />
dans les périphéries de Port-au-Prince. En 2010, autrement dit 40 ans plus tard, la nation<br />
haïtienne doit décider de l'opportunité d'inclure la catégorie la plus nombreuse de<br />
travailleurs indépendants de son économie, les paysans, dans un système de protection<br />
sociale. Les formes de solidarité traditionnelle au sein de la famille et du voisinage, l'entraide<br />
ainsi que la prévoyance individuelle liée à la propriété qui sont organisées dans le monde<br />
rural sont essoufflées. La prise en charge sociale de la maladie, des accidents ou la retraitevieillesse<br />
des agriculteurs devient une nécessité si l’on veut intégrer le monde rural et<br />
paysan dans la reconstruction et le développement national.<br />
Un système de sécurité sociale qui ne prend pas en compte le chômage. Le pays accuse un<br />
taux de chômage extrêmement sévère. Si les estimations, par rapport à la réalité du<br />
chômage, sont plurielles, on s’accorde <strong>sur</strong> un taux moyen de 40%. Il est nécessaire pour le<br />
pays de penser un système de prise en charge du chômage. L’objectif est d’offrir à chaque<br />
citoyen à la recherche d’un emploi le droit à une indemnisation ou à un accompagnement.<br />
Cette avancée sociale ne sera toutefois possible que si l’Etat réunit tous les acteurs<br />
concernés (entreprises, centres de formation), afin de définir leurs champs de<br />
responsabilités respectives et de mettre en cohérence leurs interventions. Dans ce cadre là il<br />
est nécessaire d’avoir une formation publique prise en charge par les cotisations patronales<br />
et la création des budgets de formation professionnelle gratuite, ouverte à tous, et<br />
rémunérée. Elle ne sera juste et efficace que si l’État reconnaît que lutter efficacement<br />
contre ce fléau qu’est le chômage nécessite des ressources accrues et qu’en même temps<br />
cette prise en charge va faire office d’aide à la consommation. Cette dernière sera très<br />
certainement une bouffée d’oxygène pour la production nationale. Il faut aller vers la<br />
protection sociale des sans-emploi. L’État haïtien ne peut pas laisser à la famille seule le<br />
poids de la prise en charge du chômage.<br />
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