Les tribulations d'un sinophile dans la Chine républicaine Le ... - AFEC
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<strong>Le</strong> musicien et pédagogue Alfred Westharp<br />
l'Occident matérialiste. D aboutit à ce constat, alors que le comparatisme<br />
culturel, à l'époque un véritable sport développé à l'échelle mondiale,<br />
battait son plein. Bien qu'il se fût joint à <strong>la</strong> critique culturelle des protagonistes<br />
du Quatre Mai, il ne revendiquait ni l'occidentalisation qu'il abhorrait<br />
ni l'abandon de <strong>la</strong> culture chinoise, mais plutôt le rétablissement des<br />
origines authentiques de celle-ci, se rapprochant ainsi des tentatives de<br />
nombreux « conservateurs » de l'époque, parmi lesquels on peut compter<br />
Liang Shuming 34 . Dans cette optique, Westharp demanda à ses élèves de<br />
porter des tenues chinoises traditionnelles, et, raconte encore M. Ji, de se<br />
rendre tous les dimanches au « service » du temple confucéen près de<br />
l'école. Westharp portait toujours des vêtements et des chaussures chinois,<br />
ne mangeait jamais à l'occidentale et n'entretenait aucun rapport<br />
avec les autres étrangers de <strong>la</strong> ville, pour <strong>la</strong> plupart des missionnaires.<br />
Il assurait de plus lui-même l'enseignement des C<strong>la</strong>ssiques chinois.<br />
Pour ce<strong>la</strong>, il devait avoir recours à ses col<strong>la</strong>borateurs enseignant à l'école,<br />
car, bien que par<strong>la</strong>nt correctement le chinois quotidien, il ne lisait ni<br />
n'écrivait les caractères. Il tenait à commenter lui-même les C<strong>la</strong>ssiques,<br />
pour pouvoir les interpréter <strong>dans</strong> son sens, et éliminait sans scrupules les<br />
passages qui ne lui convenaient pas. Westharp, qui se vou<strong>la</strong>it « avocat du<br />
confucianisme », se référait <strong>dans</strong> ses discours de préférence à Confucius<br />
pour renforcer sa propre pensée. <strong>Le</strong> « nouvel homme », le junzi des<br />
C<strong>la</strong>ssiques, devait, en suivant l'enseignement de L'invariable milieu,<br />
d'abord « parfaire sa propre nature afin de parfaire <strong>la</strong> nature des autres »<br />
(Zhongyong 22 et 25) 35 . Ainsi, il libérerait sa force créatrice pour communiquer<br />
avec le monde. C'était les professeurs de son époque qui<br />
portaient <strong>la</strong> responsabilité d'éveiller <strong>la</strong> nouvelle génération chinoise. Mais<br />
ceux-ci, critiquait Westharp, ne pratiquaient pas l'harmonie telle qu'elle<br />
est enseignée <strong>dans</strong> les Entretiens de Confucius (par exemple, Lunyu 1/12),<br />
car, d'après lui, ils ne traitaient pas les élèves comme leurs égaux. Ils leur<br />
apprenaient seulement <strong>la</strong> crainte et non <strong>la</strong> liberté, un savoir trop théorique<br />
34 Un résumé bref et c<strong>la</strong>ir des conceptions des divers protagonistes de cette<br />
discussion en <strong>Chine</strong> se trouve <strong>dans</strong> Alitto (1986), p. 75 5*7.<br />
35 Ce passage se réfère à Westharp (1920), p. 6-8.<br />
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