Que me reste-t-il de nos « frasques » ? Une mémoire mêlée, douce-amère. Un flot impétueux d'images qui bouillonnent en moi, me bouleversent, m'horripilent, mais me hantent si fort qu'il me faut vous en parler. Serez-vous curieux de mes impressions à moi ? Du scoop de mes impressions ? Disons que cette longue lettre vous distraira, toi, gourgandin, solitaire à Saint-Etienne, toi, Isa, là-bas à Paris où tu as été si heureuse l'année dernière. Disons que sa seule longueur vous dira, mieux que mes récriminations, que mes jérémiades, que je vous aime et que je pense à vous. Voici : Isa murmurante, très <strong>of</strong>ferte, passive infiniment, mais active aussi, vision troublante. Sa fougue joyeuse, son émoi, sa fente soyeuse, crémeuse, permissive... C'est délectable d'y resonger. Puis la voilà secouée, frénétiquement. Et plaintive. Et inaccessible en même temps, sollicitée par un grand bougre qui m'ordonne de le guider... Odieux. Qui me donne ses doigts à lécher, à sucer, à mouiller pour les lui planter partout... Je n'aime pas ça. (Pardon de ma sincérité.) Ni le geste, ni l'idée, ni le goût, ni la forme de ses doigts dans ma bouche. Je n'aime pas. Et puis je dis : « Isa, et si nos maris nous voyaient ? » Il ajoute : « Et moi, ma femme ! » Il devient adorable à ce moment-là. Adorable quand il déclare en riant à moitié qu'il va se branler comme un fou en repensant à notre séance... Il se donne, se multiplie, triomphe, jubile, bande et rebande, s'éblouit lui-même... Je l'aime. Il me secoue, me dispose, violent et sans égards, sans sollicitude pour ma nuque martyrisée, mon épaule qui ne cesse de brûler. Je le hais. Il est navré. Je le hais. Il m'embrasse avant de partir, avec une douceur inespérée. Il téléphone après. Pour dire la même chose que tout à l'heure : qu'il est navré. C'est déjà beaucoup plus charmant... Isa est curieuse de son coup de fil, attendrie. J'ai mis l'ampli parce que, puisqu'elle est encore là, la communication la concerne aussi. D'ailleurs il dit : « Elle est encore là ? J'aurais pu rester une heure de plus ! » Dieu m'en garde ! Tai détesté, vraiment détesté que l'entrevue dure plus longtemps que prévu, que le gourgandin fasse abdiquer si aisément Isa, lui fasse renoncer à son après-midi de travail. Qu'après, il ait parlé du « pied de guerre » où tout le monde était, à la chercher partout. Détesté l'embarras d'Isa, et son détachement à lui : « Moi, rien vu, rien entendu. Je ne sais rien. » Détesté cette remarque : « Raymond m'a dit que j'avais les yeux brillants. » Je sauve un bout d'intimité avec elle. J'ai envie de me laisser aller complètement, de faire ce que je ne peux jamais faire avec lui, de pleurer, pleurer, pleurer... Mais ça lui gâche sa joie de me voir triste. Et Antoine va rentrer. On fait des sales besognes de femmes adultères. On planque le drap souillé. On range. On aère. On traque les traces, les verres, le plateau... Elle finit par s'en aller. Avec elle, la chaleur disparaît. Je deviens glacée, déserte, figée par mon espèce de défaite, mon espèce d'échec, mon espèce de désillusion. Tu as raison, gourgandin, j'ai été nulle. Peut-être fallait-il que quelqu'un le soit, au début. Je t'aime. Alors je préfère que ça ait été moi. Ça m'est moins difficile à assumer qu'à toi... J’aurais voulu m'abandonner, sinon à la volupté, qui ne se commande heureusement pas, du moins à la tendresse de ces petites confidences d'après l'amour. Il n'y a pas eu d'après (pas d'avant non plus, et ceci implique cela). J'avais une confession à vous faire, drôle, enfin, pas drôle, une confession de gourgandine, qui, peut-être, vous eût indignés, ou fait rire, ou rendus jaloux. Je l'ai gardée, comme j'ai gardé tout le reste, mes cris et ma folie. Je vous la livre ici, sur cette onzième page, où je vous aime bien plus qu'hier (et j'espère bien moins que demain) : le gentil Gabriel m'a dit, très solennellement, très passionnément, oui. Rendez-vous un vendredi après la rentrée. On a parlé de Gabriel, dans le lit. Toi, Isa, tu as eu une petite moue méprisante. Moi j'attends de lui qu'il me repose (qu'il me guérisse) un peu de
vous, c'est-à-dire qu'il refasse de moi ce que je ne devrais jamais cesser d'être : une gourgandine. J'ai commencé à retravailler très sérieusement mon personnage dès hier soir, à la fête du Boulodrome. Je peux vous dire, mes chers amours, que je m'y suis sentie nettement plus à mon avantage qu'entre vous. Et ça m'a fait un drôle de bien. D'abord j'ai rencontré Paul Dubois. Toi Isa, tu ne le connais pas. C'est un grand, très très grand garçon, très gentil, très timide, très fidèle à sa femme qui m'avait fait archiflipper à la Boîte il y a huit ans. C'était avant toi, mon chéri. Nous avons eu, en dansant, un dialogue des plus simples : Moi : -J'ai été très triste quand tu es parti de la Boîte. Lui : - Je le sais (sans affectation, avec son regard humide et doux qui plonge sur moi de très très haut). Moi : - Tu restes un cas unique dans mes annales. Lui :-Parce que je ne suis pas passé à l'acte ? Moi : - Oui. Lui : - Tu es toujours volage ? Moi : - Oui. Lui :-Moi, je ne pourrais ?) pas. Moi : - Tu parles au futur ou au conditionnel ? Lui :-Vraiment, je l'ignore (après une petite minute de réflexion sincère, et quelque chose de si délicieux dans les yeux, comme un trouble, un repentir, un encouragement...)... Alors, raconte, depuis huit ans ? Moi : - T ai aimé très fort un homme, et beaucoup d'autres, beaucoup moins fort. Il hochait la tête. Il avait entendu parler de mon bébé, de mes livres, peut-être bien de l'« homme ». Sans en avoir l'air, il m'a donné toutes les adresses où je peux le joindre. A la fin de la soirée, il a mis sa main sur mon épaule, comme au début. Il a dit au revoir. Je n'avais plus mal du tout. J'ai dansé avec tous les hommes qui me faisaient envie. Deux très jeunes, surtout. <strong>Le</strong> beau Nathanaël, qui me semble si fort réceptif, et le DJ, un Arabe absolument superbe. Il avait mis pour moi un slow que j'adore de Gianna Nannini. Elle chante avec une voix à rendre fou que « questa notte, ti voglio fore
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Et puis, blottie contre lui, je lui
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Il me rattrape dans le couloir, apr
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Chapitre 24 Mardi 11 février J'ai
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prochaine, j'ai essayé de trouver
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catégorique : « Impossible, absol
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