Le Gourgandin - Fran.. - Index of

crèverais plutôt que de recoucher avec lui, jamais, jamais, jamais je ne referai l'amour avec lui, rien que
l'idée me saccage de dégoût... !» Elle a, effectivement, une petite moue nauséeuse, et le feu aux joues.
Mes enfants, à qui j'ai laissé entendre qu'elle avait des problèmes, la regardent partir avec
commisération. Jamais, jamais ! Le frisson farouche de la résolution sans appel lui secoue encore les
omoplates sur le seuil de ma porte.
Le lendemain matin, je la retrouve, jolie et grave. A midi, elle sourit. Nous allons manger chez moi, et
puis, comme mon fils est là qui nous interdit la moindre confidence, comme nous sommes l'une et l'autre
en congé dès le lendemain pour emmener nos chers petits à la neige, comme je ne veux pas que nous nous
quittions si vite, je lui propose de venir prendre le thé avec moi le soir.
Elle arrive à 18 heures. Plus que souriante. Je sais, avant qu'elle ne me le raconte, qu'elle a eu son
entrevue. Sa rancune évolue vers une indulgence amusée, il n'est pas si infect, le gourgandin, il n'est que
bête, et encore, pas tant que ça. Voilà qu'il l'a prise contre lui, et cajolée, et consolée... Elle me racontait
l'instant avec des douceurs partout, dans la voix, le regard, dans ses gestes esquissés, tendres comme si
elle parlait d'un bébé... J'étais heureuse pour elle, sans arrière-pensée, soulagée. Et puis, l'idée qui me
trottait dans la tête depuis des semaines est revenue m'éblouir d'un coup, et j'ai proposé : « Si nous lui
jouions un tour ? Hein ? Si nous le prenions au piège de ses mensonges ? » Elle a battu des mains comme
une petite fille, mon Isa, elle a ri, exulté, envisagé déjà des dates, une mise en scène... Alors nous avons
décidé à la rentrée, enfin, un peu après, parce que, du 9 au 13 mars, le gourgandin est à Saint-Etienne...
Elle l'invitera un jour chez elle, l'attirera dans sa chambre. Moi, je serai là, planquée, je ne me montrerai
qu'à la dernière seconde, quand il ne pourra plus rien nier du tout... Pour fêter le complot, nous sommes
descendues du bureau dans le salon, avons abandonné le thé pour nous faire offrir l'apéro par Antoine qui
venait de rentrer...
Après deux verres, nous étions un peu gris tous les trois. Les enfants sont sortis, chacun de leur côté, on a
couché le bébé. Antoine a dit : « Reste, Isa, tu manges avec nous et après, on te fait une place dans notre
lit, au milieu de nous. » L'opportunité involontaire de la proposition a arraché un éclat de rire à Isa. Elle
a séché sa répétition de chorale pour partager notre soirée.
Nous avons dressé un joli couvert devant le feu, puis dîné. Antoine a servi un repas soigné, puis s'est
montré au-dessous de tout Moi, j'ai caressé Isabelle jusqu'à minuit, sans hâte ni violence, j'ai ouvert deux
boutons de sa robe, remonté le galbe de sa cuisse. Si j'avais été seule avec elle, peut-être que je l'aurais
déshabillée totalement. Elle se serait laissé faire, elle est si douce et si passive. Elle a dit plusieurs fois :
« Je suis bien chez vous », puis : « Il faut que je m'en aille. » On n'a pas eu la répétition générale qu'on
escomptait, Antoine est trop timide, elle aussi.
Avec le gourgandin, comment les choses se passeraient-elles ? Se passeront-elles ?