Le Gourgandin - Fran.. - Index of
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dilatés... Dieu que j'étais laide ! Laide à en crever ! Laide, conne, petite, mesquine, jalouse ! Et pourtant<br />
de qui ? De quoi ?<br />
Pas de lui à qui je n'ai jamais posé aucune question, demandé aucun compte. « C'était dans notre<br />
contrat », disait-il. Ce « pro » de la séduction, du sexe, dont la réputation dépasse (et de loin) les<br />
performances !<br />
Pas de toi non plus, si proche et si distante à la fois, si hors du commun, à qui je voue l'admiration et la<br />
tendresse les plus pr<strong>of</strong>ondes.<br />
Je ne savais plus que dire, que faire. J'étais rageuse et abattue, j'avançais sur un sol meuble qui s'écroulait<br />
sous mes pas.<br />
Oui ! J'ai eu un moment de colère, l'irrésistible envie de tout laisser en plan, toi et tes photocopies. Il<br />
n'avait qu'à le faire, lui dont la principale activité, à la Boîte, est la lecture de l'Equipe ou de la chronique<br />
de Claude Sarraute dans le Monde.<br />
Et puis je me suis trouvée sordide !<br />
Une fois le tirage des circulaires terminé, je me suis occupée de ton manuscrit, et la musique régulière de<br />
la photocopieuse scandait macabrement mes hoquets et mes reniflements...<br />
<strong>Le</strong> soir à la gym, quand je « L » ai aperçu de loin, je l'ai trouvé vraiment sans aucun charme, ridicule,<br />
grotesque, puant dans tous les sens du terme ! J'ai éprouvé cette sensation étrange de haïr. J'aurais voulu<br />
que tout s'écroule autour de lui, qu'il se casse la gueule, qu'il perde de sa superbe, de son aisance<br />
insolente de gigolo, lui hurler des horreurs, lui jeter un sort, le blesser à mort ! Tu vois, tout cela n'est pas<br />
très sain, pas très beau ! Sandrine, il y a quelques jours, m'a dit : « Je te croyais plus armée face à la<br />
vie. » Armée ! Je ne conçois pas la vie comme une guerre, et n'ai aucune envie d'être « armée ». Ses<br />
jugements de valeur, son manichéisme m'énervent. Je ne la supporte plus.<br />
Oui, j'ai soif de vivre et quand je suis blessée, je réagis hargneusement avec mes dents, mes griffes, avec<br />
des mots quelquefois quand j'ai repris un « équilibre », mots bien pompeux pour dire que je ne suis plus<br />
en colère, ou moins à vif. <strong>Le</strong>s mots en apparence anodins ont parfois d'étranges résonances, aussi l'autre<br />
jour au café avec Alfred, tu as dit plusieurs fois en parlant de moi « ma collègue ». Ce fameux jeudi soir,<br />
« ma collègue, ma collègue » sonnait comme les coups métalliques d'une horloge comtoise dans une<br />
maison vide.<br />
Toutes ces cogitations sont décousues, et n'ont pour seule cohérence que le besoin de te dire, de te parler<br />
dans le creux de l'oreille et aussi de libérer, d'exorciser toutes ces plaies, toutes ces rancunes.<br />
<strong>Le</strong> week-end dernier, après t'avoir écrit, j'ai acéré ma plume venimeuse pour lui cracher des vérités