La Recherche - Veolia Environnement
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MODÉLISATION CLIMAT<br />
* Le lidar est<br />
un système de<br />
mesure spatiale,<br />
utilisant les<br />
ondes électro–<br />
magnétiques,<br />
qui permet<br />
d’étudier les<br />
caractéristiques<br />
optiques et<br />
microphysiques<br />
des nuages.<br />
* Un ppm<br />
correspond à<br />
une molécule de<br />
gaz par million<br />
de molécules<br />
d’air et un ppb<br />
à une molécule<br />
par milliard.<br />
* Le pergélisol<br />
est un sous-sol<br />
gelé pendant au<br />
moins deux ans.<br />
* Le terme<br />
« extrêmement<br />
probable »,<br />
comme dans le<br />
rapport du GIEC,<br />
correspond à une<br />
probabilité de<br />
vraisemblance<br />
supérieure à<br />
95 %, et « très<br />
probable », à<br />
une probabilité<br />
supérieure à 90 %.<br />
FIG. 5<br />
<br />
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<br />
<br />
Mais d’autres rétroactions ont des effets plus<br />
incertains et elles sont plus difficiles à représenter,<br />
voire encore mal connues.<br />
C’est le cas du rôle des nuages. Leur impact sur le<br />
climat est complexe : d’une part, ils contribuent à<br />
l’effet de serre, puisqu’ils sont composés de gouttelettes<br />
d’eau mais, d’autre part, ils réfléchissent les<br />
rayons du soleil – le rapport de l’énergie lumineuse<br />
réfléchie sur l’énergie incidente est appelé « albédo ».<br />
L’importance relative des ces deux effets antagonistes<br />
dépend de nombreux facteurs, notamment de l’altitude<br />
des nuages et de leur type. Davantage de nuages<br />
hauts, comme les cirrus, entraînera un réchauffement,<br />
alors que l’accumulation des nuages bas, de<br />
20 • LA RECHERCHE • OBJECTIF TERRE 2050 • JANVIER 2008 • N° 415<br />
Divergences sur le rôle des nuages<br />
Ces douze modèles de climat prévoient un réchauffement d’environ 1,2° C en l’absence de processus de rétroaction,<br />
atténué d’environ 0,4° C par les océans, et renforcé de 0,8° C à 1,6° C par les processus de rétroaction par la vapeur<br />
d’eau, l’albédo (rapport de l’énergie lumineuse réfléchie sur l’énergie incidente) et les nuages. Les calculs ont été faits<br />
pour un doublement de la teneur atmosphérique en gaz à effet de serre, à raison d’une augmentation de 1 % par an.<br />
k<br />
<br />
<br />
<br />
<br />
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<br />
<br />
<br />
type cumulus, provoquera un refroidissement. Or,<br />
nous ne savons pas avec certitude comment les nuages<br />
évolueront avec le réchauffement climatique. Cette<br />
réponse est le résultat d’un très grand nombre de facteurs<br />
en interaction, mettant en jeu la dynamique<br />
atmosphérique, la stabilité de l’atmosphère, les changements<br />
d’humidité, les différentes propriétés microphysiques<br />
des nuages, etc.<br />
Dans tous les modèles climatiques pris en compte<br />
dans le quatrième rapport du GIEC, les changements<br />
nuageux tendent à amplifier le réchauffement induit<br />
par les gaz à effet de serre (fig. 5). Toutefois, l’ampleur<br />
de ce phénomène est extrêmement variable d’un<br />
modèle à l’autre et elle constitue, de loin, la principale<br />
INFOGRAPHIE : LUDOVIC DUFOUR D’APRÈS IPSL/LMD<br />
source d’incertitude sur la sensibilité climatique. Tout<br />
dépend surtout de la façon dont se comporteront les<br />
nuages bas – stratus, strato-cumulus et petits cumulus.<br />
D’intenses efforts de recherche visent donc actuellement<br />
à mieux connaître leurs conditions de formation,<br />
notamment grâce aux nouvelles techniques<br />
d’observation par satellites utilisant les radars et les<br />
lidars* . On cherche aussi à comprendre pourquoi les<br />
modèles prédisent des réponses nuageuses si différentes,<br />
et quelles sont les plus crédibles.<br />
Tenir compte du cycle du carbone<br />
Une autre inconnue de taille concerne le cycle du<br />
carbone. Si l’on compare les émissions totales de CO2 dues aux activités humaines avec la hausse réelle de la<br />
concentration atmosphérique de ce gaz, on constate<br />
ainsi que moins de la moitié des 9 gigatonnes de CO2 émises chaque année, soit 4 gigatonnes, se retrouve<br />
effectivement dans l’atmosphère. Le reste est absorbé<br />
pour une moitié par les océans et pour l’autre par les<br />
continents. Même si les mécanismes en jeu ne sont<br />
pas parfaitement connus, ces « puits de carbone »<br />
jouent un rôle crucial. Sans eux, la concentration de<br />
CO dans l’atmosphère avoisinerait les 500 parties par<br />
2<br />
million (ppm)* , contre 380 ppm actuellement.<br />
Malheureusement, cet effet régulateur risque de<br />
s’amenuiser dans le futur. Plusieurs études récentes<br />
indiquent en effet que la hausse des températures<br />
devrait induire une réduction de l’efficacité de l’océan<br />
à absorber le CO . Pourquoi ? D’une part, le réchauf-<br />
2<br />
fement des eaux de surface diminue la solubilité du<br />
CO dans l’océan, et donc sa capacité à absorber ce<br />
2<br />
gaz. D’autre part, les modèles simulent une stabilisation<br />
verticale, dans le futur, de la circulation océanique.<br />
Réchauffées, les eaux de surface seront moins<br />
denses et moins facilement entraînées en profondeur<br />
sous l’action de leur poids ou du brassage par le vent.<br />
Le carbone sera moins facilement séquestré dans<br />
l’océan, en particulier dans les hautes latitudes.<br />
Le cycle du carbone fait aussi intervenir la biosphère.<br />
En respirant, tous les organismes libèrent du CO , 2<br />
alors que les végétaux en consomment lors de la photosynthèse.<br />
Pour le moment, le résultat net est tel que,<br />
sur les continents, la biosphère joue globalement le<br />
rôle de puits de carbone. Mais, la hausse des températures<br />
augmente l’activité microbienne dans les sols<br />
et donc la libération de CO par respiration de ces<br />
2<br />
micro-organismes. Qui plus est, la plus grande aridité<br />
des sols dans les régions tropicales due au réchauffement<br />
entraîne une baisse de la productivité des végétaux<br />
et donc de leur absorption de CO . Les modèles<br />
2<br />
les plus pessimistes estiment ainsi que d’ici à la fin du<br />
xxie siècle, la biosphère continentale ne serait plus<br />
un puits, mais bien une source de carbone.<br />
Ces rétroactions liées au cycle du carbone ne sont<br />
pas prises en compte par les simulations du GIEC.<br />
<strong>La</strong> diminution des puits devrait pourtant conduire<br />
à un accroissement du CO dans l’atmosphère plus<br />
2<br />
rapide que prévu et donc à une accélération du<br />
réchauffement. Des modèles tenant compte des<br />
liens entre climat et cycle du carbone indiquent<br />
ainsi que, à l’horizon 2100, cette rétroaction provoquera<br />
une augmentation supplémentaire du CO2 atmosphérique allant de 20 ppm à 200 ppm, selon<br />
les simulations. Le réchauffement global pourrait<br />
alors être supérieur de 1° C à celui annoncé.<br />
Zoom sur l’Hexagone<br />
MODÉLISATION CLIMAT<br />
k<br />
<strong>La</strong> France s’est réchauffée d’environ 1,4° C depuis le début du siècle<br />
dernier. Cette hausse moyenne masque cependant une stabilité des températures<br />
jusqu’aux années 1980, suivie d’un net réchauffement sur les<br />
trente dernières années, à un rythme de 0,55° C par décennie. C’est ce que<br />
montrent les séries de mesures sur l’ensemble de la métropole, après un<br />
traitement statistique pour tenir compte des ruptures dues au déplacement<br />
des stations de mesure ou aux changements de capteurs. <strong>La</strong> France<br />
a en effet la chance de disposer d’un réseau relativement dense d’observations<br />
depuis la fin du XIX e siècle, avec environ 70 stations pour la température<br />
et 300 pour les précipitations. L’analyse des séries quotidiennes<br />
au cours des cinquante dernières années montre aussi davantage de<br />
vagues de chaleur (lorsque la température maximale est supérieure de<br />
5° C à la moyenne saisonnière pendant au moins six jours consécutifs),<br />
ainsi qu’une diminution du nombre de jours de froid et de gel. Le régime<br />
des pluies s’est, lui aussi, modifié : dans la plupart des régions, la durée<br />
des épisodes pluvieux a augmenté en hiver, tout comme les précipitations<br />
totales sur la saison, alors que les étés sont devenus plus secs. Il n’est<br />
pas actuellement possible d’attribuer ces évolutions, encore faibles, à<br />
l’augmentation de l’effet de serre liée aux émissions humaines. Toutefois,<br />
quelques modélisations récentes indiquent l’influence de ces émissions<br />
sur certains paramètres climatiques moyens, comme les températures<br />
nocturnes estivales (2).<br />
Le climat futur dans l’Hexagone peut être estimé à partir de modèles<br />
climatiques dont le maillage est resserré sur cette zone, avec une finesse<br />
de quelques dizaines de kilomètres. On remarque alors une accentuation<br />
de la plupart des tendances déjà observées. Il est ainsi « extrêmement<br />
probable* » que la France de 2050 soit plus chaude qu’aujourd’hui<br />
(d’environ 2° C), que les hivers soient plus pluvieux et les étés plus<br />
secs. L’augmentation des pluies hivernales ne compensant pas la baisse<br />
aux autres saisons, surtout dans le sud du pays, les ressources en eau<br />
devraient diminuer. Il est aussi « très probable* » que les vagues de chaleur<br />
deviennent encore plus fréquentes, d’un facteur 4 à 6 selon certains<br />
scénarios climatiques, et que les jours de gel et de neige en plaine soient<br />
plus rares. En revanche, de même que la fréquence et l’intensité des tempêtes<br />
n’ont pas variés de façon significative au cours des cinquante dernières<br />
années, les simulations climatiques ne montrent pas d’évolution marquée<br />
de la fréquence des vents forts en liaison avec les activités humaines.<br />
LA RECHERCHE • OBJECTIF TERRE 2050 • JANVIER 2008 • N° 415 • 21