Les nouvelles sources du droit commercial ... - unesdoc - Unesco
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REVUE INTERNATIONALE DES SCIENCES SOCIALES<br />
primitifs correspond à ce que sont, chez nous, les brevets et la propriété littéraire<br />
et artistique. Elle comporte non seulement un <strong>droit</strong> exclusif sur des<br />
objets matériels, comme les fruits de certains arbres, mais aussi des prérogatives,<br />
qui, d'un point de vue rationnel, paraissent relever de la plus haute<br />
fantaisie. C'est ainsi qu'un Nottka de rang eminent attachera une grande<br />
importance au privilège héréditaire qu'il a de sautiller et de vociférer d'une<br />
façon particulière pendant une cérémonie, de recevoir une torche pour la<br />
célébration de la puberté d'une jeune fille, de donner certains noms à ses<br />
esclaves et à ses harpons. Cette forme de propriété non matérielle confère<br />
<strong>du</strong> prestige et sera donc étudiée sous cette rubrique.<br />
Une forme très particulière de propriété non matérielle mérite cependant<br />
d'être mentionnée ici. Dans plusieurs tribus des plaines de l'Amérique <strong>du</strong><br />
Nord, la population mâle était organisée en une série de sociétés ou associations<br />
guerrières hiérarchisées, les membres <strong>du</strong> même groupe d'âge passant<br />
normalement en même temps de l'une à l'autre. Cependant, la promotion<br />
n'était pas automatique et l'accès à chaque société devait être acheté.<br />
<strong>Les</strong> nouveaux entraient dans la société <strong>du</strong> Renard, <strong>du</strong> Chien ou <strong>du</strong> Bison, en<br />
acquérant les privilèges des anciens qu'ils remplaçaient : chants, insignes et<br />
danses propres à la société. Le transfert de ces formes de propriété non<br />
matérielle se faisait, chez les Hidatsa (Dakota-Nord), au cours d'un festin<br />
propitiatoire offert aux anciens, qui recevaient aussi des paiements en<br />
nature et procédaient ensuite à l'initiation des nouveaux. Comme dans les<br />
transactions <strong>commercial</strong>es normales, il y avait un conflit d'intérêts opposant<br />
les acquéreurs aux vendeurs. Il s'y ajoutait un élément de prestige : le groupe<br />
le plus jeune, convoitant les prérogatives de ses aînés, était prêt à les payer<br />
d'un bon prix. <strong>Les</strong> anciens, conscients des avantages de leur position, feignaient<br />
la plus grande répugnance à se dessaisir de leurs privilèges et cherchaient<br />
à les vendre au plus haut prix. Après marchandage, les deux parties<br />
parvenaient cependant à un compromis mutuellement acceptable. En effet,<br />
les anciens n'étaient pas absolument maîtres de la situation. S'ils manifestaient<br />
des prétentions exorbitantes que les acquéreurs éventuels ne pouvaient<br />
satisfaire, même avec l'aide de leurs parents et amis, le groupe le plus<br />
jeune pouvait être autorisé à passer outre et à demander l'acquisition des<br />
<strong>droit</strong>s de la société de rang immédiatement supérieur 1 .<br />
Ces transactions ne troublaient pas la paix. Elles illustrent une opposition<br />
normale d'intérêts, finalement résolue par des concessions mutuelles. On<br />
notera en passant que le principe de la hiérarchie contribuait à empêcher<br />
les conflits graves qui se pro<strong>du</strong>isaient parfois dans les tribus où existaient des<br />
sociétés analogues, mais non hiérarchisées.<br />
Le prestige<br />
Perdre la face est intolérable, en raison <strong>du</strong> besoin morbide de prestige. C'est<br />
là l'origine de nombreuses situations de conflit. <strong>Les</strong> indigènes de la côte de la<br />
i. Lowie 1920a, p. 237, 324 et suiv.; id. 1928; Sapir.<br />
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