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Pourtant, juste avant que Cujo se jette sur Vic, celui-ci se retourna et pointa un doigt vers l'animal. Le poil
de Cujo blanchit instantanément. Ses yeux rouges et chassieux tombèrent à l'intérieur de sa tête comme
des billes dans un gobelet. Son museau s'écrasa sur le sol, et se brisa tel un morceau de verre sombre sur
les graviers de l'allée. Au bout d'un moment, il ne restait plus devant le garage qu'un manteau de fourrure
agité
par le vent.
Ne tinquiète pas, disait Vic dans le rêve. Ne tinquiète pas de ce vieux chien, ce n'est qu'un manteau de
fourrure. As-tu reçu le courrier? Ne t'occupe pas du chien, le facteur va venir. Le facteur, c'est lui qui est
important. D'accord? Le facteur...
Sa voix s'éloignait dans un profond tunnel, ne deve-nant plus qu'un faible écho qui mourut bientôt. Puis,
brusquement, la voix rêvée de Vic ne fut plus que le souvenir d'un rêve - Donna s'était réveillée, les joues
trempées de larmes. Elle avait pleuré dans son sommeil. Elle regarda sa montre et eut de la peine à
distinguer l'heure : 1 heure un quart. Un coup d'oeil sur Tad l'informa qu'il dormait à poings fermés, le
pouce fourré dans la bouche.
Ne t'occupe pas du chien, le facteur va venir. Le facteur, c'est lui qui est important.
La signification du colis dépassant de la boîte aux lettres apparut d'un coup à la jeune femme, la frappa
comme une flèche tirée par son subconscient. L'idée la préoccupait depuis des heures mais jusqu'alors,
Donna n'était pas arrivée à la formuler, peut-être parce qu'elle était trop énorme, trop simple, trop
élémentaire-mon-cher-Watson. La veille était un lundi et le facteur avait fait sa tournée. Le paquet que J.
C. Whitney avait envoyé à Joe Camber en constituait la preuve.
Aujourd'hui était un mardi et le facteur repasserait.
Des larmes de soulagement coulèrent sur ses joues encore humides. Donna dut se retenir pour ne pas
réveiller Tad et lui expliquer que tout allait s'arranger, que vers 2 heures de l'après-midi au plus tard - et
sans doute avant 11 heures du matin si la distribution du courrier se faisait ici aussi rapidement que
presque partout ailleurs en ville - ce cauchemar prendrait fin.
Le facteur passerait même s'il n'avait pas de lettre pour les Camber, c'était ce qu'il y avait de plus beau. Il
entrait dans ses attributions de venir voir si le petit drapeau indiquant qu'il y avait du courrier à poster
était levé. Il devrait monter jusqu'ici, sa dernière halte sur la route municipale n∞ 3, pour vérifier qu'il
n'avait rien à prendre, et ce jour-là, il serait accueilli par une femme à demi folle de soulagement.
Son regard se posa sur la boîte à go˚ter de Tad et elle songea à la nourriture qui s'y trouvait. Donna se
revit mettre le reste des provisions de côté, au cas o˘...
enfin... au cas o˘. Maintenant, cela n'avait plus la même importance, même si Tad avait faim le lendemain
matin, ce qui était probable. Donna mangea les dernières rondelles de concombre. Tad n'aimait pas
beaucoup ça de toute façon. Elle se dit en souriant que Tad aurait un curieux petit déjeuner : des g‚teaux
aux figues, des olives et un biscuit ou deux.
Tout en m‚chonnant les deux ou trois rondelles de concombre restantes, elle comprit qu'elle s'était laissé