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Du sang lui coulait sur le visage en un filet poisseux
- son sang, le sang du chien. De son bras, la douleur semblait s'étendre au monde environnant... et petit à
petit le chien arrivait à faire ployer le membre. Le manche éclaté de la batte s'agitait et pendait de façon
gro-tesque, il avait l'air de pousser de l'orbite maintenant vide du chien.
Cujo allait atteindre le cou de Donna.
La jeune femme sentit les dents se poser sur sa peau et, en un ultime hurlement, elle propulsa ses deux
mains en avant repoussant la bête de côté. Cujo tomba lourdement sur le sol.
Ses pattes arrière battirent le gravier. Elles se ralentirent... se ralentirent... puis s'immobilisèrent. Son
oeil restant se leva vers le ciel éblouissant. Sa queue retomba, très lourde, sur les mollets de la jeune
femme. Le chien aspira une goulée d'air, l'éjecta. Il respira une fois encore, émit une sorte de ronflement
puis soudain, un flot de sang jaillit de sa gueule. Il mourut.
Donna Trenton poussa un hurlement de triomphe.
Elle tenta de se relever, tomba, puis parvint à se mettre debout. Elle fit deux pas traînants et trébucha sur
le corps du chien, s'écorchant les genoux sur le gravier.
Elle rampa jusqu'à l'endroit o˘ était tombé le bout renflé de la batte dont l'extrémité était trempée de sang.
La jeune femme la ramassa et se redressa en s'appuyant sur le capot de la Pinto. Elle retourna en
chancelant vers Cujo et se mit à le frapper de son arme. Chaque coup produisait un son sourd quand le
bois heurtait la chair inerte. Des bandes de chatterton noir dansaient et flottaient dans l'air chaud. Des
éclats de bois pénétraient dans les paumes fragiles de Donna et des filets de sang coulaient sur ses
poignets et ses avant-bras. Elle criait encore mais sa voix brisée n'émettait plus qu'une suite de
grognements rauques; les mêmes que ceux de Cujo, juste avant la fin. La batte montait et s'abattait. Donna
s'acharnait sur la dépouille. Derrière elle, la Jaguar de Vic s'engouffrait dans l'allée des Camber.
Vic ne savait pas à quoi il s'attendait, mais s˚rement pas à ceci. Il avait eu peur, mais la vue de sa femme
-
était-ce réellement Donna ? - debout devant cette masse déformée, écrasée, en train de lui assener des
coups de ce qui semblait être un gourdin d'homme des cavernes... ce spectacle avait transformé sa peur en
une panique qui excluait pratiquement toute faculté de penser. Pendant une fraction de seconde qu'il ne
voudrait jamais admettre par la suite, il avait eu l'impulsion de faire marche arrière et de fuir... de fuir
pour toujours.
Ce qui se passait dans ce jardin calme et ensoleillé
paraissait monstrueux.
Il coupa pourtant le moteur et sauta de la voiture.
- Donna! Donna!
Elle semblait ne pas l'entendre ni même se rendre compte qu'il était là. Le soleil lui avait cruellement