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Cujo lui adressait un rictus.
Donna sentit un cri naître dans sa poitrine, lui monter à la gorge telle la lame d'un couteau; elle savait que
la bête s'adressait mentalement à elle, lui disait : Je vais t'avoir mon chou. Je vais t'avoir, gamin. Tu peux
penser au facteur autant que tu veux. Je le tuerai sil le faut, comme j'ai tué les trois Camber, comme je
vais vous tuer toi et ton gosse. Vaut mieux que tu te fasses à
cette idée. Vaut mieux...
Le cri lui blessait la gorge. Il luttait pour sortir et la jeune femme avait l'impression que tout s'acharnait
contre elle : Tad ayant envie de faire pipi, elle avait d˚
baisser la vitre de quelques centimètres et soulever l'enfant pour qu'il puisse uriner par la fente ainsi
ménagée, tout en surveillant si le chien n'arrivait pas.
Le petit garçon avait mis longtemps avant de pouvoir faire et Donna s'était mise à ressentir des douleurs
dans les bras; et puis le rêve, enfin les images de mort et maintenant ce...
Le chien lui adressait un rictus; il lui adressait un rictus, il s'appelait Cujo et sa morsure était mortelle.
Il fallait que le cri jaillisse
(Mais Tad)
ou elle allait devenir folle.
(est en train de dormir.)
Elle bloqua ses m‚choires pour empêcher le cri de dépasser ses lèvres, comme elle avait bloqué sa gorge
quelques instants plus tôt pour retenir les aliments qu'elle venait d'ingurgiter. Donna lutta contre ce
hurlement, le combattit. Puis elle sentit enfin le martèlement de son coeur se ralentir et elle sut qu'elle
avait gagné.
La jeune femme fit un large sourire au chien et approcha de la vitre légèrement embuée par l'haleine de
Cujo, les deux majeurs dressés, sortant de ses poings serrés. " Va te faire foutre ", chuchota-t-elle.
Au bout d'un laps de temps interminable, Cujo reposa ses pattes antérieures sur le sol et s'éloigna vers la
grange. Les pensées de Donna le suivirent dans ce trou sombre
(que mange-t-il là-dedans?)
et la jeune femme referma violemment une petite porte à l'intérieur de sa tête.
Mais elle ne parviendrait plus à dormir, pas avant longtemps, et l'aube paraissait tellement loin. Donna se
redressa derrière son volant, tremblant et se disant avec insistance qu'il était ridicule, absolument
ridicule, de prendre ce chien pour une sorte de fantôme sorti tout droit du placard de Tad, ou encore de
croire qu'il en savait plus qu'elle-même sur la situation.
Vic s'éveilla en sursaut dans une obscurité totale, le souffle court, la gorge cotonneuse. Son coeur cognait